Jérôme Fourquet, Directeur adjoint de l’Ifop
« Il n’y a pas de forte poussée du vote Le Pen chez les paysans »
Malgré la percée du Front national dans le monde rural, Jérôme Fourquet
estime que les agriculteurs n’ont pas davantage voté Marine Le Pen que
la moyenne nationale.
estime que les agriculteurs n’ont pas davantage voté Marine Le Pen que
la moyenne nationale.
- Quelles leçons tirez-vous du premier tour de l’élection présidentielle ?
Jérôme Fourquet : J’en tire plusieurs. D’abord ce premier tour s’est traduit par une poussée de la Gauche, celle de François Hollande comme celle de Jean-Luc Mélenchon. Evènement inédit sous la cinquième République, le candidat sortant n’est pas arrivé en tête au premier tour. Néanmoins la Droite a résisté. Nicolas Sarkozy ne réalise que quatre points de moins qu’en 2007. Enfin ce premier tour s’est traduit par une forte poussée du Front national, très importante par rapport à 2007 et même significative par rapport à 2002 quand Jean-Marie Le Pen a été qualifié au second tour.
- La percée du Front national dans le monde rural concerne-t-elle les agriculteurs ?
J. F. : A mon avis, la montée en puissance du vote frontiste chez les paysans est équivalente à celle qu’on observe au niveau national. Ni plus, ni moins. Selon les enquêtes que nous avons réalisées, il n’y a pas de forte poussée du vote FN dans l’électorat paysan. La tentation frontiste dans le monde rural est certainement beaucoup plus présente chez les ouvriers, les employés, les artisans et les commerçants que chez les agriculteurs.
- Le sentiment anti européen a-t-il cristallisé le vote frontiste ?
J. F. : Les premiers sujets de préoccupation des électeurs du Front national portent sur l’immigration, l’insécurité et la dégradation du pouvoir d’achat. Au final des enjeux sociétaux que Marine Le Pen a parfaitement exploités. Ceci étant, davantage que le rapport à l’Europe, c’est l’hostilité à la mondialisation qui a structuré ce vote. Ces électeurs considèrent que la France ne peut pas être diluée dans la mondialisation, la concurrence des bas salaires et les flux migratoires non maîtrisés. Selon eux, non seulement l’Europe ne joue pas un rôle protecteur mais elle aggrave ces mouvements. C’est en ce sens qu’elle suscite un sentiment de rejet.
L’écologie au dernier rang
- L’écologie est très présente dans le champ médiatique et dans les réglementations diverses et variées imposées aux agriculteurs. Pourtant elle a réalisé un score médiocre…
J. F. : Selon les enquêtes que nous avons pu réaliser, la sensibilité environnementale est plutôt en recul dans l’opinion depuis quelques années et notamment depuis le Sommet de Copenhague (Ndlr : Sommet sur le climat qui a abouti à un échec en décembre 2009). Elle arrive au dernier rang des préoccupations des Français après les inquiétudes économiques et sociales. Les gens attendent plutôt des réponses sur le pouvoir d’achat, la réduction des déficits….plutôt que sur l’environnement.
- Cette préoccupation ne peut-elle pas resurgir à l’occasion des élections législatives ?
J. F. : Le résultat ne sera certainement pas très différent. Ceci étant les élections législatives obéissent à une autre logique institutionnelle. D’ailleurs Daniel Cohn Bendit l’a bien compris. L’élection présidentielle n’est pas taillée pour eux. Mais dans le cadre des prochaines élections, le sentiment écologiste peut retrouver des couleurs et grâce aux accords passés avec le Parti socialiste, les écologistes pourront faire entendre leur voix et leur point de vue.
- Quels commentaires vous inspire le débat entre Nicolas Sarkozy et François Hollande ?
J. F. : François Hollande était en position de favori et Nicolas Sarkozy de challenger. Il s’agissait de savoir si Nicolas Sarkozy qui est un bon débatteur allait déstabiliser François Hollande et prendre le dessus. Il n’y est pas parvenu. Le match a été relativement équilibré et François Hollande a bien résisté. En tout cas il n’a pas perdu. En prenant une comparaison dans le foot : il a gagné le match aller (ndlr : le premier tour), le match retour s’est soldé par un nul. Au final il a gagné. Contrairement aux interrogations qu’on pouvait avoir sur son aptitude à exercer la fonction présidentielle le candidat socialiste a semblé être à niveau et les attaques contre lui n’ont pas porté. Au bout du compte, ce débat n’a pas permis à Nicolas Sarkozy de combler son retard dans les sondages.
(1) Jérôme Fourquet est directeur adjoint du département opinion et stratégie d’entreprise de l’Ifop
Jérôme Fourquet : J’en tire plusieurs. D’abord ce premier tour s’est traduit par une poussée de la Gauche, celle de François Hollande comme celle de Jean-Luc Mélenchon. Evènement inédit sous la cinquième République, le candidat sortant n’est pas arrivé en tête au premier tour. Néanmoins la Droite a résisté. Nicolas Sarkozy ne réalise que quatre points de moins qu’en 2007. Enfin ce premier tour s’est traduit par une forte poussée du Front national, très importante par rapport à 2007 et même significative par rapport à 2002 quand Jean-Marie Le Pen a été qualifié au second tour.
- La percée du Front national dans le monde rural concerne-t-elle les agriculteurs ?
J. F. : A mon avis, la montée en puissance du vote frontiste chez les paysans est équivalente à celle qu’on observe au niveau national. Ni plus, ni moins. Selon les enquêtes que nous avons réalisées, il n’y a pas de forte poussée du vote FN dans l’électorat paysan. La tentation frontiste dans le monde rural est certainement beaucoup plus présente chez les ouvriers, les employés, les artisans et les commerçants que chez les agriculteurs.
- Le sentiment anti européen a-t-il cristallisé le vote frontiste ?
J. F. : Les premiers sujets de préoccupation des électeurs du Front national portent sur l’immigration, l’insécurité et la dégradation du pouvoir d’achat. Au final des enjeux sociétaux que Marine Le Pen a parfaitement exploités. Ceci étant, davantage que le rapport à l’Europe, c’est l’hostilité à la mondialisation qui a structuré ce vote. Ces électeurs considèrent que la France ne peut pas être diluée dans la mondialisation, la concurrence des bas salaires et les flux migratoires non maîtrisés. Selon eux, non seulement l’Europe ne joue pas un rôle protecteur mais elle aggrave ces mouvements. C’est en ce sens qu’elle suscite un sentiment de rejet.
L’écologie au dernier rang
- L’écologie est très présente dans le champ médiatique et dans les réglementations diverses et variées imposées aux agriculteurs. Pourtant elle a réalisé un score médiocre…
J. F. : Selon les enquêtes que nous avons pu réaliser, la sensibilité environnementale est plutôt en recul dans l’opinion depuis quelques années et notamment depuis le Sommet de Copenhague (Ndlr : Sommet sur le climat qui a abouti à un échec en décembre 2009). Elle arrive au dernier rang des préoccupations des Français après les inquiétudes économiques et sociales. Les gens attendent plutôt des réponses sur le pouvoir d’achat, la réduction des déficits….plutôt que sur l’environnement.
- Cette préoccupation ne peut-elle pas resurgir à l’occasion des élections législatives ?
J. F. : Le résultat ne sera certainement pas très différent. Ceci étant les élections législatives obéissent à une autre logique institutionnelle. D’ailleurs Daniel Cohn Bendit l’a bien compris. L’élection présidentielle n’est pas taillée pour eux. Mais dans le cadre des prochaines élections, le sentiment écologiste peut retrouver des couleurs et grâce aux accords passés avec le Parti socialiste, les écologistes pourront faire entendre leur voix et leur point de vue.
- Quels commentaires vous inspire le débat entre Nicolas Sarkozy et François Hollande ?
J. F. : François Hollande était en position de favori et Nicolas Sarkozy de challenger. Il s’agissait de savoir si Nicolas Sarkozy qui est un bon débatteur allait déstabiliser François Hollande et prendre le dessus. Il n’y est pas parvenu. Le match a été relativement équilibré et François Hollande a bien résisté. En tout cas il n’a pas perdu. En prenant une comparaison dans le foot : il a gagné le match aller (ndlr : le premier tour), le match retour s’est soldé par un nul. Au final il a gagné. Contrairement aux interrogations qu’on pouvait avoir sur son aptitude à exercer la fonction présidentielle le candidat socialiste a semblé être à niveau et les attaques contre lui n’ont pas porté. Au bout du compte, ce débat n’a pas permis à Nicolas Sarkozy de combler son retard dans les sondages.
(1) Jérôme Fourquet est directeur adjoint du département opinion et stratégie d’entreprise de l’Ifop