Le cru Saint-Véran veut pérenniser la belle dynamique impulsée par le succès de sa Saint-Vincent tournante de Bourgogne
Le 23 mai au lycée de Davayé, le cru Saint-Véran tenait son assemblée générale. Les vignerons étaient encore tous visiblement heureux d’avoir magnifiquement réussi leur Grande Saint-Vincent tournante de Bourgogne en début d’année. Une promotion dédiée à tout le Mâconnais. L’ODG entend profiter de cette dynamique pour surfer sur des marchés porteurs, consolider son image, (ré)avancer sur sa reconnaissance de ses premiers crus… et, déjà, préparer les cinquante ans de l’appellation en 2021 ! Infatigable, ce Saint-Véran.

Entre « soulagement » et « excitation ». Tel était l’état d’esprit du Saint-Véran, selon son président, Kévin Tessieux. En effet, c’est un travail colossal qui a été réalisé par l’ODG pour réussir la 74e Grande Saint-Vincent tournante de Bourgogne, les 27 et 28 janvier dernier à Prissé, en l’honneur de l’AOC Saint-Véran. Les chiffres le prouvent : 85.000 visiteurs sont ainsi venus déguster une sélection de crus saint-Véran, chacun représentatif d’un village dans lequel est produit l’appellation. 615 bénévoles ont œuvré sur le seul weekend pour un total de plus de 5.000 heures de bénévolat. Et cela sans compter le travail effectué avant, ni même celui des vignerons responsables de différentes commissions qui n’ont pas pu profiter pleinement de la fête... 20.000 kits de dégustations ont été vendus, le banquet a affiché complet, 14.000 bouteilles ont été servis (achetées par l’organisation pour un montant de 85.000 €)... Le BIVB a déjà dénombré quelque 350 articles et reportages vidéos pour des retombées qui auront, à n’en pas douter, un « impact sur le moyen et long terme ». Bref, un plein succès sur tous les tableaux.
Dialogue avec les bénévoles
La « pression » (financière, sécurité…) était donc retombée en ce 23 mai à Davayé pour l’assemblée générale du cru et l’heure était à se remémorer les anecdotes et les bons moments.
« Nous sommes tous soulagés d’avoir passer et relever ce défi. Il faut en tirer des enseignements. Cet événement va nous servir de référence pour en conduire d’autres, plus simples ou tout aussi complexes », analysait Kévin Tessieux. La profession viticole a prouvé qu’elle était parfaitement capable de réaliser collectivement un événement « solidaire », à l’origine des Sociétés de secours mutuels et qui prend aujourd’hui la forme d’une « action à but non-lucrative ». De fait, tous les bénéfices de cette 74e Saint-Vincent tournante seront reversés aux Restos du Cœur. Rendez-vous est donné à tous les bénévoles et vignerons pour ce geste fort le 15 juin à Leynes pour la soirée de clôture, laquelle se déroulera, toujours en présence du parrain de la manifestation, Michael Jones, et d’autres concerts.
Le président du cru en profitera pour sincèrement remercier tous les bénévoles « non vignerons ». A l’heure des polémiques autour des traitements phytos, ce travail « nous a permis d’ouvrir le dialogue, pas toujours facile avec certains habitants, pour trouver des solutions ensemble », positivait-il, voyant plutôt là une façon de valoriser ensemble le patrimoine local, le tourisme et le volet culturel.
Le besoin de se recentrer
Du côté des quelques inconvénients de cette Saint-Vincent tournante, c’est que les 337 adhérents à l’ODG, dont 258 déclarants de récolte et 79 bailleurs, n’ont pas eu beaucoup de temps à côté pour travailler les autres dossiers de fond. « Il nous faut nous recentrer sur l’appellation avec le travail sur nos terroirs et nos crus, sur les maladies de la vigne, sur les défis environnementaux mais aussi sur les aspects sociaux, sociétaux et économiques », remotivait Kévin Tessieux, qui se disait conscient que tous ces éléments mélangés sont « complexes » à appréhender et qu’il est nécessaire pour trouver de bons « équilibres » de savoir s’entourer de « compétences » extérieures.
Pour bien commencer, le cru va repartir de la base : son terroir, ses sols, ses crus. Le dossier de classement "Premiers crus" auprès de l’INAO devrait être "facilité" par le précédent dossier similaire accepté en AOC Pouilly-Fuissé, expliquait le responsable du dossier, Pierre Beaubernard. Impression confirmée par l’INAO lors de cette assemblée générale. Reste que les vignerons doivent se saisir de ce dossier « en étant proactifs » pour également « connaître » leurs terroirs où plutôt pour « les expliquer, pour trouver les mots et les éléments techniques » qui caractérisent chaque climats. Les études de sols - réalisées par le cabinet Sigales - seront d’ailleurs prochainement consultable sur le nouveau site web du cru, présentait Sylvain Paturaux, responsable de la commission Communication. « L’objectif est d’avoir un outil - une carte interactive - facile à prendre en main (par géolocalisation) pour des résultats pédagogiques pour mettre en avant nos lieux-dits et, demain, nos premiers crus ».
Limites mâconnaises
Vient ensuite le travail sur la notoriété du cru ou plutôt des crus… Voulant dépasser le « cadre culturel historique », en clair les "histoires de clochers", Kevin Tessieux a lancé un appel aux autres appellations mâconnaises - Pouilly-Fuissé, Pouilly-Loché, Pouilly-Vinzelles, Viré-Clessé et Mâcon - « pour réfléchir et agir de manière concertée et commune ». Il tirait en effet le constat d’un déficit de renommée des appellations mâconnaises à l'étranger. « A nous tous de nous mettre autour de la table pour travailler de façon commune », invitait-il. D'ailleurs, le cru dédiait la réussite de la Saint-Vincent tournante à tous les vignerons du Mâconnais lesquels « façonnent les vins et mettent en valeur les terroirs ».
Reste que cette image se fait dans un environnement naturel mais aussi concurrentiel sur les marchés. Les AOC du Mâconnais ont engagé à ce titre un travail, avec le BIVB, sur l’image et l’argumentaire pour une « montée en gamme » coordonnées des appellations mâconnaises. La recherche de « toujours plus » de qualité des vins reste la constante pour « construire une image de l’AOC auprès des consommateurs ».
Impact environnemental de l’Arelfa
Et cette qualité prend ses racines à la vigne. Responsable des contrôles internes, Jérôme Jeandain notait peu de manquements transmis à Siqocert. Un bon bilan comme celui de la prospection Flavescence dorée qui n’a fait état d’aucun pied contaminé et avec une « bonne participation » des vignerons pour surveiller collectivement la maladie, confirmait Vincent Nectoux, responsable auprès de la CAVB. Pour autant, tout n’a pas été simple puisqu’en fonction des villages, des pertes de récolte comprises entre -5 et -10 % ont été déplorées en raison du gel printanier, de la grillure ou de la sécheresse estivale. Le vigneron prisséen dressait également un bilan « globalement satisfaisant » du réseau "anti-grêle" Arelfa tout en n’ayant pas de certitude sur son efficacité réelle : « on ne peut pas comparer, mais juste constater ce qui s’est passé ». Comme s’y était engagée l’Arelfa, une étude sur l’impact environnemental de l’iodure d’argent - estimé à 2 à 3 g/ha/an - sera menée dans les prochains mois, avec des prélèvements (sols, vignes, végétation…).
Par ailleurs, aucune hausse des cotisations n’a été décidée. L’ODG peut s’enorgueillir d’une comptabilité saine.
Etant sur le départ, Anaïs Crozet, animatrice du cru salariée en commun avec le cru Viré-Clessé, concluait sur son travail au sein de l'ODG : « merci pour cette super expérience, votre bonne entente et la bonne ambiance que je garderai en mémoire ». Presque un slogan pour le Saint-Véran qui se penche, déjà, sur les cinquante ans de l’appellation qui auront lieu en 2021...