Le Parlement européen oppose son veto à la proposition de Bruxelles sur les perturbateurs endocriniens
Le rejet par le Parlement européen du règlement sur les critères de définition des perturbateurs endocriniens, qui devait entrer en vigueur dès 2018, oblige Bruxelles à revoir sa copie. Mais la Commission européenne, qui aurait dû adopter ces critères depuis 2013, aura du mal à concilier les positions des Vingt-huit et des eurodéputés.

On croyait le dossier – enfin – bouclé lorsque la France avait accepté de faire volte-face et de soutenir la proposition de la Commission européenne sur la définition des perturbateurs endocriniens – moyennant un certain nombre d’adaptations du texte. Mais c’était sans compter sur le Parlement européen qui a rejeté (par 389 voix contre 235 alors qu’une majorité absolue de 376 voix était requise) le 4 octobre le règlement établissant des critères de définition des perturbateurs endocriniens dans les produits phytosanitaires proposé par la Commission. Cette définition avait fait l’objet d’un compromis entre Bruxelles et les États membres qui avaient donné leur feu vert définitif au texte le 28 septembre. Dans l’objection adoptée, les eurodéputés estiment que la Commission ne va pas assez loin notamment en permettant un certain nombre de dérogations.
En effet, le texte mis sur la table prévoit que les pesticides conçus comme des perturbateurs endocriniens pourront être commercialisés s’ils n’ont pas d’effet sur les organismes non cibles.
La Commission devrait présenter, sans qu’aucune date n’ait été fixée, une évaluation de ces critères et si nécessaire des dispositions spéciales concernant les perturbateurs « par conception ».
Dérogations
Mais la résolution, préparée par les eurodéputés Bas Eickhout (Verts, Pays-Bas) et Jytte Guteland (Socialistes, Suède) estime que la Commission a outrepassé ses compétences dans ce dossier. Elle se base sur un avis du service juridique du Parlement qui conclut que le dispositif de dérogations prévu par la Commission européenne dans le règlement sur les pesticides pour les perturbateurs endocriniens est illégal. Ce système aurait dû être introduit via une modification du règlement de base et non pas un acte délégué.
Le texte qui aurait dû entrer en vigueur début 2018 n’est donc pas adopté.
Le commissaire européen à la santé, Vytenis Andriukaitis, a immédiatement regretté l’issue du vote parlementaire estimant que ces critères « auraient assuré une meilleure protection de la santé humaine et de l’environnement et servi de tremplin à une stratégie plus large sur les perturbateurs endocriniens ».
Les organisations et coopératives agricoles de l’UE ont elles aussi déploré le résultat du vote : « Une fois de plus, les décisions politiques sur les pesticides l’ont emporté sur les décisions scientifiques. Les agriculteurs et les coopératives agricoles de l’UE ont besoin d’un cadre législatif fiable », a réagi le Copa-Cogeca.
« C’est une victoire inédite », se sont au contraire enthousiasmés les Verts du Parlement qui appellent la Commission européenne à revenir avec une nouvelle proposition sans dérogation.
La Commission va devoir reprendre les discussions sur ce dossier car elle a été condamnée en 2016 par un arrêt de la Cour de Justice de l’UE qui estime qu’elle aurait dû définir ces critères depuis décembre 2013.