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Parc naturel régional du Morvan

Le dialogue s’impose

Le 26 septembre, les responsables de la FDSEA et des Jeunes agriculteurs
ont invité le président du Parc naturel régional du Morvan pour ne pas
rompre le fil du dialogue, mais aussi exprimer leur opposition à toute
politique qui imposerait des contraintes supplémentaires dans cette
région déjà difficile.
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Le 26 septembre, à l’initiative de la FDSEA et des JA de Saône-et-Loire, une soixantaine d’agriculteurs se sont retrouvés à Tavernay pour échanger sur le Parc naturel régional du Morvan avec le président de celui-ci, Patrice Joly, et le conseiller général du secteur, Jean-Baptiste Pierre. Il faut dire que la perspective de clôturer les cours d’eau pour les rendre inaccessibles aux animaux a provoqué l’incompréhension et la stupeur dans le monde agricole. Pour ce dernier, un Parc naturel régional devrait, non pas en rajouter sur les contraintes qui pèsent sur les exploitations, mais au contraire aider ces dernières à transformer en force les handicaps dont la région est trop richement dotée. On pense aux atouts mêmes que constitue l’existence du parc régional, dont la dynamique est à travailler, mais en aucun cas en opposant les acteurs qui y vivent les uns aux autres. La discussion a été franche et riche.

Un positionnement clair


De cette réunion a découlé une position locale et départementale qui a été rapportée sur l’enquête publique lors de la permanence du commissaire enquêteur à Lucenay-l’Evêque le lendemain, ainsi qu’à Etang-sur-Arroux le 3 octobre. A savoir :
- le manque de consultation de la profession sur des orientations majeures ;
- nous déplorons une certaine communication négative dans la presse à l’encontre de notre métier. Celle-ci ne fait qu’opposer le monde rural au monde citadin ;
- les agriculteurs rappellent leur opposition au procédé de faire clôturer les rivières et cours d’eau : le bon sens paysan suffit pour entretenir la nature et l’environnement. Les bovins et les ovins ne sont pas néfastes à cet entretien, au contraire, ils y contribuent largement en évitant l’enfrichement, qui serait provoqué par la pose de clôture ;
- la Bretagne peut-elle, doit-elle nous donner des conseils pour préserver la qualité de notre eau quand on sait que la Saône-et-Loire peut se targuer d’être le 2e département français ayant la meilleure qualité d’eau potable ? ;
- le Morvan est une zone verte, touristique, attrayante… Souhaiter en faire un sanctuaire serait une erreur : comment dans ce cas les agriculteurs pourraient-ils développer leurs activités, développement nécessaire alors que leurs revenus sont déjà très bas ?

Un atout, pas une contrainte !


Comme l’ont rappelé avec force les agriculteurs présents, l’agriculture est un atout majeur de cette région du Morvan où l’on peut difficilement faire autre chose. « C’est pourquoi, il est important que notre avis soit pris en compte », ont-ils insisté.
La grande majorité des cours d’eau n’a pas besoin d’être clôturée. Ceux qui en ont besoin, pour la plupart, le sont déjà. Pour les travaux restant à faire, il n’y a pas besoin de décret ou d’arrêté public pour les réaliser !
Les échanges se sont poursuivis avec le président du parc, notamment sur les sujets suivants :
- le risque réel d’enfrichement des berges, que la clôture des cours d’eau fait peser, alors que l’usage des herbicides est interdit à proximité de ces mêmes cours d’eau… ;
- l’accès qui sera rendu plus difficile pour les pêcheurs, mais aussi pour la faune sauvage ;
- plus grave, le fait de clôturer les berges risque d’en faire de véritables refuges pour certains nuisibles, dont certains sont porteurs de maladies tant pour les humains que pour les animaux : les ragondins avec la leptospirose…
Quant à l’entretien des berges et la lutte contre l’érosion, ne vaudrait-il pas mieux responsabiliser les différents acteurs d’un territoire par la prise de conscience de situation plutôt que de "normer" au nom de l’intérêt publique en généralisant les problématiques qui ne sont parfois que locales ou régionales ?
« L’agriculteur a toujours été, est et sera forcément l’observateur privilégié de la nature parce qu’il vit à ses côtés et s’adapte à ses humeurs depuis toujours », ont rappelé les agriculteurs pour qui « les meilleures règles à prôner sont l’humilité, l’observation, le pragmatisme et s’adapter avec bon sens à ce que la nature veut bien nous autoriser à faire ».
Sans oublier que la clôture des cours d’eau pourrait être source de conflits entre propriétaires et fermiers…
Bref, ce projet laisse craindre une démarche volontaire qui pourrait se transformer en contraintes soumises à terme à conditionnalité. C’est pourquoi, la profession a demandé à ce que la chambre d’agriculture, la FDSEA 71 et les JA 71 soient destinataires des résultats de l’enquête publique.
Alors si le président du parc, Patrice Joly se disait prêt au dialogue (lire encadré ci-dessous), il conviendrait que les arguments de la profession soient, enfin, écoutés et que la profession soit prise au sérieux. Les faits parlent en sa faveur.
Mathilde Mary




Ne pas être montrés du doigt !


Le 13 septembre, une conférence à Glux-en-Glenne avait lieu à l’initiative du parc naturel régional sur le thème "Paysans, paysages". Une délégation de Saône-et-Loire s’y est rendue pour « prendre la température ». Elle en est ressortie avec un sentiment que la profession agricole est trop peu concertée alors qu’elle aimerait savoir comment elle peut travailler pour s’améliorer, ce qu’elle peut faire ou non…

« La Saône-et-Loire est le 2e département pour sa qualité d’eau potable, mais l’administration ne veut pas l’admettre. Le rapport paysan-parc est un vieux couple qui ne se parle plus, qui se dispute... », notait Fabrice Voillot, évoquant un article dans la presse relatant les propos d’Alain Delavot, ingénieur au parc, lesquels « ont mis le feu aux poudres. Cet article a été l’étincelle… ». « Vous parlez du ressenti des Morvandiaux, mais quel a été le ressenti des agriculteurs morvandiaux quand l’ingénieur du parc a traité les agriculteurs d’irresponsables dans la presse ? On nous colle l’image de destructeur de la nature alors que c’est l’agriculture par les paysages et par son respect de l’environnement qui attire ici les touristes », renchérissait Frédéric Brochot. « En lisant l’article, je me suis senti agressé. Si cet homme n’a pas cet avis si méchant sur l’agriculture et ses professionnels, il faut alors qu’il refasse un article sans tarder pour démentir », lançait à son tour Luc Jeannin.

Mais certains semblent avoir déjà jugé que la profession n’avait pas son mot à dire sur les sujets environnementaux… Une conception étonnante du dialogue, et une conception qui conduit tout droit au blocage.





Construire le Morvan de demain


Patrice Joly, président du parc, était venu « sans technicien pour dialoguer directement avec vous ». Il rappelait les raisons de son engagement : « je suis du Morvan et j’ai envie que mon territoire vive bien et se développe. Je veux regagner la fierté et la dignité de mon territoire ». « J’ai travaillé avant de m’engager et j’ai pris cette responsabilité il y a 3 ans car le territoire a besoin d’être représenté, on intervient sur les transports, les fermetures de classe, les besoins du territoire... Le budget est de 3.500.000 € pour 120 communes. Nous devons chercher des moyens pour le négocier en permanence, notamment avec les deux agences de l’eau ».

« L’activité agricole n’est pas polluante, elle est extensive, mais on peut améliorer la qualité de l’eau ». Et il citait en exemple des aménagements effectués à hauteur de 10 km environ et cela en accord avec les agriculteurs (clôtures, abreuvoirs, passages…) dans le Nord du Morvan. « Pour l’utilisation des fonds publics, il faut au préalable, une enquête publique, c’est un aspect formel, mais cela n’est pas obligatoire si l’agence Loire Bretagne finance sans recours aux fonds publics. C’est pourquoi, j’ai fait enlever cette enquête publique ».

Concernant la manifestation au siège du parc, elle a été relativement contenue, mais une « violence » a été perçue par les Morvandiaux. « On a besoin de réfléchir et de retravailler ensemble pour voir quelles perspectives on se donne, comment ensemble on essaye de se projeter en avant ».

« Pour ce qui est de votre sentiment de non reconnaissance de votre travail, il faut qu’on en parle », regrettait Fabrice Joly, avant de conclure en direction des agriculteurs : « il ne faut pas y être (NDLR dans les instances du parc) pour se défendre, mais pour construire ensemble le Morvan de demain ». Oui, mais dans un dialogue franc, loyal et respectueux !






Ils ont dit…


Olivier Nidiau (JA) : « aujourd’hui, il faut arrêter de rajouter des contraintes aux contraintes ! S’il faut de l’économie dans le parc, il faut de l’agriculture et la population agricole est vieillissante. Rajouter des contraintes n’encourage pas les jeunes à s’installer dans le parc. Aidez-nous plutôt que de nous enterrer ».

Jean-Philippe Nivost : « l’abattoir d’Autun est dans la zone, et aujourd’hui nous sommes arrivés à un stade où la commune s’engage à une nouvelle chaîne d’abattage sous certaines conditions et s’il y a des engagements forts de la part de la filière. L’association demande un engagement des acteurs de la filière pour que la Communauté de communes ne mette pas de l’argent pour rien, il faut que l’outil soit rentable. Pour cela, on a besoin du parc politiquement de la part des élus pour donner du dynamisme au territoire. Derrière le parc, il y a une image positive qui se cultive ».

Fabrice Voillot : « merci, monsieur Joly, de dire que la manifestation a été contenue, car ce n’est pas l’image qu’ont donnée les articles passés dans la presse ».

Michel Joly : « l’agriculture est l’atout du pays, ici, on ne peut pas faire grand chose d’autre que du mouton ou des vaches. C’est pourquoi il est important que les agriculteurs soient présents partout ».




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