La cuisine est une affaire de générosité
Il réinvente la cuisine de collectivité
Là ou d’autres auraient sans doute cédé à la routine d’un simple « cuisto de cantine », Philippe Dumoux a voulu conjurer le sort « en se donnant comme objectif de prouver qu’un cuisinier de collectivité est un véritable chef ». Un défi qui l’a conduit à participer à d’innombrables concours, tous destinés à promouvoir la cuisine de collectivité, jusqu’aux épreuves nationales. Depuis près de trente ans, Philippe Dumoux ne cesse de donner une autre image de son métier. Chaque jour, dans sa cuisine du foyer Besseige, le chef renouvelle ses menus, innove, invente… La tâche n’est pas aisée car comme nombre d’enfants, les jeunes pensionnaires préfèrent de loin engloutir des hamburgers… Et le cuisinier est aussi contraint par son budget : « c’est plus facile de faire à manger avec 50 euros qu’avec 4€50 pour deux repas ! », fait remarquer Philippe qui pour résumer sa tâche assure « qu’il faut être créatif ! ».
Ambassadeur des viandes charolaises
Cette volonté farouche de réhabiliter la cuisine de collectivité a valu à Philippe de se faire repérer par ses pairs. C’est ainsi que le chef Daniel Doucet de l’Hôtel de la Poste lui a demandé de participer à la foire de Charolles et à des concours de cuisine. Le cuisinier de Vaudebarrier s’est ainsi retrouvé aux fourneaux aux cotés de son illustre collègue pour diverses manifestations d’importance.
En 1996, Philippe Dumoux était intronisé par la Confrérie de l’Ambassade du Charolais. Le début de son engagement dans la promotion de la viande charolaise. Quelques années plus tard, tout en conservant son poste de chef au Foyer Besseige, il créait son autoentreprise de chef à domicile, de consultant et de formateur. Une manière de mieux assouvir sa passion pour la cuisine en devenant notamment consultant pour l’Institut Charolais et en donnant des cours de cuisine à la Maison du Charolais. C’est là que Philippe a fait la connaissance d’Yves Durand, acteur charismatique de la promotion et de l’innovation en viande charolaise. « C’est lui qui m’a mis le pied à l’étrier. Avec Yves, je me suis mis à enchainer salons, démonstrations, etc... », confie l’ambassadeur.
Autoentreprise
Parallèlement, Philippe Dumoux s’est mis à exercer l’activité de chef à domicile. Une prestation peu commune qui consiste à préparer un repas gastronomique chez l’habitant. Le chef fournit les plats qu’il précuit chez lui. Il fournit aussi la vaisselle et dresse la table. C’est une clientèle aisée qui recourt à ce type de service, reconnait Philippe. L’activité se développe avec le bouche à oreille. Elle permet à ce passionné de cuisine de se faire plaisir en donnant libre cours à son talent.
A force de passion de son métier, de générosité et de rencontres fructueuses, le « petit cuisinier de collectivité », comme il se qualifie lui-même, s’est fait un nom ! Il s’est même vu décerner les « palmes académiques » pour ses prouesses sur les concours de cuisiniers de collectivité. Philippe Dumoux fait aujourd’hui partie de la Confrérie des Saveurs du Pays Charolais et est devenu formateur au lycée agricole de Charolles… Tout récemment, il a même été nommé ambassadeur du Mouton Charollais. « Un beau challenge », commente le chef qui veut « faire tomber les préjugés sur la viande d’agneau ; une viande très fine qui diffère selon les terroirs », explique-t-il.
Rencontres extraordinaires !
En dépit des nombreuses sollicitations dont il fait l’objet, l’homme a su garder toute son humilité, bien conscient de l’ascension extraordinaire qui fut la sienne. Aussi, ce dont Philippe Dumoux est sans conteste le plus fier, c’est d’avoir pu faire quelques rencontres inespérées, telle celle de Christian Forais, chef pâtissier au Ritz et directeur de l’école du même nom pendant neuf ans. « Une personne exceptionnelle ! », commente-t-il avec admiration. Un chef de prestige dont Philippe est devenu l’ami et avec qui il partage « des valeurs, la passion du métier, l’envie de transmettre… ». Cette rencontre a valu au chef saône-et-loirien d’entrer à la prestigieuse « Académie Culinaire de France », sorte de légion d’honneur du métier ! Elle ne compte qu’un millier d’académiciens dans le monde et il faut être parrainé par deux de ses éminents membres pour en faire partie. Outre Christian Forais, Philippe Dumoux a comme second parrain Michel Rothe, « chef au Ritz et cuisinier le plus titré au monde ! », s’enthousiasme l’intéressé. Une promotion qui lui a valu d’autres rencontres prestigieuses (Bernard Vaussion, ancien chef de l’Elysée ; Pierre Grange, chef au Ministère de l’Agriculture ; Jérôme Gomez, actuel chef de l’Elysée…). Loin de se laisser griser par tant de belles rencontres, c’est le regard émerveillé que Philippe Dumoux a eu l’honneur de visiter les cuisines du Palais du Président de la République !
Faire plaisir aux gens
S’il reconnait qu’il n’a pas toujours été simple de se faire admettre en tant que cuisinier de collectivité, Philippe Dumoux s’est battu pour faire tomber les préjugés, convaincu que « d’où qu’on soit, pour peu que l’on travaille, on peut réussir et se faire respecter ». Outre « son amour du produit travaillé », le chef est aussi animé par le « plaisir de transmettre. Quand je vois des gens sourire lorsque que je leur fait à manger, c’est merveilleux ! », s’exclame simplement le chef. Amour du terroir, de la région charolaise ; plaisir des rencontres guidé par une curiosité naturelle : tels sont les moteurs de cet authentique humaniste. D’ailleurs, toujours prompt à se remettre en question, le chef parle d’un « métier de recherche permanente… ». La cuisine évolue : « on allège davantage les plats : on travaille plus les présentations, les garnitures… ». A propos de la viande charolaise, l’ambassadeur du terroir se dit convaincu d’avoir là « un très beau produit. Mais il faudrait mieux le valoriser ». Philippe Dumoux déplore le manque de lisibilité des trop nombreux signes de qualité instaurés par la filière. Il aimerait davantage d’osmose entre les différents acteurs pour que l’excellence soit portée « ensemble ». Ce consultant à l’Institut Charolais est aussi très attaché à la défense des bas morceaux. « J’adore cuire le paleron » avoue-t-il, « un morceau fondant, goûteux… ». Comme si l’excellence n’était pas forcément une question d’élitisme, mais plutôt de bon goût partagé, tout simplement… Une devise pour ce chef attachant.