Le machinisme atterrit
Le marché devrait nettement se replier en 2024, après trois années successivement record.

Les dirigeants du syndicat français des agroéquipements (Axema) ont fait un point de conjoncture, le 13 novembre à Paris devant la presse. Leur constat : « la conjoncture n’est pas favorable à l’investissement dans le matériel agricole ». Depuis l’automne 2023, l’excès de précipitations pénalise les productions végétales (céréales et viticulture en particulier) et pourrait déboucher sur une baisse du revenu agricole comprise entre 5 et 10 % cette année, avec un résultat possiblement négatif en céréales. De plus, les ventes de tracteurs et de machines agricoles « subissent le contrecoup des très bonnes années 2021 à 2023 » qui ont vu le chiffre d’affaires du secteur bondir de 50 % pour atteindre 9,11 milliards d’euros (Md€) – dont 30 % dus au renchérissement des matériels.
En 2024, les ventes de matériels sont prévues en baisse de 12 % à 8,045 Md€, dont 2,56 Md€ pour les tracteurs (- 12 %) et 4,085 Md€ pour les équipements agricoles (- 15 %). La France devrait immatriculer 23 100 tracteurs standards cette année (- 12 % sur un an), 2.600 tracteurs vignes et vergers (- 22 % et un niveau « historiquement bas »), 4.600 chargeurs télescopiques (- 12 %), 1 400 moissonneuses-batteuses (- 8 %), 2.800 presses à balles rondes (- 5 %) ou encore 260 ensileuses automotrices (+ 8 %). Les responsables d’Axema notent encore que « la diminution du marché est moins marquée dans les productions animales que végétales, moins marquée dans les Hauts-de-France que dans la Beauce. Les ventes de matériels d’élevage sont correctes à très bonnes dans le lait et le porc, alors que la pomme de terre ou le lin vont bien ».
Pas de retour aux prix de 2020
Chez les concessionnaires, le moral est en berne. « Les prises de commandes décrochent encore au 3e trimestre. En termes de prises de commandes, 2024 devrait être la pire [année] depuis 2010 ». La baisse des commandes atteint 37 % sur un an en septembre 2024 (- 13 % sur les neuf premiers mois de l’année). Apparaissent relativement épargnés les presses à balles carrées (- 5 %), les chargeurs frontaux (- 7 %), les tracteurs standards (- 10 % ; un repli qui épargne les puissances supérieures à 200 CV). C’est l’inverse pour les presses à balles rondes (- 26 %), les tracteurs vignes et vergers (- 24 %), les matériels de fenaison (- 23 %) ou les moissonneuses-batteuses (- 21 %). Une curiosité : la forte hausse des commandes d’ensileuses automotrices (+ 25 %), souvent acquises par des Cuma ou des entreprises de travaux agricoles.
La panne actuelle de commandes devrait se traduire par un nouveau repli du chiffre d’affaires du secteur au 1er semestre 2025 (il faut compter trois à six mois entre la prise de commande et la facturation, selon Axema). Un rebond est envisagé au 2e semestre 2025, « pourvu que l’été soit beau et les récoltes normales ». Sur l’ensemble de l’année prochaine, le chiffre d’affaires des agroéquipements se replierait à nouveau de 5 % (7,63 Md€). Mais pas de quoi désespérer la filière. Non seulement « il faut nourrir de plus en plus de personnes avec de moins en moins d’agriculteurs », mais encore « la relance sera stimulée par le renouvellement naturel du parc et l’arrivée de nouvelles technologies, renforçant la productivité des agriculteurs ». Cela étant dit, « on ne reviendra pas aux prix de 2019 », avertit Axema, dans la mesure où les coûts de production (acier, inox, main d’œuvre…) « ont augmenté de 30 % depuis 2020 ».