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Producteurs de céréales

Les producteurs de céréales ont le sentiment d'être abandonnés...

"La France abandonne-t-elle ses céréaliers ?". La question est quelque peu provocatrice, mais elle reflète un sentiment bien présent chez les producteurs. L’AGPB apporte des points de réflexion.

Les producteurs de céréales ont le sentiment d'être abandonnés...

Si l’on compare les soutiens de la Pac que chaque Etat membre alloue aux céréaliers par le biais des différentes options mises en œuvre dans le cadre d’une subsidiarité croissante depuis dix ans, force est de constater que les options stratégiques sont fondamentalement différentes. Les derniers Etats rentrés dans l’Union européenne (UE) bénéficient d’un soutien à l’hectare harmonisé sur tout leur territoire qui est appelé à augmenter et converger vers la moyenne européenne dans le cadre européen de la convergence externe. D’autres pays comme l’Allemagne ont également choisi de simplifier la distribution des aides directes en harmonisant les soutiens du 1er pilier entre länder ou entre production. Pour échapper au plafonnement des aides des grandes exploitations situées dans ses régions orientales, l’Allemagne a opté pour un paiement re-distributif symbolique qui épargnait en même temps les exploitations bavaroises fondées sur la pluriactivité. Des choix qui illustrent la volonté de ces Etats membres de placer leurs producteurs de compétitivité optimale.

Des choix opposés…

Dans ce concert, « la France a fait des choix très différents », déplore l’AGPB, l’association générale des producteurs de Blé et autres céréales.

Et de rappeler que, depuis près de dix ans, les arbitrages français ont contribué à transférer les soutiens de la Pac aussi bien au sein de 1er pilier vers les surfaces en herbe (création d’un DPU herbe, paiement redistributif optimisé pour les Gaec d’élevage, augmentation des paiements couplés distribués à 90 % pour l’élevage herbivore…) qu’au sein du 2e pilier, (fusion de la prime à l’herbe dans l’ICHN, revalorisation de 30 % de l’ICHN, transfert du 1er vers le 2e pilier pour suppléer le cofinancement national non budgété des arbitrages précédents…).

« Il appartiendra aux macro-économistes de juger de la pertinence de ces transferts massifs de deux fois 1 milliard d’€ au regard de l’évolution des revenus des producteurs de ces secteurs, mais en ce qui concerne les "banquiers" du système que sont les céréaliers français, l’addition est dramatique. Si l’on rajoute à ce constat, l’absence de soutien en provenance du 2e pilier pour les céréaliers français (contre 30 à 40 € supplémentaires par ha en Allemagne pour soutenir les énergies renouvelables sources de revenus complémentaires), l’écart s’accroît ! ».

Situation critique…

La diminution drastique de leurs soutiens (total du 1er et 2e pilier, baisse de 40 %, voire de moitié en zones intermédiaires contre seulement -13 % en Allemagne) place désormais les céréaliers français en situation fragile en termes de compétitivité au regard de leurs homologues européens, alerte l’AGPB.

Ramené à la tonne de blé, le niveau des soutiens des céréaliers français est désormais inférieur à 30 €/t, voire 25 € en zones intermédiaires, quand il se stabilise à 40 €/t en Allemagne ou plus de 45 €/t en Roumanie, selon l’AGPB, pour qui « cela s’appelle une distorsion de concurrence de plus de 15 €/t créée par la France, elle-même ! Les céréaliers français se sentent abandonnés par leur gouvernement ».

Mise en garde

« Une partie de ces choix incompréhensibles quand les revenus des céréaliers sont les plus faibles du monde agricole pourrait toutefois encore être corrigée dès les prochains mois », avance l’AGPB pou qui « la France doit choisir de corriger la notification qu’elle a faite avec le Gouvernement précédent qui va encore alourdir le prélèvement re-distributif - en le portant à 20 % ! - sur des céréaliers aux trésoreries exsangues ».

Et l’AGPB de marteler qu’il est temps de stopper la chute et d’inverser la tendance : « aucun céréalier français ne devrait percevoir moins de 250 €/ha, soit la moyenne européenne, pour ne pas souffrir de distorsion de concurrence insoutenable. Revenir au 1er août 2018 à 5 % de prélèvement re-distributif et corriger les soutiens trop faibles, notamment en zones intermédiaires reste la solution de survie pour de trop nombreux céréaliers ».