L’autonomie, c’est possible !
« Réactif et opportuniste »
Mais pour en arriver là, les exploitants ont adopté une conduite d’exploitation exigeante où la réactivité et l’expérimentation sont les maîtres mots. « Pas de ligne de conduite figée, mais savoir être opportuniste selon les conditions agronomiques du moment en cherchant toujours le meilleur raisonnement économique », expose Joffrey. Dans une filière bio où le prix de l’aliment complet peut atteindre 850 €/tonne, la recherche d’autonomie alimentaire est un impératif. Au Gaec de Vauzelle, priorité est donnée à l’autonomie fourragère alors qu'« il n'est pas question d’acheter de foin bio trop cher » font remarquer les exploitants. Autonomes en herbe, les Beaudot le sont également à 60 voire 80 % pour les protéines.
Souplesse de l’enrubannage
Premier impératif de cette quête d’autonomie, les associés prennent toutes les précautions possibles pour récolter le meilleur fourrage. Ils se fient aux sommes de températures pour faucher au stade de récolte optimal. Pour plus de réactivité et de souplesse et ainsi optimiser la qualité du fourrage, le Gaec récolte beaucoup en enrubannage, ce qui permet d’être en mesure d’intervenir de fin avril - pour une première coupe - jusqu’en automne en profitant des regains éventuels, comme en 2016, ou de cultures nouvelles.
Maïs, méteil, dérobées…
Car pour parfaire leur autonomie, les associés emblavent 55 hectares de cultures en rotation avec de la prairie temporaire. Depuis trois ans, ils implantent 11 hectares de maïs ensilage. Tout à fait possible en bio, ce fourrage productif est apporté à tous les bovins à l’engraissement, la base de la ration demeurant l’herbe, précise toutefois Joffrey. Outre 13 hectares de blé et 7 de triticale, le Gaec cultive aussi 19 hectares d’un mélange d’avoine, de pois et de triticale. Donnant de meilleurs rendements, moins sensible aux maladies et garantissant un meilleur équilibre de ration, ce méteil peut même être récolté en enrubannage au printemps, laissant la possibilité de faire suivre le maïs en dérobée, explique le jeune agriculteur qui a opté pour cet itinéraire en 2016.
Dans le même ordre d’idée, Joffrey a implanté une prairie temporaire en dérobée d’été (trèfle d’Alexandrie, trèfle incarnat) pour une première coupe en automne.
Après le maïs, suivi des céréales en pur puis du méteil, la rotation s’achève par des céréales rustiques comme l’épeautre, l’avoine ou le seigle, elles-mêmes suivies du retour de la prairie. L’épeautre est distribué aux veaux la deuxième année pour favoriser leur rumination, indique l’éleveur.
Le surplus de céréales produites sur l’exploitation est vendu. Le blé bio est bien payé, malgré un rendement moitié moins élevé qu’en conventionnel. Mais la vente de céréales n’est pas la priorité de l’exploitation. La finalité du système demeurant l’autonomie protéique.
Analyses et pesées systématiques
« Produire des animaux sans trop de tourteau, c’est possible ! », résume Joffrey. L’exploitation engraisse ses femelles et des bœufs de trente mois tout en commercialisant aussi des agneaux d’herbe. La qualité des fourrages et le méteil contribuent à se dispenser des achats de tourteaux. « Tout dépend de l’analyse », explique le jeune éleveur. Les fourrages sont en effet systématiquement analysés début décembre. L’apport ou non de céréales ou de tourteau est donc décidé selon les valeurs du maïs et des fourrages analysés. « A 900 €/tonne le prix du tourteau bio, on en prend soin ! », fait remarquer Joffrey qui veille constamment à « ne pas donner plus cher en aliment que ce que cela rapporte en kilos de viande derrière ». Ainsi pèse-t-il tout ce qu’il distribue à ses animaux. La saison passée, le Gaec de Vauzelle a acheté seulement une quinzaine de tonnes d’un mélange à 30 % de protéine. Un produit réservé aux animaux à l’engraissement, précise les Beaudot. Dans cette quête d’autonomie, le Gaec teste le pâturage tournant pour la finition des bœufs.
Régime bio mais carcasses lourdes !
Vaches allaitantes, laitonnes et génisses reçoivent du foin à volonté. Le meilleur foin est réservé aux femelles avant vêlage. Les broutards sont nourris avec de l’ensilage de maïs ainsi que du ray gras riche en trèfle de première coupe. La proportion et la complémentation varient selon la valeur du fourrage et selon l’état des stocks, précise Joffrey. Pour leur premier et second hivernage, les bœufs reçoivent la même ration que les broutards, mais sans complément. Vendus à plus de 30 mois d’âge après une finition de plus de six mois à l’herbe et aux céréales (1 tonne environ), ils atteignent un poids de carcasse d’environ 500 kg pour un classement"U" voire "E", détaille Joffrey. Les génisses atteignent quant à elles un poids de carcasse moyen de 400 kg et les vaches 460 kg.
Cultures
Semences fermières incontournables
Comme toutes les matières premières bio, les semences certifiées bio coûtent cher. Aussi, le Gaec de Vauzelle utilise-t-il un maximum de semences fermières. D’autant que les variétés dont ils auraient besoin ne sont pas forcément disponibles sur le marché. En blé, la famille Beaudot privilégie les variétés les plus riches en protéines, tel "Luculus" qui leur a donné 15,6 points de protéine en 2016, indique Joffrey. Le Gaec choisit des triticales « qui se battent bien » et des avoines « donnant du rendement ». En pois, les associés optent pour la référence en bio : "Assas", une variété très peu sensible aux maladies. Leur choix de maïs privilégie les semences les moins chères.
« Soigner les conditions d’implantation »
Tenus de conduire leurs cultures sans engrais ni produit phytosanitaire, les membres du Gaec de Vauzelle soignent les conditions d’implantation ; « une phase où tout se joue », indique Joffrey. Car il faut en effet que la culture prenne un temps d’avance sur la concurrence (adventices, ravageurs….). L’agriculteur confie, par exemple, faire très attention au tassement du sol. Passages de décompacteur, adaptation de la pression des pneus… font partie des précautions prises. Le Gaec fait réaliser régulièrement des profils de sol afin de déceler la moindre anomalie au niveau des systèmes racinaires, de la micro faune… Les associés n’hésitent pas non plus à implanter des Cipan (cultures intermédiaires pièges à nitrates). Ces cultures introduites juste après les moissons et détruites au labour, « ne coûtent pas cher ; elles ont un bon pouvoir germinatif et cela produit de la biomasse », argumente Joffrey qui sème ainsi de la moutarde.
Formation
« Je vise l’autonomie alimentaire en élevage bio »
Le 26 octobre, le Gaec de Vauzelle recevait un groupe d’agriculteurs dans le cadre d’une formation animée par la chambre d’agriculture de Saône-et-Loire. D’autres sessions seront organisées.
Renseignements auprès de Sarah Besombes, chambre d’agriculture (tél. : 06.75.35.21.15 ou 03.85.24.27.83 ; courriel : sarah.besombes@yahoo.fr). Et sur le blog de l’équipe bio de la chambre d'Agriculture de Saône-et-Loire : www.infobio.sl.chambagri.fr ; BIO@CA71.