Section bovine
L’élevage à la croisée des chemins…
Le 15 mai dernier, la section bovine de la FDSEA tenait son assemblée générale à Ecuisses. Grâce à la présence de Jean-Pierre Fleury, venu représenter l’interprofession et la FNB, la réunion a donné lieu à un examen approfondi de la situation économique de l’élevage allaitant dans le contexte national, européen et mondial.
Les éleveurs de vaches à viande sont aujourd’hui face à une situation inédite. Un vent de décapitalisation vient de frapper toute l’Europe avec des déficits de l’ordre de – 13 % dans toutes les catégories d’animaux. On observe des baisses d’environ – 14 % de l’abattage et jusqu’à – 25 % en présence d’animaux ! La Saône-et-Loire vient de perdre 10.000 vaches allaitantes, la France en a perdu près de 200.000 ! Pour le représentant de la FNB, Jean-Pierre Fleury, ce sont là de très gros chiffres consécutifs aux graves difficultés économiques et climatiques dont ont souffert les éleveurs ces dernières années. « Faute d’avoir été entendus par les pouvoirs publics, ces derniers ont été contraints de vendre une partie de leur potentiel de production pour rembourser les dettes aux banques…. ». Un geste de quasi désespoir qui risque d’impacter durablement le potentiel de production. Car s’il est « facile » de vendre ses bêtes, la recapitalisation d’un cheptel est beaucoup plus difficile et longue.
Manque de viande
Cette situation de crise engendre aujourd’hui un véritable manque de disponibilité en viande. Si cette “pénurie” est un bon point pour les prix, en revanche elle est inquiétante pour le potentiel de production du pays. D’autant que cela intervient à un moment où la demande mondiale est en hausse. Une hausse qui provient d’Amérique du sud, dont les ambitions exportatrices se sont effondrées, mais aussi des marchés du sud-est asiatique en pleine expansion.
Cette situation du marché mondial de la viande a eu un effet bénéfique sur les cours. Mais si le prix des animaux a bel et bien augmenté en ferme, l’envolée des charges a, pour partie, “mangé” cette embellie. « Les coûts de production sont en train de revenir au niveau historique de 2008 (+14 % en un an) », confiait Jean-Pierre Fleury. Et l’on prédit que cette hausse va s’accentuer encore sur 2012 !
Nouveaux marchés à saisir
Dans le même temps, le marché national et européen sature. Une baisse de consommation de – 2 % est encore attendue pour 2012. C’est cette dernière tendance qui pousse à exporter des bovins hors communauté européenne. C’est ce que doit faire aujourd’hui la France, le numéro un en cheptel de souche, production d’animaux finis et export en vif. « Si on veut maintenir notre place, il faut trouver de nouveaux marchés (pays tiers). Mais ce sont des marchés compliqués, qu’il faut construire », confiait Jean-Pierre Fleury.
C’est dans cette optique que la FNB a souhaité initier un groupement export national au niveau de l’interprofession (GEF). La structure repose sur une cellule interministérielle impliquant quatre ministères. De précieux soutiens pour faire face aux problèmes sanitaires et politiques inhérents à l’export. « Le travail du GEF est d’aller discuter sur place, d’amener les marchés. Après, ce sont aux opérateurs de la filière de réaliser ces marchés », rappelait Jean-Pierre Fleury. « Face à une demande mondiale en pleine croissance, nous devons miser sur l’export. Mais encore faut-il que nous ayons assez de production ? » s’inquiétait Jean-Pierre Fleury.
Se protéger de la volatilité
Autre sujet qui mobilise beaucoup la FNB : l’extrême volatilité qui s’est emparée du prix des matières premières depuis 2008. C’est elle qui est responsable des hausses de charges qui frappent les exploitations en ce moment. Cette instabilité rend très difficile la gestion d’une exploitation sur le long terme avec des revenus qui flirtent souvent avec le zéro. Et pour la FNB, les exploitations sont arrivées au bout de ce qu’elles pouvaient faire en terme de gain de productivité (+ 30 % ces dernières années). La profession est un peu au pied du mur. « La situation est en train de changer. On ne sera plus protégé comme avant », estimait Christian Bajard, le président de la section bovine. Une réalité qui milite pour un système de sécurisation du revenu en prenant bien en compte les coûts de production : en un mot la contractualisation.
Un contrat type
Cette nouvelle approche de la commercialisation des animaux fait débat. Jusqu’alors, les animaux étaient payés suivant un système de cotation traditionnel ne prenant pas officiellement en compte les coûts de production. Partant du constat que les éleveurs restaient attachés à une forme de liberté, la FNB a choisi de rénover les cotations pour les rendre plus opérationnelles. Dans un deuxième temps, la profession entend tenter d’aller plus loin en proposant une contractualisation au moins des jeunes bovins. Un « contrat type » vient ainsi d’être élaboré. Il comporterait deux indicateurs obligatoires : « le prix du jeune bovin du moment » et le « coût de revient du JB », lequel intègrerait l’alimentation, les bâtiments, la rémunération de l’éleveur, etc… « Pour l’instant, seul le SNIV (dont l’incontournable Bigard) ne l’a pas signé », indiquait Jean-Pierre Fleury. Autre bémol, la grande distribution qui pour l’instant « ne veut pas discuter ; le système cotations leur allant finalement bien », rapportait le représentant de la FNB.
L’élevage en position de force
Pour la section bovine de Saône-et-Loire, « essayer de contractualiser une partie de la production d’une exploitation peut permettre de sécuriser son revenu », argumentait Christian Bajard. « Cela peut commencer par le JB et peut s’étendre à terme aux femelles voire au maigre ». Avec son secrétaire général Michel Joly, le président de la section bovine estimait également que le manque de disponibilité du marché incitant aujourd’hui les acheteurs à sécuriser leur approvisionnement en viande, constituait une occasion à saisir. « Je pense que vis-à-vis de la grande distribution, on ne passera pas d’un prix cotation à un prix contractualisé du jour au lendemain. Il faudra gravir des étapes. Ceci dit, les enseignes vont effectivement s’inquiéter de leur approvisionnement. D’ores et déjà, certaines accordent une plus-value en échange d’un cahier des charges », indiquait François Chaintron, directeur de Charolais Horizon. Ce dernier ne cachait toutefois pas que de son point de vue, un effort collectif d’organisation de la production était aussi nécessaire.
Pour la FNB comme pour la section bovine, la contractualisation est un outil qui est à la disposition des éleveurs et toutes deux sont convaincues de son efficacité économique. « Mais dans un monde de volatilité, on ne pourra pas empêcher que certains se mettent en opportunité… », avouait Jean-Pierre Fleury. A l’heure d’une nouvelle flambée des matières premières, et après une sinistre vague de décapitalisation, les éleveurs allaitants ne vont-ils pas être contraints de réfléchir à de nouvelles stratégies commerciales ? C’est un peu ce qui se dégageait de cette assemblée particulièrement instructive.
Saône-et-Loire Déficit de production attendu pour cette année
La Saône-et-Loire a perdu le quart de ses exploitations allaitantes en dix ans. Il en reste 3.800 aujourd’hui. Cette érosion s’est accompagnée d’une forte hausse de productivité. Entre 2000 et 2007, le département a perdu 10.000 naissances pour un total actuel d’un peu plus de 120.000 veaux. Dans une production à 70 % maigre, on constate un avancement des dates de vêlage et un rajeunissement des sorties de mâles. La génétique ayant permis de produire des jeunes aussi lourds mais plus jeunes. 2011 aura été marquée par une augmentation des commercialisations de mâles et de femelles. La sécheresse et la reprise des cours en fin d’année expliquent ce mouvement. Conséquence de cette décapitalisation : cette année, il manque environ 10.000 vaches allaitantes par rapport à 2011. Il devrait en résulter un déficit de production en fin d’année. Autre constat : au regard de ces dernières années, on assiste à une baisse d’efficacité économique des exploitations, fait remarquer Thierry Lahémade de la chambre d’agriculture. Pour ce dernier, le produit bovin à l’UGB ne pourra guère être augmenté à travers les performances. Conclusion : c’est sur le prix des bovins qu’il faut travailler.
PAC Ce qui se dessine…
A propos de la Pac, Jean-Pierre Fleury a confirmé l’abandon de tous les droits historiques. La convergence des DPU sera une bonne nouvelle pour la Saône-et-Loire où l’engraissement est peu présent, indiquait le responsable. La PMTVA ne sera plus à l’exploitation. Une nouvelle référence de vache sera définie en France. La FNB s’est donné pour objectif de sauver les 200 €. Elle espère même faire primer davantage d’animaux (4.200.000 au lieu de 3.700.000 aujourd’hui). Le nouveau DPU devrait être de 230 à 260 €. Une nouvelle aide verte sera créée (30 % de la valeur du DPU). Elle privilégiera la diversité, le maintien des prairies permanentes et 7 % d’éléments topographiques. Pour les prairies, poussée par la Saône-et-Loire, la FNB défend l’autonomie des exploitations en demandant la possibilité de retourner 30 % des surfaces en herbe. De nouveaux outils de gestion des crises sont prévus. Quant aux aléas climatiques et sanitaires, à défaut de pouvoir compter sur des aides de l’Etat, la profession devra imaginer son propre système. La FNB a également émis plusieurs amendements sur le droit à la concurrence.
Manque de viande
Cette situation de crise engendre aujourd’hui un véritable manque de disponibilité en viande. Si cette “pénurie” est un bon point pour les prix, en revanche elle est inquiétante pour le potentiel de production du pays. D’autant que cela intervient à un moment où la demande mondiale est en hausse. Une hausse qui provient d’Amérique du sud, dont les ambitions exportatrices se sont effondrées, mais aussi des marchés du sud-est asiatique en pleine expansion.
Cette situation du marché mondial de la viande a eu un effet bénéfique sur les cours. Mais si le prix des animaux a bel et bien augmenté en ferme, l’envolée des charges a, pour partie, “mangé” cette embellie. « Les coûts de production sont en train de revenir au niveau historique de 2008 (+14 % en un an) », confiait Jean-Pierre Fleury. Et l’on prédit que cette hausse va s’accentuer encore sur 2012 !
Nouveaux marchés à saisir
Dans le même temps, le marché national et européen sature. Une baisse de consommation de – 2 % est encore attendue pour 2012. C’est cette dernière tendance qui pousse à exporter des bovins hors communauté européenne. C’est ce que doit faire aujourd’hui la France, le numéro un en cheptel de souche, production d’animaux finis et export en vif. « Si on veut maintenir notre place, il faut trouver de nouveaux marchés (pays tiers). Mais ce sont des marchés compliqués, qu’il faut construire », confiait Jean-Pierre Fleury.
C’est dans cette optique que la FNB a souhaité initier un groupement export national au niveau de l’interprofession (GEF). La structure repose sur une cellule interministérielle impliquant quatre ministères. De précieux soutiens pour faire face aux problèmes sanitaires et politiques inhérents à l’export. « Le travail du GEF est d’aller discuter sur place, d’amener les marchés. Après, ce sont aux opérateurs de la filière de réaliser ces marchés », rappelait Jean-Pierre Fleury. « Face à une demande mondiale en pleine croissance, nous devons miser sur l’export. Mais encore faut-il que nous ayons assez de production ? » s’inquiétait Jean-Pierre Fleury.
Se protéger de la volatilité
Autre sujet qui mobilise beaucoup la FNB : l’extrême volatilité qui s’est emparée du prix des matières premières depuis 2008. C’est elle qui est responsable des hausses de charges qui frappent les exploitations en ce moment. Cette instabilité rend très difficile la gestion d’une exploitation sur le long terme avec des revenus qui flirtent souvent avec le zéro. Et pour la FNB, les exploitations sont arrivées au bout de ce qu’elles pouvaient faire en terme de gain de productivité (+ 30 % ces dernières années). La profession est un peu au pied du mur. « La situation est en train de changer. On ne sera plus protégé comme avant », estimait Christian Bajard, le président de la section bovine. Une réalité qui milite pour un système de sécurisation du revenu en prenant bien en compte les coûts de production : en un mot la contractualisation.
Un contrat type
Cette nouvelle approche de la commercialisation des animaux fait débat. Jusqu’alors, les animaux étaient payés suivant un système de cotation traditionnel ne prenant pas officiellement en compte les coûts de production. Partant du constat que les éleveurs restaient attachés à une forme de liberté, la FNB a choisi de rénover les cotations pour les rendre plus opérationnelles. Dans un deuxième temps, la profession entend tenter d’aller plus loin en proposant une contractualisation au moins des jeunes bovins. Un « contrat type » vient ainsi d’être élaboré. Il comporterait deux indicateurs obligatoires : « le prix du jeune bovin du moment » et le « coût de revient du JB », lequel intègrerait l’alimentation, les bâtiments, la rémunération de l’éleveur, etc… « Pour l’instant, seul le SNIV (dont l’incontournable Bigard) ne l’a pas signé », indiquait Jean-Pierre Fleury. Autre bémol, la grande distribution qui pour l’instant « ne veut pas discuter ; le système cotations leur allant finalement bien », rapportait le représentant de la FNB.
L’élevage en position de force
Pour la section bovine de Saône-et-Loire, « essayer de contractualiser une partie de la production d’une exploitation peut permettre de sécuriser son revenu », argumentait Christian Bajard. « Cela peut commencer par le JB et peut s’étendre à terme aux femelles voire au maigre ». Avec son secrétaire général Michel Joly, le président de la section bovine estimait également que le manque de disponibilité du marché incitant aujourd’hui les acheteurs à sécuriser leur approvisionnement en viande, constituait une occasion à saisir. « Je pense que vis-à-vis de la grande distribution, on ne passera pas d’un prix cotation à un prix contractualisé du jour au lendemain. Il faudra gravir des étapes. Ceci dit, les enseignes vont effectivement s’inquiéter de leur approvisionnement. D’ores et déjà, certaines accordent une plus-value en échange d’un cahier des charges », indiquait François Chaintron, directeur de Charolais Horizon. Ce dernier ne cachait toutefois pas que de son point de vue, un effort collectif d’organisation de la production était aussi nécessaire.
Pour la FNB comme pour la section bovine, la contractualisation est un outil qui est à la disposition des éleveurs et toutes deux sont convaincues de son efficacité économique. « Mais dans un monde de volatilité, on ne pourra pas empêcher que certains se mettent en opportunité… », avouait Jean-Pierre Fleury. A l’heure d’une nouvelle flambée des matières premières, et après une sinistre vague de décapitalisation, les éleveurs allaitants ne vont-ils pas être contraints de réfléchir à de nouvelles stratégies commerciales ? C’est un peu ce qui se dégageait de cette assemblée particulièrement instructive.
Saône-et-Loire Déficit de production attendu pour cette année
La Saône-et-Loire a perdu le quart de ses exploitations allaitantes en dix ans. Il en reste 3.800 aujourd’hui. Cette érosion s’est accompagnée d’une forte hausse de productivité. Entre 2000 et 2007, le département a perdu 10.000 naissances pour un total actuel d’un peu plus de 120.000 veaux. Dans une production à 70 % maigre, on constate un avancement des dates de vêlage et un rajeunissement des sorties de mâles. La génétique ayant permis de produire des jeunes aussi lourds mais plus jeunes. 2011 aura été marquée par une augmentation des commercialisations de mâles et de femelles. La sécheresse et la reprise des cours en fin d’année expliquent ce mouvement. Conséquence de cette décapitalisation : cette année, il manque environ 10.000 vaches allaitantes par rapport à 2011. Il devrait en résulter un déficit de production en fin d’année. Autre constat : au regard de ces dernières années, on assiste à une baisse d’efficacité économique des exploitations, fait remarquer Thierry Lahémade de la chambre d’agriculture. Pour ce dernier, le produit bovin à l’UGB ne pourra guère être augmenté à travers les performances. Conclusion : c’est sur le prix des bovins qu’il faut travailler.
PAC Ce qui se dessine…
A propos de la Pac, Jean-Pierre Fleury a confirmé l’abandon de tous les droits historiques. La convergence des DPU sera une bonne nouvelle pour la Saône-et-Loire où l’engraissement est peu présent, indiquait le responsable. La PMTVA ne sera plus à l’exploitation. Une nouvelle référence de vache sera définie en France. La FNB s’est donné pour objectif de sauver les 200 €. Elle espère même faire primer davantage d’animaux (4.200.000 au lieu de 3.700.000 aujourd’hui). Le nouveau DPU devrait être de 230 à 260 €. Une nouvelle aide verte sera créée (30 % de la valeur du DPU). Elle privilégiera la diversité, le maintien des prairies permanentes et 7 % d’éléments topographiques. Pour les prairies, poussée par la Saône-et-Loire, la FNB défend l’autonomie des exploitations en demandant la possibilité de retourner 30 % des surfaces en herbe. De nouveaux outils de gestion des crises sont prévus. Quant aux aléas climatiques et sanitaires, à défaut de pouvoir compter sur des aides de l’Etat, la profession devra imaginer son propre système. La FNB a également émis plusieurs amendements sur le droit à la concurrence.