Lors de l'AG des JA de BFC, il fut question de la formation initiale et donc de l'enseignement agricole
Les JA de Bourgogne Franche-Comté se sont réunis le 13 avril à Château-Chinon en assemblée élective. Au menu, une séance de remue-méninges sur l’adaptation de la formation initiale à l’agriculture de demain et l’élection d’une nouvelle équipe.

Vaste et complexe sujet que celui de la formation initiale en agriculture. Ils étaient six à en débattre lors de la table ronde organisée lors de l’assemblée générale des JA de BFC, le 13 avril au lycée agricole de Château-Chinon. Un panel de professionnels et d’experts qui a enrichi les réflexions.
Les avancées technologiques, les exigences économiques et le contexte réglementaire font évoluer le contenu des formations initiales, mais est-ce suffisant ? L’enseignement agricole représente une "exception", par son rattachement direct au ministère de l’Agriculture et la forte implication des professionnels. L’offre pédagogique est conséquente (Capa, BPA, Bac pro, BTSA...) et la répartition territoriale permet de se tourner vers des établissements publics, associatifs ou privés. C’est ainsi qu’Hubert Martin, chef du service régional de la formation de la Draaf, a planté le décor, valorisant « un outil de formation diversifié, répondant aux spécificités et aux besoins des territoires, bien positionné et étalonné ». Pourtant, la formation initiale agricole se trouve confrontée à de nouvelles problématiques (sociétales, économiques, agronomiques...) qui exigent une réactivité difficile à concilier avec l’évolution plus lente des référentiels et de la pédagogie. Comment, dès lors, mieux préparer les élèves aux responsabilités et aux choix auxquels ils seront confrontés dès leur installation ? La réponse n’est pas simple, alors que la balle n’est pas dans le seul camp de l’institution, l’élève doit aussi la saisir au bond.
Une complexité croissante
Directeur du lycée agricole du Morvan, Frédéric Guillot relève d’abord « la plus grande complexité d’un métier où la technicité ne suffit plus. Il faut développer d’autres compétences, en économie, en comptabilité et surtout atteindre un certain niveau de maturité », ce qui n’est pas facile pour des adolescents. Le lycée du Morvan ne disposant pas d’une ferme intégrée, l’équipe pédagogique s’appuie très largement sur des exploitations partenaires. « Ces mises en situation leur permettent d’évaluer concrètement les conséquences économiques de certaines décisions », complète le directeur. Mais, « on ne peut pas tout attendre de l’école », et l’élève doit s’impliquer au même titre que l’enseignant.
Le témoignage de Nicolas Sarthon, des JA national, va dans ce sens. Evoquant une scolarité plutôt détendue et insouciante, ce dernier s’est trouvé confronté à l’épreuve du mur dès son installation. Les difficultés lui ont mis du "plomb dans la tête", mais il regrette de n’avoir pas su mobiliser suffisamment ses apprentissages scolaires en passant du virtuel au réel.
Les établissements d’enseignement agricoles disposent d’une marge de manœuvre de 10 % hors du cadre obligatoire. Le lycée l’a mise à profit pour développer « des systèmes de pilotage virtuel », à partir de micro-entreprises animées et gérées par les élèves. Mais le contexte évolue rapidement, constate Frédéric Guillot et la capacité d’adaptation des structures d’enseignement reste limitée. De même, « le fractionnement des apprentissages n’est pas toujours compatible avec une vision plus systémique des systèmes d’exploitation actuels, plus complexes à gérer ».
La maturité en question
La salle n’a pas manqué de relever un paradoxe avec, d’une part, un manque de maturité flagrant des futurs jeunes diplômés et, d’autre part, une réforme du bac Pro qui a accentué ce fossé générationnel. Cédric Bernier, jeune vice-président du lycée du Morvan, voit une solution dans la poursuite des études, un moyen d’enrichir ses connaissances et surtout de prendre le temps de gagner en maturité.
« Chaque décision a un impact économique ». Pour le comprendre, il faut prendre du recul, aller voir ailleurs, se confronter à d’autres systèmes, loin de la ferme familiale, y compris sous d’autres latitudes...
Même si elle reste perfectible, la formation initiale porte ses fruits, analyse Bénédicte Bracq : 96 % des jeunes qui sont passés par le PPP (Plan de professionnalisation personnalisé) sont encore en activité bien des années plus tard. Plus encore, les nouveaux porteurs de projets cherchent à améliorer le système, à faire preuve de créativité... D’où « l’importance avant de se lancer de prendre le temps d’acquérir de l’expérience ailleurs, de mûrir, de se confronter à la réalité et aux risques du métier ». Au-delà des aspects techniques et économiques, il est tout aussi essentiel de travailler sur « le versant sociétal de l’activité agricole ». Du fait de son expérience, Nicolas Sarthon ne peut que confirmer que « la maturité vient avec les premières épreuves, cela change le regard et on prend les virages nécessaires ». Il souhaite cependant que la formation initiale intègre « plus d’économie, de gestion, d’ouverture sur le monde, sur les nouvelles pratiques et les tendances de fond... ». Ainsi Frédéric Guillot encourage-t-il « à saisir toutes les opportunités dans les formations initiales actuelles, car la force de l’enseignement agricole, c’est justement sa capacité à innover, à prendre des risques. A force de petits pas, on avance » dans la bonne direction.
A.-M. K.
Lors de l'AG des JA de BFC, il fut question de la formation initiale et donc de l'enseignement agricole

Vaste et complexe sujet que celui de la formation initiale en agriculture. Ils étaient six à en débattre lors de la table ronde organisée lors de l’assemblée générale des JA de BFC, le 13 avril au lycée agricole de Château-Chinon. Un panel de professionnels et d’experts qui a enrichi les réflexions.
Les avancées technologiques, les exigences économiques et le contexte réglementaire font évoluer le contenu des formations initiales, mais est-ce suffisant ? L’enseignement agricole représente une "exception", par son rattachement direct au ministère de l’Agriculture et la forte implication des professionnels. L’offre pédagogique est conséquente (Capa, BPA, Bac pro, BTSA...) et la répartition territoriale permet de se tourner vers des établissements publics, associatifs ou privés. C’est ainsi qu’Hubert Martin, chef du service régional de la formation de la Draaf, a planté le décor, valorisant « un outil de formation diversifié, répondant aux spécificités et aux besoins des territoires, bien positionné et étalonné ». Pourtant, la formation initiale agricole se trouve confrontée à de nouvelles problématiques (sociétales, économiques, agronomiques...) qui exigent une réactivité difficile à concilier avec l’évolution plus lente des référentiels et de la pédagogie. Comment, dès lors, mieux préparer les élèves aux responsabilités et aux choix auxquels ils seront confrontés dès leur installation ? La réponse n’est pas simple, alors que la balle n’est pas dans le seul camp de l’institution, l’élève doit aussi la saisir au bond.
Une complexité croissante
Directeur du lycée agricole du Morvan, Frédéric Guillot relève d’abord « la plus grande complexité d’un métier où la technicité ne suffit plus. Il faut développer d’autres compétences, en économie, en comptabilité et surtout atteindre un certain niveau de maturité », ce qui n’est pas facile pour des adolescents. Le lycée du Morvan ne disposant pas d’une ferme intégrée, l’équipe pédagogique s’appuie très largement sur des exploitations partenaires. « Ces mises en situation leur permettent d’évaluer concrètement les conséquences économiques de certaines décisions », complète le directeur. Mais, « on ne peut pas tout attendre de l’école », et l’élève doit s’impliquer au même titre que l’enseignant.
Le témoignage de Nicolas Sarthon, des JA national, va dans ce sens. Evoquant une scolarité plutôt détendue et insouciante, ce dernier s’est trouvé confronté à l’épreuve du mur dès son installation. Les difficultés lui ont mis du "plomb dans la tête", mais il regrette de n’avoir pas su mobiliser suffisamment ses apprentissages scolaires en passant du virtuel au réel.
Les établissements d’enseignement agricoles disposent d’une marge de manœuvre de 10 % hors du cadre obligatoire. Le lycée l’a mise à profit pour développer « des systèmes de pilotage virtuel », à partir de micro-entreprises animées et gérées par les élèves. Mais le contexte évolue rapidement, constate Frédéric Guillot et la capacité d’adaptation des structures d’enseignement reste limitée. De même, « le fractionnement des apprentissages n’est pas toujours compatible avec une vision plus systémique des systèmes d’exploitation actuels, plus complexes à gérer ».
La maturité en question
La salle n’a pas manqué de relever un paradoxe avec, d’une part, un manque de maturité flagrant des futurs jeunes diplômés et, d’autre part, une réforme du bac Pro qui a accentué ce fossé générationnel. Cédric Bernier, jeune vice-président du lycée du Morvan, voit une solution dans la poursuite des études, un moyen d’enrichir ses connaissances et surtout de prendre le temps de gagner en maturité.
« Chaque décision a un impact économique ». Pour le comprendre, il faut prendre du recul, aller voir ailleurs, se confronter à d’autres systèmes, loin de la ferme familiale, y compris sous d’autres latitudes...
Même si elle reste perfectible, la formation initiale porte ses fruits, analyse Bénédicte Bracq : 96 % des jeunes qui sont passés par le PPP (Plan de professionnalisation personnalisé) sont encore en activité bien des années plus tard. Plus encore, les nouveaux porteurs de projets cherchent à améliorer le système, à faire preuve de créativité... D’où « l’importance avant de se lancer de prendre le temps d’acquérir de l’expérience ailleurs, de mûrir, de se confronter à la réalité et aux risques du métier ». Au-delà des aspects techniques et économiques, il est tout aussi essentiel de travailler sur « le versant sociétal de l’activité agricole ». Du fait de son expérience, Nicolas Sarthon ne peut que confirmer que « la maturité vient avec les premières épreuves, cela change le regard et on prend les virages nécessaires ». Il souhaite cependant que la formation initiale intègre « plus d’économie, de gestion, d’ouverture sur le monde, sur les nouvelles pratiques et les tendances de fond... ». Ainsi Frédéric Guillot encourage-t-il « à saisir toutes les opportunités dans les formations initiales actuelles, car la force de l’enseignement agricole, c’est justement sa capacité à innover, à prendre des risques. A force de petits pas, on avance » dans la bonne direction.
A.-M. K.