L’impatience gagne les agriculteurs
Pas moins de 65 départements ont été touchés le week-end de la Pentecôte par de violents orages qui ont détruit de très nombreuses cultures et parfois des exploitations entières. La FNSEA qui a mobilisé son réseau presse le ministre pour que le dossier de l’assurance récolte avance rapidement.

Après le gel, la sécheresse, voilà maintenant les orages avec des pluies et des vents violents et surtout la grêle qui « constitue une vraie catastrophe », s’est émue la présidente de la FNSEA Christiane Lambert. « C’est l’année des superlatifs : la plus chaude, la plus sèche et maintenant avec le plus de grêle », s’estimant « déconcertée » par « l’accumulation, la multiplication et même l’addition de ces événements climatiques ». Ce ne sont pas moins de 40 départements qui ont subi des violentes chutes de grêle parfois avec des grêlons dépassant la taille d’une balle de tennis. D’après le compte Twitter de l’agroclimatologue, Serge Zarka, notre pays a recensé plus de 1.500 chutes de grêle d’un diamètre supérieur à 2 cm dont 150 supérieurs à 5 cm. Peu de cultures peuvent résister à une telle agression comme a pu le constater le ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, Marc Fesneau. Il était en déplacement le lundi 6 juin à Saint-Quentin-de-Caplong (Gironde) puis à Castelnau d’Auzan (Gers) auprès des viticulteurs du sud-ouest. Il a pu observer personnellement les ceps mis à nus, les grappes et les feuilles à terre, et les ceps parfois brisés sous l’impact des grêlons. Dans un communiqué du 5 juin, la FNSEA rappelle que si de nombreuses cultures ont été touchées, les bâtiments ont également subis d’importants dommages. « Les premiers éléments montrent que les dégâts sont localement très importants avec des exploitations qui peuvent être touchées à 100 %. Alors que les cultures de céréales arrivaient à maturité, les pertes dues à la grêle seront considérables dans les exploitations frappées », indique le syndicat majoritaire.
« L’État doit accompagner les investissements »
Le ministre Marc Fesneau qui était accompagné dans le Gers de Jérôme Despey, secrétaire général de la FNSEA, a annoncé une série de dispositifs désormais traditionnels comme l’allègement des charges, la défiscalisation sur la taxe sur le foncier non bâti et le dispositif des calamités agricoles. Avec ses services, il regarde la manière dont les prêts garantis par l’État (PGE) pourraient être prolongés dans la durée. En effet, de nombreuses exploitations se trouvent déjà dans des situations financières délicates, ce qui leur interdit de prétendre à ces PGE, d’autant qu’ayant subi des intempéries, elles perdent d’importantes recettes. En tout état de cause, la FNSEA souhaite que le gouvernement intervienne rapidement pour « permettre aux agriculteurs de faire face, alors même que engagements de vente ont déjà pu intervenir ». « Il faut réformer notre système assurantiel. Les agriculteurs font évoluer leurs pratiques et tablent sur trois outils : assurance/adaptation des techniques culturales/irrigation. L’État doit accompagner les investissements », a rappelé Jérôme Despey. Surtout, elle presse les pouvoirs publics « de mesurer les impacts économiques de cet épisode » notamment pour avancer sur le dossier de l’assurance récolte dont la mise en œuvre doit intervenir le 1er janvier 2023. Avec une enveloppe d’environ 600 millions d’euros, les agriculteurs devraient pouvoir mieux s’assurer. En France, seul un tiers des céréaliers et viticulteurs et un dixième des arboriculteurs sont assurés. Car beaucoup, faute de trésorerie n’ont pas les moyens de le faire…
Christophe Soulard
Assurance récolte : rappel du futur mécanisme
D’après les premiers éléments mis sur la table pour la future assurance récolte qui entrera en vigueur le 1er janvier 2023, quand un agriculteur perdra moins de 20 % de sa récolte, il ne sera pas indemnisé. De 20 % à 50 %, l’assureur prendra en charge tous les dégâts. Au-delà, c’est l’État qui paiera. L’objectif est d’inciter les agriculteurs à s’assurer. « Le doublement du budget passant de 300 à 600 millions d’euros permettra à plus d’agriculteurs de s’assurer », a souligné Marc Fesneau lors de son déplacement en province le 6 juin.
Dévastateur aussi en Saône-et-Loire
Avec 2.379 impacts de foudre comptabilisés, la Saône-et-Loire est le troisième département le plus foudroyé pendant cet épisode climatique qui a traversé quasiment tout le pays. Sur Saint-Yan, dans l’extrême sud-ouest du département, il est tombé en 12 heures l’équivalent d’un mois de juin normal, soit 74 mm d’eau. À l’opposé au nord-est à Gergy, les cultures de maïs d’Hélène Doussot-Sassot ont en grande partie été détruites. Entre les deux, les différents secteurs, dont la vallée de la Grosne, déplorent eux aussi des dégâts…
Pour l’heure, les premières remontées du terrain font état de bâtiments d’élevage « transformés en passoire », de fourrage couché à quelques jours de la récolte, de cultures et de vignes fortement voire, très fortement endommagées. Conséquences malheureusement inévitables avec des grêlons de taille impressionnante qui se sont abattus en quelques minutes, accompagnés parfois de trombes d’eau et de vent.
Par exemple, sur les secteurs dépendants de la coopérative Bourgogne du Sud, 30 % des surfaces ont été impactées autour de Saint-Gengoux-le-National. Près de 1.600 hectares grêlés, selon un premier recensement rapide, sont estimés depuis Laives jusqu’à Crissey et Sassenay.
Sur le Verdunois, Gergy, Allerey, Damerey, Palleau, Écuelles présentent des parcelles sinistrées par la grêle « à hauteur de 30 à 80 % avec une estimation globale de 20 % des surfaces touchées ».
En Côte-d’Or, sur le secteur de Beaune / Seurre, « la récolte d’été est compromise de l’ordre de 20 à 50 %, et pouvant même atteindre 80 % sur certaines zones ».
En terme de conséquences, il est encore trop tôt pour se prononcer. Le foin couché va certes pouvoir être ramassé, mais va perdre en qualité. Le maïs dont seules les feuilles ont été impactées devrait poursuivre sa croissance sans trop de problème. Soja et tournesol sont, eux, beaucoup plus sensibles à ces épisodes violents. « Les orges qui étaient très belles et précoces sont plus sévèrement touchées », apprend-on de Bourgogne du Sud.
Enfin, il est aussi indéniable que cette eau a fait du bien à toutes les parcelles qui l’ont reçu sans grêlons puisque cet épisode climatique intervient alors que le département connait son premier arrêté préfectoral de l’année lié à la sécheresse (voir par ailleurs).
Premières mesures de restriction d’eau
Afin de faire le point sur la situation de la ressource en eau dans le département, le préfet de Saône-et-Loire a réuni le mercredi 1er juin le premier comité ressource en eau de la saison. Julien Charles a fixé des premières mesures de restriction des usages de l’eau.
La situation, déjà préoccupante depuis plusieurs semaines, s’est dégradée suite à l’absence de précipitations significatives et aux fortes chaleurs. Les débits des cours d’eau ont fortement baissé. La situation est similaire à celle d’un mois de juillet.
C’est pourquoi le préfet a décidé de prendre un premier arrêté sécheresse qui place :
• en alerte les secteurs Arconce et Sornin, Dheune, Grosne et Seille et Guyotte, avec des premières mesures de restriction visant à limiter la consommation d’eau ;
• en alerte renforcée le secteur Bourbince, avec des restrictions plus contraignantes ;
• en vigilance tout le reste du département.
Un renforcement voire une généralisation des mesures de restriction au cours des prochaines semaines sont possibles, suivant l’évolution de la situation hydrologique du département.
En alerte et en alerte renforcée, les usages de l’eau sont contraints : remplissage des piscines privées interdit sauf première mise en eau sous conditions, lavage des voitures interdit en dehors des stations professionnelles équipées d’un système de recyclage des eaux ou de matériel haute pression, arrosage des espaces verts interdit, irrigation agricole soumise à restrictions d’horaires, prélèvements pour les activités industrielles réduits...
Le préfet rappelle que l’économie d’eau doit être un souci quotidien pour l’ensemble des usagers du département. Chacun doit mettre en œuvre tout au long de l’année des mesures d’économie, par exemple limiter les arrosages des pelouses, le lavage des véhicules, privilégier les douches aux bains, remplir sa piscine avant l’été ou renoncer à la remplir, réparer les fuites d’eau même minimes… Les activités économiques doivent quant à elles s’adapter afin de réduire leurs prélèvements, pour anticiper l’intensification des sécheresses que le changement climatique génère.
PREFECTURE DE SAÔNE-ET-LOIRE