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Nouvelles technologies

IA : des avancées en viticulture

L’intelligence artificielle (IA) est un outil que l’amont de la filière viticole utilisent bien avant qu’elle devienne le sujet du jour. La vigne et la cuve s’y sont mis par la force des choses pour dupliquer rapidement les tâches répétitives, par l’IA algorithmique, avant le marketing et la distribution, qui eux font plutôt appel à l’IA textuelle, a récemment exposé Philippe Hugon, directeur général de « vin.co », au Wine Paris.

« L’IA est une révolution silencieuse. Elle a commencé là où c’est le plus silencieux, à l’amont », a indiqué Philippe Hugon, fondateur de Vin.co, plateforme de marketing destinée à une clientèle de producteurs, coopératives, négociants et organisations professionnelles, au Wine Paris, le salon international du vin à Paris le 10 février. À l’appui de son affirmation, il a cité Chouette, société fondée en 2015 par deux anciens ingénieurs d’Airbus, qui propose des solutions pour la santé des vignobles basées sur l’intelligence artificielle à partir de drones et de capteurs embarqués sur les tracteurs. « L’IA doit apporter non des gadgets, mais des preuves ». Dans la filière viticole, elle est utile dans trois domaines, a-t-il résumé : à la production (à la vigne et à la cuve), en organisation du travail et à l’aval (en marketing et distribution).

Un amplificateur de données

À la production, l’IA, algorithmique, part d’images prises par des drones et des caméras, pour analyser le risque de mildiou, oïdium et autres esca. Le vigneron entre ces analyses sur son compte Chouette, par exemple, et les croise avec la localisation de sa parcelle, les cépages implantés sur celle-ci et les prévisions météorologiques. « Ce genre d’IA s’est nourri de beaucoup de données à travers le monde sur le type de climats, de sols, de cépages et de traitements. Il est analogue à ce qui se fait en imagerie médicale ». À la table ronde de la conférence, Sara Ferreira, œnologue chez Enartis, qui aide les viticulteurs dans leur vinification, a détaillé le fonctionnement de l’IA à la cave : les capteurs digitalisent dans la cuve les données et les insèrent dans une matrice de l’équilibre gustatif d’un vin du cépage qu’exploite le vigneron. L’IA peut alors consulter les nuages de points de tous les critères des vins de ce cépage dans le monde, afin de renseigner de façon précise sur les retours d’expérience et sur la concurrence. La différence avec la simple navigation sur la toile est « énorme ». Là où Internet est capable de répondre à la question « avec tel cépage quel ferment faut-il introduire dans la cuve ? », l’IA enrichira ces scénarios avec des résultats provenant de beaucoup plus de données, puisées à l’étranger et dans des secteurs comme la recherche en biotechnologies. « La différence est comparable à un sondage effectué auprès de dix personnes et un autre auprès d’un million, d’habitants », a illustré Philippe Hugon. « Ce genre de pratique a été mise en place chez les vignerons bien avant Chat GPT, qui est sur le marché depuis deux ou trois ans ».

« Nourrir son IA »

L’IA a des usages plus récents, à commencer par l’organisation du travail. Elle peut résumer en une page la conversation d’une réunion professionnelle d’une heure et demie en rassemblant les éléments tâtonnants et dispersés de la discussion. Cette fois, elle ne manipule plus des 0 et des 1, mais des mots. Cette forme textuelle d’IA se développe aussi dans le marketing et la vente. L’IA est capable de combiner les termes pour rédiger un texte, comme « ce vin rouge puissant se mariera avec une côte à l’os grillée ». Alors que la rédaction d’une fiche produit pour un vin coûte classiquement 5 €, il suffit de 10 à 15 centimes pour en faire une avec l’IA, selon Édouard Margain, de la start-up Upseller. Mais pour que les arguments de marketing soient originaux, il faut « nourrir son IA » avec le plus d’éléments possibles, a prévenu Valentin Brel, consultant IA et enseignant à Sciences Po Paris.