Magie de la Bourgogne
Ce Champenois (Moet et Chandon, CIVC, INAO...) félicitait les Bourguignons pour l'accueil "magique pour les étrangers, que de passer une soirée au Clos de Vougeot", saluant ainsi au passage l'excellence des nombreuses visites de domaines effectuées pendant deux jours.
Interrogé sur le réchauffement climatique, Yves Bénard démontrait toute l'importance du travail sur "le protocole de calcul des gaz à effet de serre (GES) et sur le bilan carbone". Apparemment, à ce stade des échanges, les experts s'orienteraient sur un calcul uniquement axé sur la production de la vigne, et non, des apports à la vigne jusqu'à la commercialisation. Cette perspective de calcul aurait pu être pénalisante en terme de commerce international. Pire pour les viticulteurs bourguignons, ils auraient sérieusement dû songer à embouteiller sur le lieu ou pays de consommation. Impensable pour des vins AOC !
Plus stratégique encore peut-être, le président précisait vouloir "un système un peu plus généreux pour l'agriculture avec une méthode spécifique à la vigne car on sait qu'elle capte du carbone". Des enjeux économiques importants avec prochainement le développement des bourses carbones et des crédit carbones, suite au protocole de Kyoto. "Nous ne faisons pas de philosophie et le protocole devrait être voté au mois de juin" prochain.
Blocage sur les vins bio
Des échanges qui se veulent constructifs mais qui peuvent parfois "être en panne", comme le reconnaissait Yves Bénard. "On n'arrive pas à aller en étape 3 (sur un total de sept) pour les vins bio ou organic wines", se lamentait le président. "Je ne peux pas présenter un texte de travail, avec l'Australie notamment, qui achoppe sur les questions de SO2 tolérés", regrettait-il. Un débat laissant peu d'espoir de voir rapidement des vins étiquetés bio, avec donc toujours en France seulement des vins "issus" de l'Agriculture biologique. Des divergences existant aussi sur la désalcoolisation des vins, partielle ou totale (en dessous de 0,5 degré d'alcool) posant la question de la "définition même du vin", s'interrogeait le président du BIVB, Michel Baldassini.
Heureusement, d'autres dossiers avancent. Le problème de l'eau, des cépages ou les itinéraires techniques... préoccupants avec le réchauffement climatique. L'OIV cherche à "harmoniser les normes" internationales et ainsi "éviter des distorsions de concurrence". Problème récurrent, les Etats-Unis ne font pas partie de l'OIV. Des Américains qui "vont revenir" mais "pas à court terme". Par contre, la Chine et l'Inde se rapprochent pour adhérer et devenir membre de l'OIV. Autant dire, des poids lourds de l'économie mondiale qui pèseront demain sur les experts échangeant autour des biotechnologies actuellement.
Pour l'heure à Beaune, les experts ont "commencé à mettre des définitions sur ce qu'on entend par PGM (plante génétiquement modifiée) en viticulture, pour la vinification et pour les auxiliaires de vinification", détaillait Yves Bénard. Un principe de précaution semble d'ores-et-déjà se constituer pour "un greffon GM. Mais quid d'un porte-greffe ? remarquait-il. "La vigne est-elle considérée comme OGM dès-lors?" Des questions cruciales, tant idéologiques qu'économiques. "La génomique pourra peut-être dire demain si justement un porte-greffe modifié génétiquement exprime des différences sur le greffon ou la vigne". Des questions auxquelles les scientifiques n'ont pas fini de chercher des réponses aux polémiques, bouleversant le commerce et les pratiques. Les experts de l'OIV avaient donc bien droit à quelques moments magiques en Bourgogne...
Un vigoureux plaidoyer en faveur des droits de plantation
La venue de l'OIV a certainement aussi été l'occasion d'insister sur le récent rapport de Catherine Vautrin, députée de la Marne, à qui le ministre de l’Agriculture avait confié en janvier 2010 une mission sur la régulation du marché viticole. Elle se prononce pour le maintien des droits de plantation dans le secteur viticole. On sait que les ministres de l’Agriculture des Vingt-sept ont avalisé en 2007 l’abandon des droits de plantation au 31 décembre 2015. Avec possibilité pour les pays qui le souhaitent de les maintenir trois ans de plus jusqu’au 31 décembre 2018.
Les conclusions de Catherine Vautrin sont sans appel. « Les droits de plantation évitent des plantations anarchiques en période d’euphorie », souligne-t-elle dans son rapport. En précisant que « la régulation n’a pas empêché le développement des marchés et l’installation de nouveaux entrants ». Contrairement à ce que laisse croire la Commission européenne. Aussi préconise-t-elle une interdiction de plantations nouvelles pour l’ensemble des vignobles européens, aussi bien pour les vins AOP, IGP que les vins sans indication géographique. Ainsi qu’une gestion des droits par les Interprofessions. Un principe d’interdiction assorti d’exceptions pour d’éventuelles plantations nouvelles, si nécessaire.
Cette position a été accueillie très favorablement par la Confédération nationale des appellations d’origine contrôlée (Cnaoc) ; « il faut maintenir le système des droits de plantation au niveau communautaire et sur toutes les catégories de produits. Le maintenir ou plutôt le réintroduire car il s’agit bien de revenir sur la décision du Conseil des ministres qui a entériné leur disparition progressive lors de la dernière OCM », insiste-t-elle.
Et de souhaiter que le Gouvernement s’empare des travaux parlementaires réalisés pour s’engager fermement sur le principe du maintien des
droits de plantation. Elle attend du président de la République un engagement aussi clair que celui de la Chancelière Angela Merkel et insiste sur la nécessité que le ministre de l’Agriculture se mobilise pour convaincre ses homologues européens. « L’objectif, souligne-t-elle, est de construire un front commun des pays producteurs pour constituer une minorité de blocage et obliger la Commission à faire des propositions». A ce jour, seul un pays, l’Allemagne, a pris une position forte sur le sujet.