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Production laitière

« La qualité des fourrages fait le lait »

Pour enrayer la baisse de production laitière induite par la médiocre qualité des fourrages 2016, l’expérience montre qu’augmenter la distribution de concentrés n’était pas forcément la bonne solution. Lorsque c’était possible, l’apport de fourrages de qualité a permis de corriger utilement les rations.
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Le 9 mars, une journée laitière était organisée par Lait’lite 71 et les syndicats de race Holstein et Montbéliard à Simandre. A l’issue des assemblées générales des trois structures, Denis Chapuis de la chambre d’agriculture a présenté les enseignements de la campagne fourragère 2016 et ses conséquences en termes de ration. Un travail réalisé avec Anne Blondel d’Acsel Conseil Elevage.
2016 a en effet été marquée par des conditions climatiques particulièrement défavorables à la qualité des fourrages. Pluie, froid et manque de lumière en mai-juin ont abouti à un manque de sucre, d’UF et de matière azotée dans les fourrages, synthétisait Denis Chapuis. Seuls les ensilages d’herbe récoltés précocement ont affiché de bonnes valeurs. Quant aux maïs, implantés difficilement, avec des semis s’étalant sur cinq semaines et même plus, ils ont donné des ensilages très hétérogènes avec des taux de matière sèche très élevés pour certains. « Les analyses montrent que ces ensilages ne sont pas mauvais en amidon, mais ils sont très en retrait par rapport à la matière azotée et les sucres », détaille le technicien qui ajoute que « les amidons sont moins digestibles dans le rumen et les PDIN plus faibles ».

Baisse de production


Cette mauvaise qualité des fourrages s’est ressentie sur la production laitière, laquelle a décroché à partir du moins d’août et le différentiel s’est amplifié en septembre pour demeurer tout au long de l’hiver. Le déficit de production est de -1,5 à -2 kg de lait par vache et par jour partout en France, informe Denis Chapuis. Si les vaches ont fait moins de lait, en revanche, la matière grasse s’est maintenue avec un TB plus élevé. La baisse de production tient sans doute aussi à la conjoncture faisant que les éleveurs ont un peu fait l’impasse sur les concentrés au regard du prix du lait trop bas.

Trois exemples d’adaptation


Pour la campagne 2016/2017, il a donc fallu s’adapter à ces fourrages globalement mauvais et hétérogènes. Denis Chapuis et Anne Blondel ont retenu trois exemples d’adaptation mis en place par des éleveurs de la région.
Dans un premier cas de figure, le troupeau a démarré sa lactation avec le contenu de silo récolté en 2016 et la production a plafonné. Puis, au fur et à mesure que le front de silo avançait, les vaches ont retrouvé du maïs datant de 2015 si bien que la production est repartie à la hausse.
Dans le second cas de figure, un autre élevage nourrissait ses vaches avec un maïs ensilage trop sec, d’où une ration qui ne fonctionnait pas, expliquait le technicien. Le choix a alors été fait d’augmenter la part d’herbe dans la ration, d’ajouter de l’urée et de réintégrer du maïs issu de semis plus tardifs donc moins sec. Avec davantage d’énergie et d’azote rapide, la production est remontée dans cet élevage, rapportait le technicien.
Troisième exemple avec une ration qui ne donnait pas satisfaction non plus avec un taux d’urée très bas. Cette fois, le choix a été fait de remettre des tourteaux pour tenter de « relancer la machine ». Si l’effet urée était au rendez-vous, en revanche, la production de lait n’a augmenté que de +1 kg par jour et par vache. Une efficacité très relative au regard du coût d’achat de l’aliment, pointe Denis Chapuis.
Ces trois exemples prouvent que la façon « la plus efficace de corriger la ration est de réintégrer des fourrages de qualité et d’ajouter du concentré pour finir d’équilibrer », conclut le technicien.

Concentrés économiquement inefficaces


Un constat qui rejoint les conclusions des essais conduits les années passées dans les fermes expérimentales de Fontaines et de la Barotte (21). Partant d’une ration équilibrée couvrant les besoins des animaux, ces essais évaluaient l’efficacité économique d’augmenter la quantité de concentré distribuée pour produire plus. Or, ces travaux démontraient que l’efficacité de ces concentrés n’était pas extraordinaire. Au regard du prix du lait et du coût de ces aliments, la démarche n’avait même aucun intérêt avec une réponse limitée sur le plan technique, voire même nulle. Avec un lait payé 337 €/1.000 litres, l’essai mettait même en évidence une perte de -1.700 € par mois à Fontaines. Seul un contexte de prix du lait très favorable justifierait un tel choix.
Autant de démonstrations qui confirment bien que « c’est d’abord la qualité des fourrages qui fait le lait », concluait Denis Chapuis et que cette qualité « dépend en premier lieu du stade de récolte. D’où l’intérêt d’être bien organisé pour être le plus efficace possible selon les fenêtres météo ».



Qualité des ensilages
Sous la bâche, les silos évoluent dans le temps


Dans le contexte particulier des fourrages récoltés en 2016, il faut tenir compte du phénomène d’évolution dans le temps du contenu des silos, pointait Denis Chapuis. En effet, une fois emprisonné sous sa bâche, l’ensilage continue d’évoluer, notamment sa digestibilité. C’est le cas de la dégradabilité de l’amidon et de la matière azotée totale. Une évolution d’autant plus vraie avec des maïs 2016 à fort taux de matière sèche. L’enseignement de ce phénomène est qu’il convient de « gérer les chantiers selon l’avancement des parcelles et de ne pas hésiter à réserver certaines parcelles plus avancées pour plus tard », recommandait Denis Chapuis.