Georges Duboeuf, l’adieu d’une figure du Beaujolais
Le mythique négociant en vin du Beaujolais, âgé de 86 ans, s’est éteint samedi 4 janvier. On retiendra son riche parcours et sa volonté de promouvoir le Beaujolais, notamment les beaujolais nouveaux qu’il a fait connaître à travers le monde.

L’année 2020 vient à peine de débuter que le Beaujolais est déjà sous le coup d’une triste nouvelle. Samedi 4 janvier, aux alentours de 18 h, Georges Duboeuf, que beaucoup de personnes surnommaient le « Pape du Beaujolais », est décédé à l’âge de 86 ans d’une hémorragie cérébrale
Cet inlassable ambassadeur du Beaujolais, auquel son nom est associé dans de nombreux pays étrangers, avait officiellement passé la main en 2018 à son fils Franck à la tête de la société des Vins Georges Duboeuf, basée à Romanèche Thorins, et qui commercialise chaque année 30 millions de bouteilles, qu’il avait créée en 1964, alors qu’il n’avait que 31 ans.
Huit ans plus tôt, il avait constitué un groupement de producteurs, « L'Écrin Mâconnais-Beaujolais », rassemblant une cinquantaine de vignerons de toutes les appellations du secteur et sélectionnés pour la qualité de leurs vins. « Georges Duboeuf se chargeait de sélectionner les vins, de les embouteiller, puis de les commercialiser avec le nom de chaque vigneron sur l’étiquette, mais sous le logo de l’Écrin », a écrit Jean Orizet, auteur de l’ouvrage Beaujolais, La passion en partage, consacré à Georges Duboeuf.
« J’ai fait ce que je devais faire »
C’est justement à l’occasion de la sortie de ce livre, en septembre 2016, que le plus emblématique négociant du Beaujolais avait accepté de revenir sur son riche parcours pour l’Information agricole du Rhône. « Je n’ai jamais eu de regard particulier sur mon parcours. Je suis toujours allé de l’avant pour découvrir ou entreprendre des choses nouvelles. J’ai d’ailleurs toujours fonctionné ainsi ». Malgré ce surnom de « Pape du Beaujolais » qu’il n’affectionnait pas forcément, par modestie sans doute, Georges Duboeuf reconnaissait pourtant avoir assumé ce statut. « J’ai fait ce que je devais faire. […] Je suis reconnaissant des vignerons, qu’ils soient indépendants ou présidents de cave coopérative, de nous être fidèles, de me suivre et de nous écouter », déclarait celui qui, malgré son statut d’homme fort du Beaujolais, n’a jamais pris la présidence de l’interprofession.
Si sa rencontre avec Paul Bocuse était pour lui la plus marquante, Georges Duboeuf était aussi connu pour avoir organisé de mythiques fêtes du beaujolais nouveau dans les années 1980. S'y pressaient des stars, des coureurs automobiles, des chanteurs, des restaurateurs étoilés et des hommes politiques. La belle époque du Beaujolais, avant que la mode du primeur ne s’essouffle progressivement.
Pour Dominique Piron, président d’Inter Beaujolais, suite à cette disparition, « une page se tourne » dans le Beaujolais. « Son intuition lui a permis de tracer un chemin tout neuf, son propre chemin au début, qui plus tard deviendra un fil conducteur pour beaucoup d’autres, sans jamais se retourner et sans jamais manquer aucun rendez-vous de ce chapitre de l’histoire du Beaujolais. Par sa vision et son travail, il a redonné de la vie, de la couleur, des arômes, quelque chose de joyeux, à ces vins du Beaujolais. Il a été un catalyseur, emmenant avec lui d’autres négociants et d’autres vignerons, et le Beaujolais a été ainsi le premier vignoble de France à refaire la Une des journaux et télévisions, en France et dans le monde. […] C’était du goût, un nez, de l’intuition, de la vision, une mémoire énorme et surtout beaucoup de travail ».
D’autres proches et professionnels viticoles du Beaujolais n’ont pas manqué de lui rendre hommage, à commencer par Bernard Pivot, avec ses mots, tel qu’on le connaît. « C’était un grand ami dont j’admirais les qualités humaines à la hauteur, sa vie durant, de ses qualités professionnelles. Est-ce un hasard si ce négociant mondialement connu a attendu pour partir les premiers jours de ‘’deux mille vins’’ ? » Daniel Bulliat, président de l’ODG beaujolais – beaujolais villages, évoque « un homme du vin et une force de travail énorme. Il était parti de rien et consacrait quinze heures de travail par jour, sept jours sur sept. Grâce à son sens de la communication et du marketing, il a exporté son vin et son image dans de très nombreux pays. C’était un visionnaire, un précurseur et un créateur. Il restera une forte personnalité et un passionné du vin qui a beaucoup fait pour le Beaujolais, grâce aussi à la construction de son Hameau du vin en 1993. Nous sommes tous tristes de le voir partir ». La rédaction de l'Exploitant Agricole de Saône-et-Loire adresse ses sincères condoléances à toute sa famille.