TVA sur les activités équines
Le combat sur le taux réduit continue
Grâce à la mobilisation de la FNC, du GHN et de la FNSEA notamment, la
TVA à taux réduit a été maintenue sur les activités équestres. Mais le
combat se poursuit pour obtenir le taux réduit sur les ventes de chevaux
d’élevage. Rencontre avec Marianne Dutoit, présidente de la FNC, et
Pascal Bioulac, président du GHN.
TVA à taux réduit a été maintenue sur les activités équestres. Mais le
combat se poursuit pour obtenir le taux réduit sur les ventes de chevaux
d’élevage. Rencontre avec Marianne Dutoit, présidente de la FNC, et
Pascal Bioulac, président du GHN.
Pouvez-vous nous expliquer la procédure en cours sur la TVA qui s'applique aux opérations relatives aux équidés ?
Marianne Dutoit : avant toute chose, il faut rappeler que l'arrêt du 8 mars 2012 de la Cour de Justice de l'Union européenne condamne la France comme les Pays-Bas, l'Allemagne ou l'Autriche, pour l'application de taux réduits de TVA aux ventes de chevaux et aux gains de courses. L’Etat français, par le projet de loi de finances 2013 - sous peine d'astreinte financière de 250.000 € par jour - devait depuis cette date mettre en conformité la législation nationale avec le droit communautaire.
Le taux normal de TVA à 19,6 % s’applique ainsi dès 2013 aux opérations relatives aux équidés, sauf lorsqu'ils sont destinés à être utilisés dans la préparation des denrées alimentaires ou dans la production agricole.
Après deux ans de contentieux, le taux réduit de TVA a donc été sauvegardé sur les ventes de chevaux pour l'alimentation, les activités de culture, de débardage ou de pêche avec des chevaux, les acquisitions d'étalons ou de pouliches à des fins reproductives, les opérations de monte ou de saillies, les autres intrants agricoles notamment dans le cadre des élevages, les activités équestres réalisées dans un cadre sportif. Reste à décliner à l'aide d'arguments juridiques cohérents et sérieux, ce que l'on peut mettre précisément derrière ces différentes notions.
Le Groupement hippique national (GHN) a lancé la Campagne des Insurgés relayée par la Fédération française d’équitation (FFE), la Fédération nationale du cheval (FNC) et la FNSEA. Pouvez-vous nous en rappeler le contexte ?
Pascal Bioulac : pour bien comprendre, il faut remonter en 2010 lors de la requête de la Commission européenne à la Cour de justice de l’Union européenne sur les dispositions françaises en termes de TVA sur la filière cheval (gains de courses, ventes, saillies, pensions, etc.). Le Gouvernement français a alors lancé sa ligne de défense sur la destination alimentaire des équidés pour protéger toute la filière.
En apprenant que les arguments de la France étaient mal compris par la Commission européenne, le Groupement hippique national (GHN) - membre comme la FNC de la FNSEA et qui siège au Copa Cogeca - a réuni les services juridiques du GHN et de la FNSEA pour mettre au point une défense "euro-compatible". En juin 2011, le collectif "L'équitation en péril" qui regroupe FFE, GHN, FNC et CSCCF (Chambre syndicale du commerce des chevaux de France) a ainsi apporté ses arguments pour convaincre les parlementaires français d'introduire, dès la loi de finances rectificative de 2012, l’amendement Thoraval. Cet amendement respecte les points 7, 13 et 14 de la Directive européenne, laquelle donne la possibilité aux Etats Membres d’appliquer un taux de TVA réduit aux activités "d’enseignements et d’utilisations d’installations sportives".
Fin septembre 2012, malgré la promesse du Gouvernement de maintenir l’amendement Thoraval quelles qu’aient pu être les injonctions de la Commission européenne, le ministère des Finances nous a laissé tomber : tout était remis en cause !
"La Campagne des Insurgés" est née sous l’impulsion du GHN qui n’a pas admis la volte-face du Gouvernement en dépit d’un fondement juridique européen respecté. C'était la meilleure façon de faire prendre conscience de l'importance de notre secteur économique.
Les résultats nous donnent aujourd'hui raison, puisque après de nombreuses interventions jusqu'aux décideurs du plus haut niveau, le Gouvernement - Stéphane Le Foll en tête - a jugé la position des "Insurgés" juridiquement acceptable et choisi de maintenir un taux réduit de TVA sur les activités équestres.
Mais alors, pourquoi le GHN a-t-il laissé tomber "la Campagne des Insurgés", alors que certains éleveurs ont l’impression d’être trahis ?
P. B. : le GHN n’a rien laissé tomber, mais après avoir obtenu le maintien d’une fiscalité adaptée en France sur ce qui était possible, le combat se déplace et se poursuit désormais au niveau européen. C’est désormais à Bruxelles qu’il faut soutenir le Gouvernement français qui va défendre une argumentation "euro-compatible" et essayer d’en convaincre la Commission européenne. Ceux qui font croire que la vente de chevaux d'élevage n’était pas encore condamnée ont usurpé notre campagne. La France s’est uniquement défendue avec l’argument "le cheval se mange" et a été condamnée le 8 mars dernier par la Cour de justice, pour l’application d’un taux réduit de TVA principalement sur les ventes de chevaux et les activités de courses.
Ceux qui appellent à la contestation nationale avec deux ans de retard, donnent de faux espoirs et rendent incompréhensible la problématique à tout à chacun, en particulier aux élus et aux décideurs.
Rester mobilisés, comme nous le faisons avec la FNC, est essentiel, mais pas avec des "barricades" françaises. Il faut désormais poursuivre le travail sur le champ de la technocratie européenne.
Si on peut comprendre que le GHN ait annulé les manifestations prévues en France le 16 décembre dernier après avoir sauvé les activités équestres, on peut s'interroger sur la situation dans laquelle se retrouve l'élevage ?
M. D. : premièrement, le GHN n'a pas annulé les manifestations du 16 décembre, mais les a ajournées ! Les activités équestres ne sont en effet pas totalement sauvées : la France doit encore convaincre la Commission européenne avant ce 21 janvier, que ces activités peuvent se voir appliquer un taux réduit de TVA sur d'autres fondements que ceux inscrits dans les points 1 et 11 de l'Annexe III de la Directive TVA, dont dépend hélas entièrement l'élevage.
Ensuite, en persuadant - ce qui n'a pas été aussi simple au regard du montant de l'astreinte prévu ! - le Gouvernement de se battre au niveau européen avec des arguments juridiques solides, construits désormais en partenariat entre l'Etat et la profession, nous pourrons plus facilement demain dans le cadre du Livre vert sur la TVA, défendre tous les professionnels de la filière, de l'amont à l'aval, c'est-à-dire de l'éleveur au centre équestre. Gagner cette étape sur les activités équestres est donc essentiel et vital pour sauver l'élevage au niveau européen.
Concrètement quel est le programme de ce début d'année 2013 ?
P. B. : nos juristes ont rencontré en fin d’année les services du ministère de l'Agriculture pour étudier la déclinaison de la nouvelle loi de Finances et pour préparer l'argumentaire qui sera proposé à la Commission européenne pour la convaincre que les activités équestres peuvent bénéficier d'un taux réduit en respect des directives européennes.
Les travaux européens se poursuivent, notamment par le biais de la section Cheval du Copa, présidée par Philippe Houdart. Des rencontres sont programmées avec les éleveurs allemands, hollandais et belges pour harmoniser un argumentaire commun aux propositions du livre vert TVA de la Commission européenne en 2013. Cela doit permettre de consolider nos travaux avec les autres Etats membres condamnés, pour construire une stratégie commune pour intégrer l'élevage d'équidés et les activités équestres qui en découlent, dans la liste des productions agricoles bénéficiant de taux réduit de TVA.
Le combat se poursuit pour trouver en Europe lors de la révision de la Directive TVA la fiscalité la plus adaptée aux éleveurs, aux marchands, aux centres équestres et aux cavaliers professionnels.
M. D. : l'union fait la force. En parallèle de ce combat majeur, nous poursuivrons nos investigations pour que les propositions du GHN et de la FNC - décrites depuis juin dernier dans notre Manifeste - soient comprises et reprises au niveau français dans le cadre de la Pac. Pour nos deux associations*, ce programme fort chargé s'intègre pleinement dans la campagne FNSEA/JA pour les élections aux chambres d'Agriculture, puisqu'une fois n'est pas coutume dans le cheval, nous représentons un syndicalisme responsable qui entend défendre et proposer des solutions réalistes.
* la Fédération Nationale du Cheval (FNC) et le Groupement Hippique National (GHN) sont deux associations spécialisées de la FNSEA.
Marianne Dutoit : avant toute chose, il faut rappeler que l'arrêt du 8 mars 2012 de la Cour de Justice de l'Union européenne condamne la France comme les Pays-Bas, l'Allemagne ou l'Autriche, pour l'application de taux réduits de TVA aux ventes de chevaux et aux gains de courses. L’Etat français, par le projet de loi de finances 2013 - sous peine d'astreinte financière de 250.000 € par jour - devait depuis cette date mettre en conformité la législation nationale avec le droit communautaire.
Le taux normal de TVA à 19,6 % s’applique ainsi dès 2013 aux opérations relatives aux équidés, sauf lorsqu'ils sont destinés à être utilisés dans la préparation des denrées alimentaires ou dans la production agricole.
Après deux ans de contentieux, le taux réduit de TVA a donc été sauvegardé sur les ventes de chevaux pour l'alimentation, les activités de culture, de débardage ou de pêche avec des chevaux, les acquisitions d'étalons ou de pouliches à des fins reproductives, les opérations de monte ou de saillies, les autres intrants agricoles notamment dans le cadre des élevages, les activités équestres réalisées dans un cadre sportif. Reste à décliner à l'aide d'arguments juridiques cohérents et sérieux, ce que l'on peut mettre précisément derrière ces différentes notions.
Le Groupement hippique national (GHN) a lancé la Campagne des Insurgés relayée par la Fédération française d’équitation (FFE), la Fédération nationale du cheval (FNC) et la FNSEA. Pouvez-vous nous en rappeler le contexte ?
Pascal Bioulac : pour bien comprendre, il faut remonter en 2010 lors de la requête de la Commission européenne à la Cour de justice de l’Union européenne sur les dispositions françaises en termes de TVA sur la filière cheval (gains de courses, ventes, saillies, pensions, etc.). Le Gouvernement français a alors lancé sa ligne de défense sur la destination alimentaire des équidés pour protéger toute la filière.
En apprenant que les arguments de la France étaient mal compris par la Commission européenne, le Groupement hippique national (GHN) - membre comme la FNC de la FNSEA et qui siège au Copa Cogeca - a réuni les services juridiques du GHN et de la FNSEA pour mettre au point une défense "euro-compatible". En juin 2011, le collectif "L'équitation en péril" qui regroupe FFE, GHN, FNC et CSCCF (Chambre syndicale du commerce des chevaux de France) a ainsi apporté ses arguments pour convaincre les parlementaires français d'introduire, dès la loi de finances rectificative de 2012, l’amendement Thoraval. Cet amendement respecte les points 7, 13 et 14 de la Directive européenne, laquelle donne la possibilité aux Etats Membres d’appliquer un taux de TVA réduit aux activités "d’enseignements et d’utilisations d’installations sportives".
Fin septembre 2012, malgré la promesse du Gouvernement de maintenir l’amendement Thoraval quelles qu’aient pu être les injonctions de la Commission européenne, le ministère des Finances nous a laissé tomber : tout était remis en cause !
"La Campagne des Insurgés" est née sous l’impulsion du GHN qui n’a pas admis la volte-face du Gouvernement en dépit d’un fondement juridique européen respecté. C'était la meilleure façon de faire prendre conscience de l'importance de notre secteur économique.
Les résultats nous donnent aujourd'hui raison, puisque après de nombreuses interventions jusqu'aux décideurs du plus haut niveau, le Gouvernement - Stéphane Le Foll en tête - a jugé la position des "Insurgés" juridiquement acceptable et choisi de maintenir un taux réduit de TVA sur les activités équestres.
Mais alors, pourquoi le GHN a-t-il laissé tomber "la Campagne des Insurgés", alors que certains éleveurs ont l’impression d’être trahis ?
P. B. : le GHN n’a rien laissé tomber, mais après avoir obtenu le maintien d’une fiscalité adaptée en France sur ce qui était possible, le combat se déplace et se poursuit désormais au niveau européen. C’est désormais à Bruxelles qu’il faut soutenir le Gouvernement français qui va défendre une argumentation "euro-compatible" et essayer d’en convaincre la Commission européenne. Ceux qui font croire que la vente de chevaux d'élevage n’était pas encore condamnée ont usurpé notre campagne. La France s’est uniquement défendue avec l’argument "le cheval se mange" et a été condamnée le 8 mars dernier par la Cour de justice, pour l’application d’un taux réduit de TVA principalement sur les ventes de chevaux et les activités de courses.
Ceux qui appellent à la contestation nationale avec deux ans de retard, donnent de faux espoirs et rendent incompréhensible la problématique à tout à chacun, en particulier aux élus et aux décideurs.
Rester mobilisés, comme nous le faisons avec la FNC, est essentiel, mais pas avec des "barricades" françaises. Il faut désormais poursuivre le travail sur le champ de la technocratie européenne.
Si on peut comprendre que le GHN ait annulé les manifestations prévues en France le 16 décembre dernier après avoir sauvé les activités équestres, on peut s'interroger sur la situation dans laquelle se retrouve l'élevage ?
M. D. : premièrement, le GHN n'a pas annulé les manifestations du 16 décembre, mais les a ajournées ! Les activités équestres ne sont en effet pas totalement sauvées : la France doit encore convaincre la Commission européenne avant ce 21 janvier, que ces activités peuvent se voir appliquer un taux réduit de TVA sur d'autres fondements que ceux inscrits dans les points 1 et 11 de l'Annexe III de la Directive TVA, dont dépend hélas entièrement l'élevage.
Ensuite, en persuadant - ce qui n'a pas été aussi simple au regard du montant de l'astreinte prévu ! - le Gouvernement de se battre au niveau européen avec des arguments juridiques solides, construits désormais en partenariat entre l'Etat et la profession, nous pourrons plus facilement demain dans le cadre du Livre vert sur la TVA, défendre tous les professionnels de la filière, de l'amont à l'aval, c'est-à-dire de l'éleveur au centre équestre. Gagner cette étape sur les activités équestres est donc essentiel et vital pour sauver l'élevage au niveau européen.
Concrètement quel est le programme de ce début d'année 2013 ?
P. B. : nos juristes ont rencontré en fin d’année les services du ministère de l'Agriculture pour étudier la déclinaison de la nouvelle loi de Finances et pour préparer l'argumentaire qui sera proposé à la Commission européenne pour la convaincre que les activités équestres peuvent bénéficier d'un taux réduit en respect des directives européennes.
Les travaux européens se poursuivent, notamment par le biais de la section Cheval du Copa, présidée par Philippe Houdart. Des rencontres sont programmées avec les éleveurs allemands, hollandais et belges pour harmoniser un argumentaire commun aux propositions du livre vert TVA de la Commission européenne en 2013. Cela doit permettre de consolider nos travaux avec les autres Etats membres condamnés, pour construire une stratégie commune pour intégrer l'élevage d'équidés et les activités équestres qui en découlent, dans la liste des productions agricoles bénéficiant de taux réduit de TVA.
Le combat se poursuit pour trouver en Europe lors de la révision de la Directive TVA la fiscalité la plus adaptée aux éleveurs, aux marchands, aux centres équestres et aux cavaliers professionnels.
M. D. : l'union fait la force. En parallèle de ce combat majeur, nous poursuivrons nos investigations pour que les propositions du GHN et de la FNC - décrites depuis juin dernier dans notre Manifeste - soient comprises et reprises au niveau français dans le cadre de la Pac. Pour nos deux associations*, ce programme fort chargé s'intègre pleinement dans la campagne FNSEA/JA pour les élections aux chambres d'Agriculture, puisqu'une fois n'est pas coutume dans le cheval, nous représentons un syndicalisme responsable qui entend défendre et proposer des solutions réalistes.
* la Fédération Nationale du Cheval (FNC) et le Groupement Hippique National (GHN) sont deux associations spécialisées de la FNSEA.