Les exportateurs optimistes
l’Union européenne sont des producteurs de "bœuf sans hormones" : ils
sont minoritaires aux Etats-Unis. Néanmoins, ils sont optimistes et
attendent beaucoup du probable accord de libre-échange avec l’UE dont
les négociations ont commencé le 8 juillet.
L’Europe mal barrée !
Début 2013, Bruxelles a autorisé son utilisation, malgré l’opposition de plusieurs Etats membres, dont la France. Les États-Unis ne comptent pas en rester là et John Brook poursuit : « l’Union européenne est mal barrée, tant que les OGM et les hormones sont interdits. Elle est en train de s’isoler car le reste du monde les a acceptés ».
Voilà qui a le mérite d’être clair : les exportateurs de viande bovine aux Etats-Unis ont des objectifs précis et ne s’en cachent pas, rappelant que la demande mondiale en protéines animales est amenée à fortement augmenter. Et « nous sommes prêts », explique John Brook.
Des élevages XXL
« Les États-Unis sont le premier producteur, le premier importateur, le premier consommateur et le second exportateur de viande bovine au monde », poursuit-il. 700.000 éleveurs produisent de la viande bovine : tous les ans, c’est 10 millions de tonnes qui sortent ainsi des abattoirs américains. Dans une étude publiée en 2007, l’Institut de l’élevage précise qu’« alors que le troupeau allaitant est mené de façon extensive, sur les terres les moins productives, avec une taille modeste d’exploitations tenues en majorité par des pluriactifs, le secteur de l’engraissement est bien plus concentré ».
La filière américaine est connue pour ses immenses fermes d’engraissement, appelées feed-lots, un modèle qui s’est exporté en Australie, au Brésil ou encore en Afrique du sud. « Il y a environ vingt feed-lots de plus de 100.000 têtes dans le Middle West », précise John Brook. Vingt fermes gigantesques auxquelles il faudrait ajouter les centaines d’ateliers d’engraissement "plus petits" d’environ 10.000 têtes chacun…
Les animaux engraissés sont de races à viande : la hereford et l’angus. « Les États-Unis exportent les pièces arrière de qualité », rapporte John Brook. Pour l’alimentation, les rations alimentaires sont à base de soja et de maïs, tous les deux OGM. « Six camions tournaient en permanence dans les immenses allées du feed-lot pour remplir d’aliments les quinze kilomètres d’auges », se rappelle Jean-Pierre Fleury, secrétaire général de la Fédération nationale bovine (FNB), d’une visite à Denver dans le Colorado d’un feed-lot de 50.000 animaux parqués sur 100 hectares, fin 2012…
Des pieds d’argile
Mais le premier producteur mondial a aussi ses faiblesses. « Les Américains sont déficitaires en veaux dans leur filière d’engraissement. Ils importent du Mexique et du Canada », poursuit Jean-Pierre Fleury. En outre, ils importent de la viande bovine car ce qu’ils produisent ne correspond pas à la demande de leurs consommateurs. « 75 % de la viande bovine consommée, c’est du steak haché », explique John Brook.
Autre point : les éleveurs américains qui font du "bœuf sans hormones" sont isolés. « Nous n’avons pas de chiffres exacts, mais nous estimons que seuls 2 à 3% des éleveurs font de la viande bovine sans hormones », rapporte John Brook.
Au sein de l’Union européenne, l’utilisation d’hormones est interdite. Aux États-Unis, les éleveurs reçoivent une prime s’ils n’en utilisent pas. Cette minorité d’éleveurs principalement situés dans le Middle West a participé à remplir les quotas libres de droits de douanes pour exporter du bœuf de haute qualité (c’est-à-dire sans hormones) vers l’Union européenne. Ce quota est ouvert depuis 2009 et depuis le 1er juillet 2013, il s’élève à 48.200 tonnes. Les Etats-Unis remplissent 50 % du quota devant les Australiens (25 %) et les Uruguayens (25 %). Pour les Etats-Unis, les exportations de viande de bœuf de haute qualité sont passées de 2.000 tonnes en 2009 à 17.000 tonnes en 2013. Mais l’idée des Américains reste de parvenir à ouvrir les frontières européennes aux "bœuf aux hormones", lequel représente près de 95 % de la production américaine…
En viande porcine
Difficile d’exporter vers les Etats-Unis
L’embargo ESB américain sur la viande bovine européenne est toujours en vigueur. En filière porcine, les exportations sont autorisées, mais deux agréments sanitaires sont nécessaires. Celui délivré par la FDA (Food and drug administration) permet d’exporter des produits agroalimentaires contenant moins de 3 % de viande. « C’est l’agrément minimum à avoir pour exporter vers les États-Unis », explique Loïc Hénaff, directeur de la société Hénaff. Pour les produits agroalimentaires contenant plus de 3 % de viandes, un deuxième agrément délivré par l’USDA (ministère de l’Agriculture américain) est nécessaire. En 2003, 100 % des agréments français ont été perdus : « les relations diplomatiques entre les Etats-Unis et la France se sont refroidies suite au discours de Dominique de Villepin à l’ONU contre la guerre en Irak », selon une source proche du dossier. Entre 2003 et 2008, aucune société française n’est parvenue à récupérer ces agréments. Les droits de douane aux frontières américaines ont même parfois atteint 100 %. Ce n’est qu’en 2009 que le groupe Hénaff est parvenu à obtenir de nouveau ces agréments pour exporter vers les Etats-Unis. C’est d’ailleurs la seule entreprise française agréée depuis 2009 pour exporter des produits agroalimentaires à base de viande. D’autres groupes ne les ont toujours pas récupérés. Pour obtenir ces agréments, Loïc Hénaff souligne que « c’est comme un examen, il faut travailler pour l’avoir ».