La défense des vignerons se poursuivra
sur les défis qui attendent la profession : reprise du foncier, prix
des fermages, lutte contre les maladies du bois, assurance récolte,
installations, liberté de traiter, réseau humain de proximité… bref, la
défense syndicale de l’Homme se poursuit au plus près du terrain.
L’ancien et le nouveau président de l’Interprofession, Michel Baldassini et Claude Chevalier le savent mais « le drame est qu’on met 5 millions d’€ sur la recherche et c’est toujours la même impasse », « l’arsénite de soude était dangereux pour les utilisateurs. Mais, que dirait un cancéreux, si on lui supprimait aujourd’hui ses rayons X », illustrait le côte d’orien.[/WEB]
La profession s’impatiente donc et les opinions tendent vers les extrêmes. La flavescence dorée, et ses polémiques sur les traitements obligatoires, ne sont au final qu’un nouveau front, sur le même champs de bataille.
La lutte positive contre la flavescence
Sans se réjouir trop vite, le président de l’Union viticole félicitait en tout cas les vignerons pour leur mobilisation contre la flavescence dorée. Robert Martin voyait là, le fait que « le travail porte ses fruits » et a « contenu la maladie ».[WEB] Prospection, traitements et arrachage ont fait régresser la flavescence dorée en 2013. [/WEB]
Reste que le plan de lutte sera moins aisé à établir l’an prochain. Le président de la CAVB, Jean-Michel Aubinel le reconnaissait : [WEB]« l’aspect négatif a été la polémique autour de la réutilisation des produits insecticides ». Devant cette mauvaise image pour les vins de Bourgogne, [/WEB]
« en 2014, aucune précipitation, il faut prendre le temps du débat et écouter tout le monde, avec la photographie de la prospection afin d’ajuster un certain nombre de choses ». Robert Martin réagissait : « tout le monde a le droit d’exprimer ses idées auprès d’un préfet mais les deux tiers du vignoble français sont sous surveillance flavescence dorée et s’il y avait une solution miracle, ça se saurait », rappelait-il.
Le représentant du préfet, Alain Faure, faisait connaître que Fabien Sudry va organiser « en avril une réunion pour définir la stratégie de lutte 2014 ». Surtout, la préfecture « assumera sa position de responsable » notamment « sur le volet communication » et sur les insecticides obligatoires.
Les fermages s'enflamment
« Avoir le mal de Saint-Martin ». L’expression change de sens. Historiquement, le 11 novembre est la date des paiements des fermages, marquant le repos de la terre, fêté jusqu’à l’ivresse. Mais aujourd’hui, il s’agit d’un autre mal de tête. Vigneron à Bissy-la-Mâconnaise, Marc Sangoy constate qu’en matière de fermages, au statut protecteur, « les vignerons font monter les prix du foncier » en cas de vente. Les prix pratiqués sélectionnent désormais plus durement les acheteurs.
Avec des capitaux, des investisseurs –tels les négociants– s’engouffrent dans la brèche, comme dans le Beaujolais, le Couchois et au cœur des coopératives mâconnaises dernièrement. Robert Martin rappelait au passage que la Safer n’a pas de droit de préemption avec un fermier en place. « Arrêtons de mettre le feu aux prix, soyons prudents et raisonnables dans notre propre famille » professionnelle, invitait donc le président de l’Union viticole.
La Safer renforcée
La loi d’Avenir agricole en préparation contient plusieurs articles sur le foncier. Les coopératives devraient pouvoir acheter et porter du foncier en vue d’installer des jeunes. Le directeur de la Safer de Saône-et-Loire, Emmanuel Cordier rajoutait également que « la Safer va pouvoir appréhender des parts sociétaires » désormais. Idem, dans le cadre de démembrement de propriétés, le droit de préemption pourra s’appliquer sur les ventes en usufruits, sans intervenir lorsqu’il y a usage de la propriété ou un caractère familial mais bien dans le cas de la vente d’un tiers.
Le foncier pour installer ou capitaliser ?
Le président-délégué de la FDSEA de Saône-et-Loire, Bernard Lacour insistait pour rappeler que la Safer est un outil professionnel et « non spéculatif » pour « moraliser » le marché. La Saône-et-Loire est d’ailleurs le département qui a le plus orienté de foncier en direction de l’installation. 50 %. « C’est le choix politique ».
Les questions qui se posent avec « l’arrivée du négoce » ne sont pas récentes et « pas neutres » « par rapport à notre modèle et nos outils ». Et en même temps, « sur un certain nombres de dossiers, il n’y a pas de candidats » et « la Safer n’a pas vocation à stocker et être propriétaire. Notre rôle est d’accompagner, notamment les caves coopératives à maintenir leurs volumes ».
[WEB]Le président du BIVB préférait voir le verre à moitié plein : « ce n’est pas différent en Côte-d’Or et dans l’Yonne. C’est aussi un bon signe prédisant que les prix des vins vont augmenter ». En attendant, les cuves sont vides et la transmission intergénérationnelle est menacée… Sur demande de l’Union Viticole, le Préfet va mettre en œuvre « un diagnostic précis de notre viticulture départementale au delà de la simple filière », annonçait Alain Faure. 25 % des exploitations viticoles étant en difficulté pour dégager un revenu.[/WEB]
La défense des hommes se poursuivra !
Pour son dernier rapport moral en tant que président de l’Union viticole 71, à son image, Robert Martin se voulait « simple et rapide ». Efficace aussi comme le félicitait André Peulet, représentant le département ou encore Alain Faure, représentant le préfet.
Le vigneron de Davayé redisait son « amertume » et même sa « colère » de « devoir parler une nouvelle fois d’esca qui condamne notre vignoble ». Offensif, il durcissait encore le ton face aux politiciens et à l’administration, « combien de temps allez-vous attendre pour prendre au sérieux nos demandes ? » Un discours d’homme « passionné », qui veut encore « croire en nos métiers » envers et contre tout. « Le syndicalisme d’Hommes nous est cher. Il nous oblige à être force de propositions pour faire entendre notre voix et notre sensibilité. Et même si une page se tourne pour moi, la défense des vignerons se poursuivra ! »
Phyto sur ordonnance et sans remboursement
Le département a porté une quinzaine d’amendements (sur 42 déposés en France) pour la loi d’Avenir agricole encore à l’étude (Sénat). Notamment sur l’article 24, expliquait le responsable du service syndical, Philippe Vuillot. « On perdait la maitrise de l’utilisation de nos produits. C’était une ordonnance phyto. Avec le reste des productions végétales, nous sommes des professionnels responsables. On ne doit pas nous enlever la liberté de traiter », expliquait Robert Martin. La loi pourrait dès lors empêcher l’entraide entre collègues ou obliger à faire appel à un prestataire extérieur, sans certitude de délai, ni garantie en cas de pertes de récoltes liées.
Lissage des fermages et actions sur le terrain
L’activité de l’année a une nouvelle fois été chargée pour le syndicalisme d’Homme. Les deux viticulteurs, Danièle Jaillet et Pierre-François Goubard listaient les actions. Première d’entre elles, le « lissage » des prix des fermages soumis aux variations. Exemples à l’appui, « en appellation mâcon blanc, sans lissage la hausse aurait été de + 11 %. Elle a été limitée à +3 %. Idem en bourgogne rouge, + 9 % au lieu de +30 % sans lissage ». Le nouveau mode de calcul permet donc d’éviter « les dents de scie » à la hausse mais aussi à la baisse.
Autre type de défense de la profession, les rencontres avec les pouvoirs publics pour éviter l’obligation de couvrir les aires de lavage (norme ICPE). Derrière, surtout, toutes les six semaines, avec le bureau de la FDSEA, l’Union viticole rencontre les parlementaires du département. Des occasions de parler fiscalité, simplification administrative (TESA, travail à la tâche…)... La FDSEA étant l’institution représentative pour négocier avec les services de l’Etat sur toutes les questions de main d’œuvre. Mais pas que.
L’union continue de se battre sur certains dossiers « polémiques » comme l’esca, la flavescence dorée, les traitements aériens dérogatoires, les contraintes environnementales (directive Nitrate…)… sur lesquels, la profession se déchire.
L’animateur, Thibault Laugâa résumait ainsi « la ligne directrice » qui lui a été confiée : « renforcer la présence locale sur le terrain » pour informer (bulletin, réunion prévendanges, USC…) et former (déclaration récolte, G@mma, SV12…).
Assureurs sinistrés
Pertes de récoltes, orages de grêle (La Chapelle-de-Guinchay….), excès d’eau… la campagne 2013 aura, comme celle de 2012, fait mal.
Si l’Union viticole a obtenu des dégrèvements de taxes foncière (TFNB), a activé le fonds de calamité ou encore travaillé avec la MSA pour la prise en charge de cotisations, les regards se tournent maintenant vers les assureurs privés.
Pour Groupama, Luc Chevalier ne cachait pas son inquiétude. « L’assurance récolte était là pour pallier les années déficitaires. Mais désormais, elles le sont toutes ! » Avec un ratio sinistres/cotisations de 195 % (3,54 millions d’euros d’indemnisations), l’assurance verte a « l’obligation d’anticiper ses pertes ». Et les augmentations de cotisations « ne suffisent plus ». Incluse dans la Pac, l’assurance récolte est en renégociation pour la période 2014-2018. La création du fonds de mutualisation (FMSE) avec cofinancement de la profession, de l’Europe et de la France pourrait permettre de mutualiser les pertes, entre régions et entre productions.
« L’assurance dans nos métiers est un outil indispensable. Les deux dernières années le rappellent. Mais, pour garder les 65 % d’aides publiques, il fallait que la profession mette la main à la poche. La FNSEA, et donc l’Union viticole 71, reste l’interlocuteur européen et français », insistait Robert Martin.
L’obscurantisme et autres imprécisions politiques
Questionné par les professionnels sur les choix politiques en matière de recherche contre les maladies du bois de la vigne, l’élu régional, Jacques Rebillard comparait notamment l’Esca au Sida chez l’homme. « Les chercheurs n’ont pas encore compris son origine et son développement, qui affaiblit le pied. En Bourgogne, un certain nombre d’équipes de recherche peuvent apporter une partie de la réponse. Je pense au renforcement des défenses naturelles d’abord et à la microbiologie des sols, via sa biodiversité, qui avec le phénotypage (plateforme PPHD à Dijon) de matériel végétal, peut permettre de trouver des clones résistants ». Il se disait conscient de « l’impatience » de la profession.
Robert Martin lui rappelait néanmoins le « saccage des essais à l’INRA de Colmar » qui plus est « en toute impunité ». Embêté aux entournures, l’élu tentait une diversion : « on n’a pas le droit de détruire 30 ans de recherche sinon on entre dans une phase d’obscurantisme ». Le membre de la commission Environnement en charge également de l’Agriculture au Conseil Régional rajoutait toutefois : « Mais derrière, il y avait aussi le débat sur les OGM. Je pense que la vigne a dans son potentiel génétique, la résistance nécessaire. Il n’est pas besoin d’aller chercher d’autres gènes dans d’autres espèces ».
Une "imprécision" qui en dit long. Issus des biotechnologies, les plantes génétiquement modifiées – par transgénèse – ne le sont pas obligatoirement par "des gênes d’autres espèces" et peuvent tout à fait l’être avec des gênes de la même espèce. Comme pour toute sélection classique en somme... mais de façon scientifique, maitrisée et rapide.