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Bouilleurs de cru Franche-Comté Bourgogne

La distillation nouvelle génération

Pour durer, l’activité de bouilleur de cru doit se transmettre. Installé
en 2012 à Montgesoye dans le Doubs, Sébastien Verdenet, 44 ans, est
bien décidé à faire perdurer la tradition.
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Chez les Verdenet, la distillation est une affaire de famille. Depuis le 1er septembre 2015, Sébastien Verdenet, 44 ans, a acheté son alambic et s’est installé à Montgesoye, dans le laboratoire de son arrière-grand-père. « Je suis distillateur professionnel depuis le 1er avril 2012 » détaille celui qui est par ailleurs président adjoint de l’Association française des récoltants de fruits et bouilleurs de cru Franche-Comté Bourgogne. « Avant, j’étais salarié de l’association Ruranim qui voulait ouvrir un atelier public de distillation ».

« Amener du sang neuf »


C’est ainsi qu’avec le président de l’association, il s’était mis en quête d’un alambic. Puis il s’est formé à son utilisation avant de quitter Ruranim pour s’installer comme distillateur deux ans plus tard. Sans tarder à être récompensé pour son activité.
« Avec cet appareil, j’ai décroché la médaille d’or du concours international des eaux-de-vie à Metz en 2010, le concours le plus prestigieux dans sa catégorie », apprécie-t-il. « Ce titre m’a décidé à continuer car, ce qui m’intéresse, c’est la qualité. Je veux des eaux-de-vie aromatiques et sans défaut ».
Pour atteindre son objectif, Sébastien Verdenet est prêt à mouiller la chemise s’il le faut. Et à retrousser ses manches. « Quand les vignes de Ruranim à Vuillafans sont tombées en désuétude, j’ai été le premier à prendre le sécateur pour les relancer. J’ai tout nettoyé et aujourd’hui j’ai fait des émules. Désormais, le vignoble de Vuillafans est sauvé ». Une véritable fierté pour celui qui considère la distillation comme une vocation et ne voudrait pour rien au monde faire autre chose de sa vie.
« Il faut préserver le patrimoine fruitier », insiste-t-il encore. « Et revenir aux choses de la terre. Avec l’association, nous organisons des séances de greffe et de taille des arbres fruitiers pour que les gens aient les notions de base pour couper les branches au bon moment. Je vois trop de gens laisser tomber leurs pommes par terre et acheter des fruits en supermarché… ».
Pour les initier, il est prêt à les former en intervenant dans les collèges et parlant distillation aux élèves de troisième à Dole ou à Baume-les-Dames. « Je veux amener un peu de sang neuf pour attirer des gens de ma génération et transmettre mon savoir-faire ». Et donner un coup de jeune à l’image du bouilleur de cru.




Chic, cet alambic !


Sa distillation, Sébastien Verdenet l’opère dans un alambic Stupfler, un modèle rare. « C’est un alambic à colonne et il n’y en a que quatre en France de la sorte », précise avec fierté le professionnel. Il reçoit les fruits fermentés des particuliers et les transforme en eau-de-vie dans cet alambic performant.







Une assemblée générale grand cru


L’association française des récoltants de fruits et des syndicats de bouilleurs de cru Franche-Comté Bourgogne, 1.050 adhérents en 2016, s’est réunie le 11 juin dernier à Épenoy dans le Doubs pour son assemblée générale annuelle. L’occasion pour la présidente, Michelle Gehant, et tous les bouilleurs de cru passionnés, de défendre le patrimoine fruitier, le maintien des vergers et des variétés de fruits anciennes.




« A déguster, pas à boire ! »


Guy Richard, président de la Fédération nationale des syndicats et récoltants familiaux de fruits et producteurs d’eau-de-vie naturelle a participé à l’assemblée générale des Bouilleurs de cru Franche-Comté Bourgogne. Rencontre.

Comment est née votre passion pour la distillation ?

Guy Richard : mon grand-père maternel m’emmenait aux foins dès l’âge de 4 ans. Il me disait que la distillation était une affaire d’hommes. J’ai toujours aimé le côté magique de cette activité, son odeur sympathique, le feu...

Quel est le quotidien d’un président de Fédération nationale ?

G. R. : c’est de défendre une passion en dehors de mon activité principale. Jusqu’au 6 avril dernier, j’étais directeur d’une entreprise d’équipement ménager en Alsace. En tant que président, je fédère les différentes associations et syndicats et vais au-devant des responsables politiques pour avoir un lien étroit avec le législateur.

Notre association ne s’occupe pas que de la distillation, mais de l’entretien des vergers. Il faut montrer dans chacune des régions ce que le bouilleur de cru apporte au paysage.

Quelle est votre vision de l’association Bourgogne Franche-Comté ?

G. R. : l’association Bourgogne Franche-Comté fonctionne bien car elle a de multiples activités. On ne peut être que fier d’elle. Par exemple en automne, les bouilleurs de cru animent des fêtes et apportent une image valorisante de notre passion.

Comment vit-on cette passion à l’heure des interdictions ?

G. R. : que la consommation d’alcool soit contrôlée ne me pose aucun problème car nos alcools ne sont pas à boire, mais bien à déguster.

Propos recueillis par A. A.






« Une association très dynamique »


En Suisse aussi, la distillation est une tradition. Marc Gilliéron, responsable à la régie fédérale des alcools suisses présent à l’assemblée générale des Bouilleurs de cru Franche-Comté Bourgogne en tant qu’invité, en a apporté la confirmation. « Depuis 30 ans, il y a un lien entre les distilleries suisses et françaises » a-t-il rappelé. « Fondamentalement, il n’y a pas de différences. En Suisse comme en France, les bouilleurs de cru sont, comme les chasseurs, des amoureux de la nature ». Avant de vanter les mérites de l’association présidée par Michelle Gehant : « elle est très dynamique et fonctionne bien. Elle trouve des solutions avec les douanes. L’an passé, elle a obtenu un changement dans le délai de distillation, celui de pouvoir distiller les fruits immédiatement après la fermentation. C’est un avantage au niveau de la qualité du produit ».

De son côté, Marc Gilliéron est plongé dans l’univers de la distillerie depuis une trentaine d’années. Il est tombé dedans alors qu’il recherchait un emploi. « J’ai rencontré des anciens qui m’ont ouvert les portes de ce monde chaleureux », se souvient-il. Tout en analysant les changements de consommation qui se sont opérés au fil des ans. « La philosophie autour de la distillation a changé depuis les années 80. Depuis le début du siècle, il y avait trop d’abus dans les fermes. Il y avait une consommation excessive de cet alcool bon marché. Aujourd’hui, les gens, et notamment les jeunes, consomment d’autres alcools comme le whisky. Cela vaudrait la peine de leur expliquer les côtés positifs des eaux-de-vie pour qu’ils en apprécient le savoir-faire sans en faire une hyper consommation à outrance. Une association comme l’association française des syndicats de bouilleurs de cru est bien placée pour renseigner la jeunesse ». Et lui aussi de faire la promotion de la qualité et non de la quantité.

A. A.



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