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EXCLU WEB : La vigne paye un lourd tribut au gel printanier

Le gel qui vient de s’abattre sur l’Hexagone a occasionné la perte d’environ un tiers de la vendange à venir, avec un coût d’au moins 2 Mrd€ pour la filière viticole, a exposé Jérôme Despey, président du conseil viticole de FranceAgriMer, à la réunion de la cellule de crise le 12 avril autour du ministre de l’Agriculture. 

EXCLU WEB : La vigne paye un lourd tribut au gel printanier

Exceptionnel par son déploiement sur tout le territoire, l’épisode de gel de la cette semaine est intervenu sur une vigne en plein débourrement. Les conséquences sur le millésime 2021 risquent d’être très élevées.

L’épisode de gel de printemps qui a traversé la France du 5 au 8 avril et particulièrement dans la nuit du 7 au 8, a très durement touché l’ensemble du vignoble français. « S’il est encore trop tôt pour connaître avec précision l’étendue des dégâts, 80% du vignoble de nos régions est aujourd’hui affecté », a indiqué jeudi Jean-Marie Barillère, le président du Comité National des Interprofessions des Vins à appellation d'origine et à indication géographique (CNIV). « Les retours qui me parviennent me laissent sans voix, vue l’ampleur des dégâts dans de nombreuses régions sur de nombreuses productions », a commenté de son côté le vigneron Jérôme Despey, secrétaire général de la FNSEA.

Si pratiquement aucun vignoble n’a été épargné, certains vont payer un tribut particulièrement lourd, selon les dernières remontées des organisations professionnelles comme la Gironde, Bergerac et Duras, le vignoble nantais, la Bourgogne du Sud, ou encore le sud du Beaujolais et la Vallée du Rhône.  « Nous savons déjà que certains secteurs ont été touchés dans leur intégralité », assurait vendredi Philippe Pellaton, le président d’Inter Rhône. Dans le Cher, les vignes protégées par irrigation ou tour antigel (comme à Quincy ou Reuilly) auraient plutôt bien résisté mais elles ne représentent que 15% de la surface du Centre Loire. En Alsace, les gelées semblent n’avoir fait que peu de dégâts, le débourrement n'ayant commencé que timidement.

 

Les élus mobilisés

 

L’une des particularités de l’épisode de cette année est qu’il a également affecté, et particulièrement durement, les vignobles méridionaux, à commencer par le Languedoc. 90% du vignoble de l’Hérault a été affecté, selon la cellule de crise de la Chambre départementale d’Agriculture. « A Cabrières, 100% du vignoble serait touché tout- comme à Faugères », s’est inquiété le député de la circonscription Philippe Huppé. La situation n’est pas plus enviable dans l’Aude où l’on évoque une situation « catastrophique ». Les départements du Vaucluse et des Bouches-du-Rhône n’ont pas été épargnés non plus.

L’ampleur de la catastrophe a conduit le groupe Vigne, vin et œnologie de l’Assemblée national à lancer l’alerte dans une tribune publiée le 8 avril. « Le diagnostic final des préjudices sera établi d’ici deux semaines, mais nous craignons vraiment le pire », écrivent les 70 parlementaires. Les élus appellent le gouvernement à aider les vignerons par des mesures d’aides supplémentaires aux outils à sa disposition mais aussi par les aides à l’investissement prévues dans le plan de relance destinées à lutter contre les aléas climatiques. Le groupe rappelle également qu’un rapport parlementaire du député Frédéric Descrozaille doit être bientôt remis au ministre de l’Agriculture sur les assurances récoltes.

Si elles restent à évaluer, notamment au regard des nouveaux épisodes de gel attendus dans la semaine du 12 au 16 avril, les conséquences sur la récolte sont d’ores et déjà certaines, les bourgeons ayant pour la plupart débourré. Pour mémoire, les épisodes de gel importants, mais moindres que ceux de cette année, avaient contribué en 2017 à une chute spectaculaire de la production à 36,7 millions d’hectolitres (Mhl), bien en-deçà de la moyenne quinquennale, qui se situe à 44 Mhl.

Christiane Lambert dans la Drôme et l’Ardèche

Christiane Lambert dans la Drôme et l’Ardèche

La présidente de la FNSEA, Christiane Lambert, s’est rendue, le 9 avril dans les départements de la Drôme et de l’Ardèche pour visiter des exploitations qui ont été victimes du gel. Elle a notamment visité le Domaine Lombard chez Jonathan Almeras, à Livron-sur-Drôme. Ce dernier a vu sa production détruite à 90 % et ne s’attendait pas à un tel désastre. « Je ne comprends pas, c'est terrible. Je ne pensais pas qu'on pouvait descendre autant (…) Mentalement on s'était préparé, mais pas autant. », a-t-il déclaré. Christiane Lambert a ensuite visité une exploitation arboricole près de Toulaud (Ardèche), elle aussi très impactée par ces gelées tardives. « Dame nature est parfois notre meilleure alliée comme notre pire ennemie. Perdre en une nuit, une récolte qui a demandé une année de travail, c’est très dur », a-t-elle dit demandant au Gouvernement d’agir vite. « Ce qui est prioritaire pour l'instant, c'est de trouver des mesures de traitement de trésorerie, des reports de cotisations sociales, des annulations de taxes sur le foncier non-bâti », a esquissé la présidente de la FNSEA. « C'est beaucoup d'espoirs ruinés quand on a 100 % de sa production détruite sur une année. C'est dramatique économiquement et moralement », a-t-elle dit au micro de RTL. Le gouvernement a annoncé, le 8 avril par l’intermédiaire du ministre de l’agriculture, Julien Denormandie qu’il allait « déployer le régime de calamité agricole »

 

Gel : une perte d'environ un tiers de la vendange

Le gel qui vient de s’abattre sur l’Hexagone a occasionné la perte d’environ un tiers de la vendange à venir, avec un coût d’au moins 2 Mrd€ pour la filière viticole, a exposé Jérôme Despey, président du conseil viticole de FranceAgriMer, à la réunion de la cellule de crise le 12 avril autour du ministre de l’Agriculture. Face aux conséquences de ce gel « pire qu’en 2017 » encore présent dans les esprits, il a demandé au ministre au nom des viticulteurs, des coopératives et des maisons de négoce, des mesures fiscales (exonération de TFNB), sociales (suppression en 2022 des charges patronales et salariales) et bancaires (report en fin de tableau des annuités avec prise en charte des intérêts). Il a demandé d’autres mesures «qui ne coûtent rien à l’État» : prolongation jusqu’au 31 décembre du stockage privé, qui était prévu jusqu’au au 30 juin pour éviter de libérer des stocks sur le marché avant la petite vendange qui s’annonce. Et «la plus grande attention» pour éviter que du vin venant de pays moins frappé par le gel se retrouve commercialisé sous une bannière française. Jérôme Despey a annoncé qu’une prochaine réunion de la cellule de crise se tiendra le lundi 19 avril. Quant au fonds exceptionnel annoncé par Julien Denormandie, il fera l’objet d’un arbitrage interministériel qui en définira les modalités, indique-t-on par ailleurs dans la filière.

Gel: Jean Castex précise les premiers dispositifs de soutien à l'Assemblée

Interrogé par de nombreux députés sur le gel des derniers jours, lors de la traditionnelle séance de questions au gouvernement à l’Assemblée le 13 avril, le Ppremier ministre Jean Castex a confirmé la création d’un «dispositif exceptionnel de solidarité national». Dispositif qui sera proposé «dans les prochains jours» par le ministre de l’Agriculture Julien Denormandie et le ministre des Comptes publics Olivier Dussopt, a précisé ce dernier dans l’Hémicycle. Comme annoncé, ce dispositif viendra en plus du régime des calamités agricoles dont le fonds (FNGRA) a été déplafonné vu l’ampleur des dégâts. Sans spécifier dans quelle mesure il sera abondé, Olivier Dussopt a indiqué que le FNGRA «correspond en moyenne à 130-150 millions d’euros (M€) par an», mais qu’il a déjà largement dépassé cette limite par le passé: «Je pense à 2004, où nous avions consacré collectivement 800M€ au financement du FNGRA», a-t-il indiqué. Jean Castex a de plus indiqué qu’il faut «aussi aller plus vite en consentant des avances de trésorerie à des agriculteurs qui sont sinistrés, et qui étaient déjà en grave difficulté dans le cadre de la crise [de la Covid-19] que nous traversons».