« Être opérationnels et efficaces »
FDSEA de Saône-et-Loire a fait preuve de volonté pour l’avenir. Fini le
temps des négociations Pac. Place maintenant à l’adaptation des outils et exploitations.
Et cela passera sans doute par le développement du Plan protéines et le
marché « de proximité » des tourteaux.
Dans le premier pilier, 30 % des aides sont liés au verdissement, notamment via la diversification des cultures (voir notre édition du 20 février). Chaque exploitation peut également affecter 5 % de ses terres arables en surface d’intérêt écologique (SIE). « Pas gagné au départ », le soja est donc éligible (coefficient de 0,7) au SIE car cette plante fixe l’azote. Et, « il n’y a pas de contraintes particulières (phyto, NDLR) sur les surfaces SIE déclarées… pour l’instant », chuchotait-elle de peur de porter malheur.
Une enveloppe Pac insuffisante
La France va consacrer 151 millions d’€ (2 % d’aides couplées) aux protéines végétales. 2/3 de cette somme sont pour l’autonomie des élevages. 35 M€ seront pour les protéagineux et 6 M€ pour le soja. Le montant unitaire "théorique" sera pour le soja entre 100 et 200 €/ha. Or, si la barre des 100.000 ha est franchie en 2015, « on sera en dessous de cette fourchette », plus proche des 60 €/ha donc. La Fop espère - sans réponse du ministère - donc la "fongibilité" (transfert) des aides. Seules réponses obtenues : « pas besoin de contractualisation » et « l’aide couplée sera pour toutes les productions ».
Sur les aides du second pilier Pac, les mesures agro-environnementales (MAEC et variante zone Irriguée) sont liées à des critères « très contraignants notamment en terme de réduction d’IFT qui feront qu’elles seront peu utilisées », prédit la Fop. Le syndicalisme « d’hommes et de filière » a proposé et espère toujours « une MAEC cultures légumineuses et mellifères » à la place.
Des débouchés bons pour l’environnement
Le soja est bon pour l'alimentation et l'environnement. Membre de l’Afdi, Luc Beaumont réagissait positivement, lui qui aimerait faire comprendre « à nos politiques, qu’ici, on a une éthique de la production et un respect des populations locales, contrairement parfois à l’étranger ». L’Union européenne et la France continuent pourtant d’importer massivement, sans contrôler que les règles françaises soient respectées…
C’est donc sur un « marché de niche » que va se positionner le département. Celui des soja non OGM, notamment pour l’alimentation animale. Et pour assurer continuer l’approvisionnement et la qualité des tourteaux, Bourgogne du Sud a transformé l’usine d’Extrusel (Chalon nord) en site de trituration depuis 2006. Changement de forme sociétaire également. C'est une Sica avec des parts producteurs et des parts consommateurs/transformateurs (Sanders, Philicot et Soreal) « pour passer ce biais de concurrence », explique Didier Laurency. Egalement président de Cérévia, il pense que les surfaces ne devraient pas beaucoup évoluer en Saône-et-Loire (17.000 t cette année) mais celles des autres coopératives partenaires (Terre d’Alliances, Dijon Céréales, Interval) si. « Pour amortir vite l’outil (2,5 millions €), on a la chance d’avoir les débouchés sur nos territoires », comme les 60.000 t de tourteaux de soja non OGM (90.000 t de graines de soja donc) consommés par l’AOC Comté chaque année. N’étant plus "attaquable" (OPA) sur les marchés boursiers, Avril (ex-Sofiproteol) est aussi entré dans le capital et « offre d’autres marchés ».
Les agriculteurs présents auraient visiblement aimé cependant être quand même accompagnés d’une « volonté politique » plus forte « car cela fait 25 ans qu’on nous dit qu’on a besoin de nous ». Ce qui faisait dire à Lionel Borey en guise de conclusion : « n’attendons pas tout des politiques. Structurons nos filières pour sécuriser nos revenus demain. A nous d’être opérationnels et efficaces ».
La tension se fera sur les tourteaux
Nathalie Gosselet présentait une étude prospective à l’horizon 2030 pour savoir si « l’offre en huile permettrait de répondre à la demande ? » D’ici 2030, une hausse mondiale de +40 % se fera jour côté demande en protéine. Celle en protéine végétale va le plus augmenter (+53 %, soit +2,2% par an), notamment en Asie. Entre 2010 et 2030, la hausse de la production animale (+33 %) entrainera une hausse de +43 % en tourteaux d’oléagineux au niveau mondial. Le pouvoir d’achat de toutes les populations ne pourra pas suivre partout et « on ne va pas pouvoir fournir tous les tourteaux derrière », anticipe la Fop. La demande sera contrainte par l’offre. « Cette lecture doit nous conforter pour avoir des outils de transformation chez nous, puisque la tension des prix va se faire sur les tourteaux. Car les consommateurs de tourteaux vont devoir se poser la question d’approvisionnements pérennes », analysait Lionel Borey.
D’autant que la demande en huile végétale devrait elle aussi être en hausse de +39 % d’ici 2030. Une forte hausse des rendements est attendue puisqu’un hectare devra nourrir 5,3 personnes, soit une de plus qu’actuellement. « En France, les hausses de production viendront pour les ¾ de la hausse des rendements ». La recherche est donc primordiale. Le président de la section Grandes cultures pour la FRSEA Bourgogne, Jacques de Loisy, invitait donc « à penser dès à présent au coup d’après » pour « maintenir ce développement industriel avec une partie alimentaire ». Il regrettait de voir trop souvent « dans l’esprit des citoyens et des élus, la peur de l’avenir lointain prendre le pas sur les perspectives optimistes d’aujourd’hui ». En effet, en 2030, 90 % des oléagineux seront à destination de alimentation, « fermant la porte aux détracteurs » voyant là une possible concurrence entre alimentation et autres usages.