Le bien-être animal pose bien des questions et suscite bien des réflexions...
Trois jours de réflexions et d’échanges sur le bien-être animal ont permis de s’interroger sur la pertinence d’« un changement de système », système d’élevage certes mais aussi système économique pour que les éleveurs puissent mieux vivre de leur métier.

Et si finalement, la solution à la problématique du bien-être animal en élevage était tout simplement de changer de système ? A écouter les comptes rendus des cinq ateliers du colloque du RMT Bien-être animal organisé du 12 au 14 décembre à Rennes, la question peut se poser…
Pour certains des deux cents participants, « il s’agirait de changer de système plutôt que de mettre des sparadraps » régulièrement au système actuel. Et cela d’autant plus qu’« il reste difficile de passer de la théorie à la pratique ». Dès lors, plutôt que de trouver de nouveaux anesthésiants pour couper les queues des porcs, ne serait-il pas plus simple de ne pas les couper ? Ce qui engendre forcément une autre réflexion quant à la conduite de l’élevage… C’est là un exemple parmi d’autres : écornage en élevage bovin, débequage et dégriffage des volailles… « Il s’agit avant tout de limiter les situations de stress plutôt que de donner des facteurs anti-stress », observait le rapporteur de l’atelier intitulé "Prendre en compte le comportement des animaux".
Depuis vingt-cinq ans, les éleveurs n’ont eu de cesse d’investir dans leur élevage et de l’améliorer. Ils ont l’impression que les choses sont bien faites, d’où un décalage énorme entre les propos tenus dans ce colloque et la réalité vécu par les éleveurs.
Des revenus pour les éleveurs
Lui même éleveur, André Sergent a mis en avant le revenu des éleveurs, « si bas qu’il est parfois difficile d’entendre certains messages ». Il évoque même « de possibles dérives entre la volonté de respecter le bien-être animal et le volet sanitaire », alors que les Français « n’ont jamais eu accès à une alimentation aussi saine ».
Pour Alain Boissy, chercheur à l’Inra et membre référent du Centre national de référence sur le bien-être animal, cela confirme qu’« il ne faut pas extraire le bien-être animal du contexte économique et environnemental » qui l’entoure. Aussi, des thèmes comme la régulation des marchés ou la prochaine Pac font-ils partie intégrante de la problématique du bien-être animal. « Le bien-être animal est souvent coûteux, sans forcément de valorisation derrière », observait, pour sa part, Olivier Allain, le coordinateur des États généraux de l’Alimentation. Pour autant, ce dernier croit fortement en la possible montée en gamme des productions françaises. Pour y arriver, le "Sans antibiotique", le "Sans OGM", le "Faible coût carbone" ou encore le "Respect du bien-être animal" feront partie de la différenciation des produits français sur les marchés internationaux à côté des autres démarches qualité (AOP, IGP, Label, bio). « Nous pourrons mieux vendre à l’export », selon lui.
Ce à quoi André Sergent lui rétorquait qu’en tant qu’éleveur français, « demander plus de bien-être animal, face aux feed-lots d’Argentine ou au porc espagnol, cela fait sourire ! ». Et on lui donne un peu raison quand on voit la déferlante de viandes bovines et de volailles que le Mercosur et le Canada entendent nous envoyer sur le marché européen dans les mois à venir, notamment dans les marchés où la question du prix bas demeure centrale… Comme toujours, seule l’économie aura le dernier mot.