La capacité des fabricants d'alimentation animale à s’adapter aux marchés
Les fabricants d’aliments pour animaux savent répondre aux demandes sociétales en France comme en Belgique, en Italie ou en Espagne a montré l’AG de Nutrinoë, l’association des fabricants bretons.
Bien-être animal, élevage sans antibiotique, aliment non OGM, Bio, prix bas… : les demandes sociétales imposées aux élevages, et donc aux fournisseurs des aliments pour leurs animaux, sont multiples et elles émanent de plus d’une source, expliquaient les différents intervenants lors de l’AG de Nutrinoë (association des entreprises de la nutrition animale bretonne). « Les pouvoirs publics sont parfois considérés comme des ralentisseurs de la productivité des productions animales par exemple en matière d’environnement », constate ainsi Philippe de Guenin, DRAAF de Bretagne. « En même temps, cette réglementation contraignante a peut-être permis de sauver l’élevage en Bretagne », tempère-t-il. Pour le bien-être animal, il note même que ce n’est pas la réglementation qui impose une évolution des modes de production des œufs mais bien le marché qui veut des poules dehors car les cages sont autorisées par la loi. Les différents pays européens ne hiérarchisent pas les demandes de la même manière. Ainsi, « le principal fournisseur d’œufs espagnol vient tout juste d’annoncer qu’il va sortir ses poules des cages », explique Lucas Rodriguez Pico (Jefo Espagne). Cela alors que le marché français a désormais complètement basculé, tous les distributeurs et certaines chaines de distribution ayant égrainé leurs annonces depuis plus de deux ans. En Italie selon Roberto Bombardieri (consultant international), la tendance va plutôt aux poules au sol (50 % des pondeuses italiennes), cette fameuse classe 2 implantée aux Pays Bas et en Allemagne que les Français n’ont jamais adoptée. Veronesi, le leader italien de la nutrition animale a aussi lancé des élevages de lapins au sol.
Antibiotiques et bio, des sujets communs
La résistance aux antibiotiques est un autre des sujets partagés en Europe. Là encore, si le constat est identique, l’état d’avancement diffère. « En Espagne, la démédication fait l’actualité des fabricants », confirme Lucas Rodriguez Pico. En Italie, ou les vétérinaires sont toujours vendeurs d’antibiotiques, l’un des principaux distributeur, Coop, prend la question à bras le corps avec le soutien du ministère de l’Agriculture Maurizio Martina. Qui estime que : « l’amélioration du niveau de bien-être des animaux d’élevage permettra la réduction et, si possible l’élimination, des antibiotiques pour préserver la santé publique ». Selon Roberto Bombardieri, la consommation totale d’antibiotiques dans les élevages avicoles italiens, les principaux consommateurs en volume, a déjà été réduit de 40 % en 2015 par rapport à 2011, soit trois ans avant la date prévue dans le plan national. Du côté du Bio, la croissance est générale : depuis 8 ans, en Italie, l’élevage bovin bio a progressé de 9 % quand la volaille bio a doublé. Les œufs bio représentent 18 % des ventes d’œufs, le lait bio 2,8 %. « En Italie, on vend environ 150 000t/an d’aliments bio pour animaux. Il est 60 à 65 % plus cher que le conventionnel. Par exemple aujourd’hui, un aliment conventionnel pour vache laitière coute 320€/t contre 520 à 530€/t pour le même aliment bio », indique l’intervenant. L’Espagne affiche un peu plus de 33 000 t d’aliments bio pour animaux, en croissance de 45 % entre 2014 et 2015, pour la volaille et pour le lait.
Positions diverses sur les OGM
Pour le non OGM, les positions sont moins systématiques. En Espagne, c’est carrément un non sujet. Sur le marché italien les aliments pour animaux sans OGM sont principalement destinés à la volaille, aux filières de la Coop, à la production laitière de la région Alto Adige et aux élevages dont la viande vise l’exportation (notamment les marchés allemands). Les usines qui produisent des aliments non OGM sont généralement dédiées aux productions bio comme deux sites de Veronesi ou l’usine de Progeo, leader du Bio. La question principale n’est pas tant que les fabricants d’aliments pour animaux sachent fournir tous ces marchés, mais bien de la valorisation qu’ils en tirent. Comme le résume Eric Wallin directeur de la Scar, coopérative belge de 70 000 t qui joue à plein une stratégie de différenciation gagnante (+ 3,7 % de volume par an depuis 1996) : « Bio, filières sans OGM, à base d’herbe pour les bovins, bien-être animal, sans antibiotique, régional, en circuit court ou autres label particuliers nécessitent et valorisent des aliments pour animaux spécifiques et différenciés qui permettent d’être plus visibles sur le marché, de créer de la valeur ajoutée et de se libérer quelque peu de la simple loi de la concurrence. Mais pour créer de la valeur ajoutée, le concept ne doit être ni bricolé, ni improvisé et, surtout, il doit être valorisable jusqu’au consommateur et sa valeur doit être restituée à tous les maillons qui y contribuent ».