L'élevage à l'épreuve de la rigueur
assemblée générale à Pouilly-en-Auxois. Face aux attaques qui visent la
consommation de viande bovine en particulier et à la nécessité de
soutenir activement la production et l'élevage, l'interprofession
maintient plus que jamais le cap de la communication vers le grand
public.
A l'assaut du marché de la restauration collective
Autre forte préoccupation du national : la restauration collective, " secteur hautement stratégique à conquérir, alors que l'essentiel des achats de viande des établissements d'enseignement notamment, se concentrent sur des importations en provenance de pays de l'Union européenne ". La marge de progrès est réelle, mais il y a loin de l'ambition commerciale à la contractualisation. Se positionner face à des importations de la CEE n'est pas chose aisée en terme de discours. " C'est un vrai travail de terrain et de lobbying " explique Jean-Luc Bouton, " qui nécessite de communiquer sur la qualité et l'ancrage territorial, mais on bute toujours sur la logique prix ". Yannick Villain, représentant le Comité de coordination des collectivités de Bourgogne Franche-Comté, insiste cependant sur le fait que " les mentalités changent et l'affichage viande bovine française est de plus en plus présent. Le travail s'organise également sur les appels d'offres pour les faire évoluer et les adapter aux produits disponibles et à la réalité du marché ". Reste que pour éviter le ciseau des prix il va falloir tout particulièrement travailler le discours en l'enrichissant de références à la qualité, la proximité, l'économie des territoires...
Le comité export s'investit dans la durée
Concernant l'actualité, Jean-Pierre Fleury, président d'Interbev Bourgogne a confirmé la mise en place officielle du comité export des filières agricoles et agroalimentaires le 17 février à Paris. Une comité qui rassemble toutes les compétences des différents ministères concernés et dont la première réunion a été consacrée à la filière "bovins viande". Objectif de la démarche, cibler les marchés et "s'investir sur le long terme plutôt que se disperser sur des "coups" ponctuels" et donc construire des partenariats dans la durée". Pilotée par le ministère de l'Agriculture, cette nouvelle instance associe les professionnels de la filière bovine pour aborder toutes les difficultés qui pénalisent l'export (aspects sanitaires et douaniers en particulier). Les destinations visées par les efforts à l'export et l'adaptation de l'offre à la demande sont le pourtour méditerranéen et, notamment, l'Algérie, le Maroc, la Turquie et la Tunisie. D'autres marchés seront explorés comme la Chine, Singapour ou la Malaisie, pays où la consommation de viande bovine se développe. En fonction des pays et des contextes spécifiques, l'offre française pourrait dépasser le seul produit viande pour se situer à un niveau d'ingénierie et de transfert de compétence en termes de pratiques d'élevage et/ou d'équipements, complète Emmanuel Bernard, vice-président d'Interbev Bourgogne. Autre actualité, la loi d'avenir, actuellement en discussion, qui pourrait, constate Jean-Pierre Fleury, " bouleverser en profondeur l'interprofession, notamment dans la représentation des familles ". Le dossier équarrissage a " heureusement trouvé sa conclusion ", mais un nouveau dossier s'ouvre au plan national, celui de la qualité. " Le niveau qualitatif de la viande baisse, alors que l'amélioration de la qualité représente un enjeu commercial majeur, compte-tenu du prix du produit pour le consommateur ".
Dossier énergie : opportunité ou risque pour l'élevage ?
Le dossier Energie (maîtrise et production) bouleverse le cadre d'action traditionnel des exploitations. Beaucoup y voient une nouvelle opportunité d'asseoir la compétitivité des entreprises agricoles, mais les représentants professionnels, comme Jean-Pierre Fleury ou Emmanuel Bernard, alertent sur les risques " d'un assèchement du cheptel " en fonction de la voie de développement technique qui sera privilégiée. Invité par Interbev Bourgogne à intervenir en marge de l'assemblée générale, Alain Hartmann, de l'Inra Dijon, a présenté le travail de thèse de Ariane Payne sur l'analyse des réservoirs environnementaux potentiels dans l'expression de la tuberculose bovine. Une étude destinée à mieux connaître les schémas de contamination, au financement de laquelle Interbev Bourgogne a participé. Une contribution essentielle à la lutte contre le Mycobacterium Bovis, mais la France reste bien seule, comme le remarque Jean-Pierre Fleury, à supporter le poids financier et la responsabilité de la lutte au plan européen. " L'Europe commence à être sensibilisée et à s'intéresser à notre travail, mais les fonds ne suivent pas " déplore le président d'Interbev Bourgogne.
Tuberculose bovine : le dangereux partage des lieux de vie
Alors que la faune sauvage est considérée comme un réservoir majeure de la maladie, le rôle de la micro-faune du sol est encore mal compris. La thèse conduite à l'Inra Dijon s'est donnée pour objectif de comprendre le rôle de la micro-faune du sol comme réservoir potentiel pour Mycobacterium bovis. L'analyse des réservoirs environnementaux a concerné le sol, l'eau douce, la faune du sol (nématodes, lombrics), la faune aquatique... Autant d'éléments à prendre en compte pour mieux connaître le schéma de contamination. Avec le recul, les scientifiques se sont aperçus que la localisation des foyers de Côte d'Or n'a rien d'aléatoire, mais révèle à chaque fois une problématique de sol spécifique et un contexte morpho-géologique particulier. La circulation des animaux favorise ainsi une rétro-contamination des bovins et de la faune sauvage. Blaireaux et sangliers sensibles au même agent infectieux, sont identifiés comme des vecteurs potentiels. Mais les blaireaux du fait de leurs nombreuses excrétions (déjections buccales, annales, etc.) ont une plus grande capacité à propager le virus dans l'environnement. Dans ce contexte particulier le sanglier est plutôt considéré comme "un cul de sac" pour le virus. L'environnement est-il un réservoir et/ou un vecteur ? La question n'est pas définitivement tranchée, mais le travail sur le sol et sous le sol, l'analyse des nématodes, des lombrics, les études en laboratoires et les nombreux prélèvements sur le terrain, traduisent "la présence de signaux faibles" sans donner de réelle confirmation. 300 échantillons sur les "points noirs" du département ont été prélevés et analysés dans les sédiments, les eaux, les latrines, les blaireaux et la micro-faune en 2013. En 2014, les prélèvements et les analyses continuent pour les cours d'eau et les nématodes, complétés par un "suivi temporel" de certaines pâtures. Ce qui est confirmé : "c'est un croisement entre les lieux de vie des bovins et les lieux de vie des blaireaux et des sangliers". Ces premiers résultats, du fait de la physiologie des blaireaux, ne sont pas vraiment rassurants. Mais les Anglais, qui ont été avant nous confrontés à l'impossibilité de l'éradication de l'espèce, avancent sur la piste de l'élaboration d'un vaccin oral pour traiter ces populations à haut risque, si difficiles à contenir.