Les secrets d’un bon colostrum
Le 11 avril, devant un groupe d’adhérents réunis au siège du groupement à Vitry-en-Charollais, l’équipe technique de Charolais Horizon a présenté les résultats de son travail. La journée était animée par Pierre-Antoine Comte, responsable technique, assisté de Fabien Langlois, étudiant en licence professionnelle en charge de l’étude (1). Intervenait également Guillaume Forgeat, vétérinaire (2), qui a suivi le protocole.
Durant la dernière campagne de vêlages, un peu plus de 200 échantillons de colostrum issus de 37 élevages adhérents de Saône-et-Loire ont ainsi été collectés par l’équipe technique de Charolais Horizon. Ces échantillons ont tous été analysés pour en mesurer leur qualité.
Soigner les vaches taries
En s’appuyant sur ces résultats, Pierre-Antoine Comte, Fabien Langlois et Guillaume Forgeat ont dressé un inventaire des préconisations permettant d’optimiser la qualité du colostrum et son efficience. Comme le démontre l’étude, les élevages dont les colostrums sont les plus riches soignent davantage l’apport de concentrés à leurs vaches et leur distribuent quotidiennement des minéraux. Les animaux sont vaccinés, déparasités.
Clairement, la qualité du colostrum s’anticipe par une préparation de la vache en amont, expliquait Guillaume Forgeat. Ce dernier recommande notamment de ne pas négliger la phase de tarissement (trois semaines avant le vêlage) suivie des trois semaines suivantes, soit les six semaines qui composent la période "peripartum”. Une période particulière puisqu’elle correspond à deux états physiologiques très différents, signalait le vétérinaire qui indique aussi que la synthèse colostrale débute 3 à 6 semaines avant le vêlage.
Ration adaptée
Du fait d’une capacité d’ingestion réduite et des besoins du fœtus, la vache en gestation est en déficit énergétique. Ce qui justifie de soigner la ration avant vêlage, explique Guillaume Forgeat. Un impératif qui nécessite une connaissance de la qualité des fourrages (via des analyses), des investissements en concentrés le cas échéant et un calcul de ration adéquat, préconisaient les intervenants. Le démarrage de la lactation provoque une forte fluctuation de la calcémie, poursuivait le vétérinaire. D’où la nécessité impérative de maîtriser la “BACA” au moment du vêlage, recommandait-il. Autre spécificité de la période “peripartum”, la vache subit une chute d’immunité au moment du vêlage. Une cure d’oligo-éléments est alors indispensable (sélénium, cuivre, zinc, vitamine E).
« Il est très important de gérer le statut immunitaire du troupeau », recommandait par ailleurs Guillaume Forgeat qui encourage à vacciner tout le troupeau reproducteur (IBR, BVD, diarrhée des veaux, FCO).
Prise rapide et massive de colostrum
Le colostrum doit être ingéré par le petit veau le plus vite et le plus abondamment possible, idéalement en une seule prise, recommandaient les intervenants. Il est conseillé de s’assurer de la bonne prise colostrale en surveillant la température du veau, sa glycémie. Une prise de sang permet éventuellement de déceler une mauvaise absorption intestinale. Pour pallier à toute déficience, il est recommandé de disposer d’une banque de colostrum au congélateur. Le colostrum congelé a l’avantage d’être adapté au parasitisme de l’élevage, argumentait Guillaume Forgeat. La décongélation la plus appropriée se fait au bain-marie à 40°C (plutôt qu’au four à micro-ondes), à raison d’une heure pour un demi-litre, recommandait le vétérinaire.
Et bien s’occuper du jeune veau…
Au-delà de la prise colostrale, il est important « de bien s’occuper du jeune veau », rappelait Guillaume Forgeat. « Le jeune veau est un pré-ruminent. Il faut lui apporter de la fibre dès 15 jours d’âge ainsi qu’un complémentaire, de l’eau et du sel, de quoi faire un bon rumen pour partir au pré ». A la mise à l’herbe, le vétérinaire recommandait l’administration d’un bolus d’oligo-éléments et les vaccinations adéquates. Les conditions d’hygiène sont importantes. Désinfection des cordons, maîtrise de la pression infectieuse des bâtiments, périodes de reproduction, vaccinations… sont autant d’aspects à maîtriser, recommandait encore le praticien.
(1) Etudiant en licence professionnelle, Fabien Langlois a supervisé cette étude au sein de Charolais Horizon dans le cadre de son apprentissage avec la chambre d’agriculture de l’Aveyron.
(2) Du groupe vétérinaire Univet Digoin Gueugnon.
Colostrum
La nature fait bien les choses !
Le colostrum est une sécrétion qui s’accumule pendant les six dernières semaines de gestation. Il est excrété par la mamelle pendant les six premiers jours après le vêlage. En pratique, il correspond au produit de la première, voire de la seconde traite. Son rôle premier est la transmission de l’immunité au petit veau qui nait dépourvu de système immunitaire. Le colostrum lui fournit ses premiers anticorps pour se défendre contre les maladies du veau. Il a aussi un rôle nutritionnel et énergétique essentiel en apportant vitamines, minéraux, oligo-éléments, facteurs de croissance, lipides… tous indispensables au développement du petit veau. Le colostrum lui donne la force de se relever, de téter… La teneur en matière protéique du colostrum est 4 à 5 fois plus élevée que celle du lait. 30 à 40 % de cette matière protéique est constitué de globulines et notamment les immunoglobulines (IgG) qui sont des anticorps. La qualité du colostrum est liée à la quantité d’IgG qu’il contient. L’unité utilisée pour mesurer cette qualité est le “BRIX”. Elle se mesure de différentes manières (pèse colostrum, colostro balls, réfractomètre optique, réfractomètre numérique, immuno diffusion radiale). Effectuée en laboratoire, l’immuno-diffusion radiale est la méthode de mesure de référence. Utilisable en élevage et peu onéreux, le réfractomètre optique est à la portée d’une exploitation. C’est la méthode qui a été utilisée par Charolais Horizon dans son étude.
Un bon colostrum devrait avoir une valeur de plus de 26 BRIX. Une telle teneur d’anticorps équivaut à une prise de colostrum d’environ deux litres, ingérée en une seule fois, dans les six premières heures de vie du veau. La prise de colostrum doit être rapide, massive et si possible non fractionnée car la concentration en anticorps chute au fil des heures. De plus, la barrière intestinale du petit veau ne reste perméable que durant 24 heures et cette perméabilité diminue au fil des heures. Quantité et qualité sont les maitres mots de la prise colostrale.