La Chine est éveillée
Avec une croissance de +15 % par an et l’émergence d’une classe moyenne,
l’opportunité ne doit pas être manquée. Mais à la condition de ne pas
faire n’importe quoi…
Superlatifs
Présenter la Chine et le marché chinois, c’est avant tout parler par superlatifs. Ainsi, la Chine connaît chaque année une croissance de à deux chiffres ; en 2010, elle est devenue la deuxième puissance mondiale derrière les Etats-Unis ; elle compte plus de 25 millions étudiants, de futurs consommateurs avertis et au pouvoir d’achat conséquent ; les fondamentaux économiques sont tous meilleurs qu’ailleurs et les salaires progressent de +19 % par an entraînant l’émergence de la classe moyenne, celle-là même qui consomme nos vins ! Dans dix ans, tout laisse à penser, si cette croissance est maintenue, que la ville de Changaï assurera un PIB égal à celui du Royaume-Uni, de même pour Pékin et bien d’autres grandes mégapoles… dont Wuhan située au centre Chine et, surtout, ville jumelée avec la ville de Bordeaux.
Art de vivre à la française
« Ce jumelage permet des facilités et ouvre des portes. C’est la seule ville où les Français sont premiers dans tous les domaines », explique Philippe Autier, directeur de la mission économique UbiFrance. Avec ses 10 millions d’habitants - 30 millions dans son agglomération - Wuhan est de toute évidence une place de choix pour les produits français d’autant que le "Made in France" fait vendre. Les produits français incarnent un art de vivre et un gage d’authenticité et de fiabilité. Ils ont aussi quelques points faibles : perçus comme onéreux, ils sont confrontés à une concurrence forte notamment par les fast-food et les pizzeria, et surtout leur classification complexe n’est pas là pour faciliter leur perception.
Pas un marché mature
Et le vin ? Aujourd’hui, il représente seulement 5 % de la consommation globale d’alcool, mais - et ce n’est pas neutre - le gouvernement encourage sa consommation au motif qu’il est moins destructeur que la consommation d’alcool fort. Le vin - rouge surtout - a une image très positive car cette couleur est associée au bonheur, à la chance et la postérité et il est très prisé par les jeunes générations friands des modes de vie à la française. « C’est un marché en pleine évolution, mais ce n’est pas un marché mature », prévient encore Philippe Authier. Si la consommation de vin en Chine est un phénomène tout récent « mais qui va vite », beaucoup de chemin reste encore à faire. Notamment pour le faire apprécier car deux traditions perdurent dans le pays : le vin se boit comme un alcool "cul sec" et surtout les Chinois adorent acheter du vin pour… l’offrir. « Le packaging est ainsi essentiel. En Chine, l’emballage est plus important que le cadeau ».
Tout va très vite
Mais ce qui est vrai aujourd’hui ne le sera plus demain car tout va vite, très vite. « Les Chinois ont une capacité d’adaptation extraordinaire et, surtout, ils ont soif de connaissance. En matière de vin par exemple, il y a 4 ou 5 ans, ils étaient peu exigeants. En deux ans, ils ont appris ce que nous nous mettons dix ans à assimiler. Aujourd’hui, ils sont capables de déguster. Le marché du vin se professionnalise très vite. Des écoles de vins s’ouvrent un peu partout. Maintenant, lors de tous les achats, ils veulent voir et valider », remarque de son côté Marc Leconte, négociant bordelais. Et, de fait, d’immature, le marché est en train de devenir mature.
Désormais, la clé d’entrée n’est plus que le prix. Les Chinois commencent à savoir le type de vin qui leur convient. Ils cherchent des vins ronds et aromatiques… et rapidement consommables. Ils sont aussi très sensibles aux vins médaillés dans divers concours.
A chacun son positionnement
Ainsi donc, pour répondre à l’attente de ces nouveaux consommateurs, les viticulteurs doivent-ils désormais envisager « le marketing de la demande ». Mais surtout, il est essentiel de rechercher les bonnes stratégies pour se positionner… de manière rentable.
Pour cela, chaque viticulteur doit savoir ce qu’il veut faire. Beaucoup de choix sont possibles. Mais tous sont liés au choix du distributeur. Les stratégies sont différentes selon que l’on veut travailler avec un grossiste, une société d’État ou en direct. Tout dépendra de la taille de l’exploitation. Le choix du partenaire est fondamental. De 3 à 5 opérateurs majeurs, en moins de deux ans la Chine en compte désormais pas moins de 20.000 ! Il convient donc de ne pas se tromper.
La vigilance, la présence et la persévérance sont les clés de la réussite.
[WEB]Un concours sésame
La chambre d’agriculture de la Gironde et l’APPrA exportent le concours de Bordeaux Vins d’Aquitaine à Wuhan avec "Le festival des vins de Bordeaux et d’Aquitaine". Pour l’édition de novembre dernier, 180 producteurs - parmi tous les médaillés aux derniers concours - ont choisi de soumettre leur vin. Au programme de cet évènement "Made in China", la désignation par des professionnels du vin de 21 trophées Coup de cœur. Une dégustation de ces vins médaillés a été également proposée à 1.200 amateurs et consommateurs sélectionnés.[/WEB]
Le vin en Chine
La production de vin en Chine est en plein essor. En quelques années, avec une production de 10,2 millions d’hectolitres, ce pays est devenu le sixième producteur mondial. La production de vins chinois est dominée par les rouges. Le cabernet sauvignon représente à lui seul la moitié de l’encépagement local. Quatre producteurs réalisent près de 60 % des ventes en volumes. Les sociétés viticoles chinoises développent de gros efforts de communication pour attirer la classe moyenne vers la consommation de vin.
Le vin rouge est aujourd’hui très apprécié des jeunes générations. On estime à 8 millions le nombre consommateurs réguliers. Les tranches de prix connaissant les plus fortes hausses en volume se situent autour d’une moyenne entre 3 à 4 €. À ce jour, on assiste à un basculement de la demande vers les vins de meilleure qualité, voire de très bonne qualité.
Les importations chinoises de vins
Sur la période octobre 2010 et septembre 2011, les importations de vins ont augmenté de +80 % en valeur et +37 % en volume par rapport à 2009/2010. Depuis 2011, la Chine importe plus de vin que le Japon. Les importations de vins en bouteilles dominent le marché. En circuit court, le prix de départ chai est multiplié par 3,3 à 4. Par 6,5 à 8,5 en circuit long.
La France est leader et progresse plus vite que ses concurrents (+68 % en volume, +114 % en valeur). Son principal concurrent est l’Australie. Les importations vrac (1,4 million d’hectolitres en 2010/2011) sont également en hausse (+15 % en volume, +31 % en valeur) Les principaux concurrents sont le Chili, l’Espagne et l’Australie.
La prépondérance des CHR
Plus des deux tiers des vins consommés en Chine passent par le réseau des CHR. Et pour cause : un repas sur deux y est pris hors domicile. Les CHR sont donc les meilleurs alliés. Sans doute le circuit qui donne le plus de valeur ajoutée. C’est surtout un excellent réseau pour éduquer le consommateur. « Cela passe avant tout par l’éducation des serveurs. Il n’est pas inutile de leur apprendre à se servir d’un tire-bouchon ».
Le tiers restant des vins est commercialisé à par quasi égale dans les grandes surfaces et dans les magasins spécialisés. Le e-commerce se développe également très rapidement.
Comment choisir son importateur ?
Depuis 2011, fin du monopole d’État, les sociétés privées peuvent importer du vin en Chine à la condition qu’elles disposent d’une licence d’importation. Trois grandes sociétés dominent le marché : ASC Fine Wines, Summergate et Aussino International Food and Wine. Ces sociétés ont 800 à 1.000 références à leur catalogue et ne cherchent de nouveaux exportateurs qu’au compte-goutte. Il existe par ailleurs 15 à 20.000 importateurs pour la plupart des sociétés récentes. Il est fortement recommandé d’avoir un importateur par région (Pékin, Shanghai, Canton, Hong kong, Chengdu…). Il est préférable de ne pas accorder une exclusivité nationale. Les importateurs assurent les formalités, stockent en zone franche ou non, revendent à la distribution organisée, aux CHR…
Enfin, Ubifrance recommande d’être vigilant. Pour le paiement, trois moyens existent : le paiement d’avance, qui doit être préféré ; la lettre de crédit irrévocable ; la garantie de l’acheteur via Coface, Gipac…
Et les étiquettes ?
Bien communiquer et se protéger
Le consommateur chinois n’achète pas en fonction des lettres latines mentionnées sur nos étiquettes. Cependant, il est très sensible à l’habillage. Avec le prix, c’est l’un des éléments de choix. Il apprécie les dorures, les châteaux, les emblèmes…
Bien évidemment, la contre-étiquette en chinois est indispensable et obligatoire. Elle doit être très claire. Éviter les accords mets/vins, les conseils de dégustation trop précis. Il convient également de porter attention à la traduction en chinois. La traduction phonétique du nom de château n’est pas la meilleure solution. Il est préférable de trouver un nom court avec une symbolique en chinois.
Prévenir les contre-façons
En Chine, les contrefaçons d’étiquettes sont fréquentes. Il est donc essentiel avant de s’engager dans le marché chinois de penser à enregistrer votre marque en français et en chinois. Le producteur doit protéger sa marque lui-même. En France, le dépôt d’une marque coûte 235 € ; pour une extension vers la Chine, il faut ajouter 665 €.
En Chine, le dépôt se fait par le biais d’un agent de la propriété industrielle auprès du bureau des marques de l’Administration d’État de l’industrie et du commerce. Il faut alors compter entre 400 et 600 € pour un dépôt. Il faut déposer en caractère latin, ainsi que la marque en chinois et l’étiquette. Tout ce qui sera utilisé en Chine. Le délai de procédure est de 17 mois…
Ubifrance recommande de se couvrir au maximum et de ne pas oublier que l’enregistrement en France ne protège pas en Chine.
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Ubifrance Wuhan, Philippe Autier, tél. 86 (0) 27.6579.7940 ; courriel : philippe.autier@ubifrance.fr[/WEB]