Accès au contenu
Semences de ferme

Le paiement de CVO fait réagir

Vingt ans après sa proposition, la loi Upov (Union de la protection des
obtentions végétales) de 1991 concernant les certificats d’obtention
végétale (COV), obligeant les utilisateurs de semences de fermes à payer
des droits de propriété intellectuelle aux sélectionneurs, a été votée
par l’Assemblée nationale dans la nuit du 28 novembre. Entre
satisfaction et indignation, les réactions du monde agricole sont
partagées.
Par Publié par Cédric Michelin
121499--Semis_Automne.JPG
La transcription de la loi Upov 1991 en droit français donne un cadre réglementaire clair à l’utilisation des semences de ferme, et permet de rémunérer les recherches effectuées par les sélectionneurs. Si selon le ministre de l’Agriculture, Bruno Le Maire, cette loi « permet de garantir l’indépendance de l’agriculture française et européenne, et favorisera sa compétitivité », les défenseurs de l’utilisation libre des semences de ferme sont mécontents.

Un flou juridique clarifié



« Le dispositif de certificat d’obtention végétale, concurrent du brevet, est beaucoup plus ouvert. Le certificat d’obtention végétale permet en effet d’utiliser une partie de la récolte pour ressemer son champ, alors que le brevet impose d’obtenir au préalable l’accord du semencier », a indiqué Bruno Le Maire. Selon lui, « cette loi sort ainsi les agriculteurs utilisateurs de semences de ferme de la situation d’incertitude juridique forte dans laquelle ils se trouvaient ». L’utilisation de semences fermières était jusque-là interdite pour les variétés protégées. Toujours selon le ministre, « le texte renvoie à des accords interprofessionnels le soin d’organiser les modalités de cette pratique, et notamment le reversement d’une indemnité aux semenciers pour les rémunérer de leurs travaux de recherche ». Cependant, il indique que pour les variétés non protégées, ce texte ne modifie en rien les droits des agriculteurs à ressemer leur champ avec une partie de leur récolte. Cette loi devrait aussi étendre l’obligation de payer une contribution volontaire obligatoire (CVO) sur 21 espèces, notamment les orges, l’avoine, le pois, le trèfle ou la luzerne. Pour le ministre de l’Agriculture, Bruno Le Maire, l’adoption de cette proposition de loi permet de conforter un modèle original de protection de l’innovation du monde végétal.

Des réactions partagées



Pour Xavier Beulin, président de la FNSEA, avec l’adoption de cette loi, « il en va de l’avenir de l’agriculture française à disposer d’un potentiel de semences et de génétique à la hauteur de ses ambitions en matière de compétitivité, de volume, de qualité et donc de revenu ».[WEB] Mais tous ne sont pas d’accord. Pour la Confédération paysanne, « cette loi va imposer une nouvelle taxe aux paysans ». « De plus, les semenciers auront la mainmise totale sur les semences, alors qu’actuellement ils ne fournissent que 50 % des volumes », affirme la Confédération paysanne. Du côté de la Coordination nationale pour la défense des semences fermières (CNDSF), on estime que cette loi a « toujours le même objectif, faire passer l’agriculteur par l’achat de semences ». Pour le Modef (confédération syndicale agricole des exploitants familiaux), membre de la CNDSF, cette loi « remet en cause un des droits fondamentaux et séculaires des paysans, qui est celui de pouvoir ressemer librement leur propre récolte ».[/WEB]
Le Gnis (Groupement national interprofessionnel des semences et plants) répond que cette loi « sécurise le financement de la recherche et donne aux sélectionneurs les moyens de développer durablement des programmes d’amélioration des plantes ». Le Gnis salue aussi le fait que la loi sur les COV « donne un cadre réglementaire à la pratique des semences fermières et permet de trouver un équilibre juste entre le droit des sélectionneurs et celui des agriculteurs-utilisateurs ». Reste à mettre en place les procédures de paiement de ces royalties, « une usine à gaz inapplicable » pour la CNDSF, « un nouveau cadre légal qui ouvre la voie à des accords équitables et durables entre obtenteurs et utilisateurs », selon l’Union française des semenciers (UFS).