En roulant à l’E10, la Chine créerait un appel d’air sur les marchés des céréales
La nouvelle stratégie industrielle de l’Empire du milieu, vise à développer la production de véhicules roulant à l’E10 issu du maïs transformé en éthanol. Elle créera un appel d’air sur les marchés mondiaux des céréales. Les volumes en jeu sont colossaux.

Au cours de la deuxième édition du Paris Grain Day, la conférence parisienne dédiée aux marchés des grains organisée par Agritel le 26 janvier 2018, les experts internationaux invités ont prédit une stagnation des prix des commodités agricoles pour 2018 et durant la prochaine campagne céréalière. La raison : le niveau très élevé des stocks mondiaux de céréales. Mais à moyen terme, la nouvelle stratégie industrielle de la Chine pourrait changer la donne. Elle s’est engagée dans un vaste programme de réduction des émissions de gaz à effet de serre produits par ses dizaines de millions de véhicules en circulation. Cette nouvelle stratégie industrielle a été présentée par Jean-Yves Chow (Mizuho, Singapour), un des experts invités au Paris Grain Day. Ainsi, l’Empire du milieu se lance en toute discrétion dans la production d’E10, un carburant composé de 10 % de bioéthanol issu de céréales. Le premier signe de cette transition écologique est le déstockage opéré en maïs, selon l’expert chinois. Mais la mauvaise qualité des grains soustrait les stocks détenus de toute utilisation alimentaire pour les animaux. En conséquence, la distillation du maïs est un débouché inespéré pour la planète agricole. Elle désengorgera les marchés, sans avoir à craindre leur reconstitution au niveau des années passées, puisque la production de maïs en Chine est moins attractive depuis qu’elle est moins soutenue. L’économie agricole mondiale est à un tournant. Le passage à l’E10 de la Chine bouleversera indéniablement les équilibres des marchés des commodités. La transition écologique annoncée créera un appel d’air massif sur le marché mondial du maïs, en compétition avec le débouché de l’alimentation animale. Elle accroîtra les courants commerciaux entre pays exportateurs et importateurs. Par effet de dominos, les autres céréales ne seront pas en reste car leur emploi pour la production d’éthanol concurrencera les autres débouchés traditionnels. Et comme pour le soja actuellement, tout ce qui serait produit en plus au niveau mondial pourrait alors être absorbé par l’empire du milieu. Evidemment, le phénomène s’accentuera davantage si la Chine est rejointe par quelques pays voisins sud asiatiques et par l’Inde.
Autres secteurs
Hors agriculture, des phénomènes similaires sont déjà observés sur les marchés du platine et du zinc indispensables pour produire les batteries électriques des véhicules « propres » et pour les moteurs « hybrides » dont s’équipe la Chine. Les cours de ces métaux augmentent. Pour le blé, David Hightower, expert conjoncturiste américain, prévoit aussi, à moyen terme, le retour d’une conjoncture plus favorable. D’ici 2020, la révision de la politique de convergence de la Chine conduirait à un désengagement du gouvernement en matière de prix sur le marché intérieur. Les paysans chinois se détourneraient alors de cette production et les volumes de blé récoltés en moins seraient alors importés. Cette nouvelle politique agricole impactera durablement le fonctionnement du marché mondial du blé. L’Empire du milieu a les moyens pour la financer car il détient des réserves financières colossales équivalentes aux dettes fédérales américaines. Pour le soja, l’embellie des importations chinoises se poursuivrait mais de façon moins prononcée. Dans les élevages, l’amélioration des indices de consommation des animaux atténuera les besoins en tourteaux.