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Alimentation

Faut-il arrêter de manger de la viande ?

Elle est professeure agrégée de mathématiques, docteure en sciences
sociales et présidente de l’Association végétarienne de France. Il est
ingénieur agronome, économiste, consultant sur la protection et le bien
être des animaux. Qu’ont-ils de commun entre eux ? Ils viennent de
cosigner un ouvrage « Faut-il arrêter de manger de la viande ? » dans
lequel ils confrontent leurs points de vue antagonistes.
Par Publié par Cédric Michelin
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Elodie Vieille Blanchard a commencé à s’interroger sur sa consommation de viande lorsque sa famille a adopté un lapin nain, alors qu’elle avait quatorze ans. Dès lors, elle a refusé de manger du lapin, puis de la viande de mouton, puis toutes les autres viandes avant de renoncer au poisson. Son choix personnel est devenu éthique quand quelques années plus tard elle est devenue végétalienne, puis végane (1).

Au refus de la maltraitance des animaux dans les élevages « concentrationnaires », selon ses termes, et de leur souffrance à l’abattoir, elle ajoute désormais l’impact écologique et social négatif de l’élevage : la destruction de la forêt amazonienne, les émissions de gaz à effet de serre, l’appauvrissement de la biodiversité, le gaspillage des ressources en eau, la faim dans le monde. Sans oublier les effets délétères de la viande sur la santé.

Invitée avec son contradicteur, René Laporte, à un débat organisé par l’Association française des journalistes agricoles (Afja), le 10 avril, elle a enfoncé le clou en déclarant que « la façon de se nourrir était un choix politique » et que son objectif à elle, c’était aussi d’ouvrir la porte à d’autres façons de s’alimenter en combattant le discours nutritionnel dominant pour donner d’autres choix à la société française dans laquelle 3 % seulement de la population est végétarienne.

René Laporte qui se revendique mangeur de viande s’attache, dans l’ouvrage, à réfuter ces arguments. Oui, l’élevage produit des gaz à effet de serre, comme toute activité humaine d’ailleurs. Mais pas autant que ne le disent les premiers chiffres de la FAO qui circulent en boucle. La nouvelle évaluation lui attribue 14,5 % et non les 18 % habituellement retenus. Non l’élevage n’est pas responsable de la faim dans le monde : il contribue au contraire à nourrir l’humanité. Non il n’est pas responsable de la déforestation, ni du gaspillage de l’eau. Ici aussi, il s’inscrit en faux contre les 15.000 litres d’eau qui seraient nécessaires à la production d’un kilo de viande de bœuf. Le chiffre à retenir serait plutôt de l’ordre de 300 à 500 litres, car toute la pluie qui tombe n’est pas absorbée par la prairie sur laquelle paissent les animaux. Et de souligner également, qu’un régime alimentaire sans protéines animales (viande, mais aussi lait et œufs) n’est pas viable, « en tout cas de la naissance à la mort d’un individu ».

Contrairement à ce qu’affirme sa contradictrice. Si René Laporte est prêt à corriger les excès auxquels a pu conduire quelquefois l’élevage intensif, le combat d’Elodie Vieille Blanchard, « sortir du modèle carniste », ainsi qu’elle l’appelle, est d’une autre nature. Il vise à l’émancipation des animaux, dans la lignée de l’abolition de l’esclavage au XIXème siècle.

(1) Est végétarien, celui qui ne consomme pas de viandes, le végétalien s’abstient de toute nourriture d’origine animale (viandes, produits laitiers, œufs, miel). Outre une alimentation strictement végétale le végane refuse également de se vêtir de fourrure, de cuir et de laine, et même d’assister à des spectacles mettant en scène des animaux (cirque par exemple).

Faut-il arrêter de manger de la viande ? De René Laporte et Elodie Vieille Blanchard, aux éditions le muscadier. Prix : 9,90 € TTC


Les végétariens auraient-ils une santé fragile ?



C’est une étude qui étonnera peut-être. Généralement, on crédite les végétariens de beaucoup d’avantages santé : moins d’hypertension, de cholestérol, de calculs biliaires, de maladies cardiovasculaires, de diabète, d’accidents vasculaires cérébraux, moins même de certains cancers… Une étude menée auprès de 1.320 Autrichiens, de tous âges et toutes catégories socio-économiques, jette aujourd’hui un pavé dans la mare. Par rapport aux omnivores de toutes sortes – qui mettent plus ou moins l’accent sur la viande, le poisson, les œufs ou les produits laitiers -, les végétariens ont un indice de masse corporelle plus faible et consomment aussi moins d’alcool. Néanmoins leur santé est plus fragile, avec une plus grande incidence des cancers, des allergies et de troubles psychiques comme l’anxiété et la dépression… Ils suivent aussi plus souvent des traitements et sont de plus grands consommateurs de soins. Ces Autrichiens végétariens ne sont pas récompensés en tout cas par une meilleure santé. A moins qu’ils ne soient devenus végétariens parce qu’ils étaient déjà mal-portants ! L’étude ne permet pas de le savoir… Elle mériterait en tout cas d’être approfondie par d’autres
enquêtes.