Ne pas soustraire carottes et choux
Christian Huygue, voyait en la recherche d’innovations « un moteur de
développement à optimiser ». Il invitait surtout à relativiser « ce
qu’est un bon indicateur d’impact ». Ce qui ne manquait pas de soulever quelques polémiques...
Directeur du Pôle Technique & Qualité du BIVB, Jean-Philippe Gervais revenait sur le diagnostic de la viticulture durable réalisé par l’Interprofession il y a deux ans. « Avec un IFT moyen de 16, tombé à 10 en 2011, sans une stratégie de lutte pertinente, en 2012, il n’y aurait pas eu de production de vin ». Surtout, qu’une « bonne solution dans le Mâconnais n’est pas forcément la bonne dans le Chablisien ». Il insistait donc sur le fait de devoir « mieux gérer les compétences en réfléchissant à l’accès à la formation » pour les vignerons comme pour leurs salariés. C'est un des principaux objectifs du vinipôle justement.
Bio et oenotourisme mis en cause
Après une question de la salle sur le bilan carbone de la viticulture, et celui des bio en particulier, on comprenait toute la problématique d’avoir de « bons indicateurs » environnementaux. « Le lourd bilan carbone de la filière vient principalement des déplacements : passage dans les vignes mais aussi l’oenotourisme, les expéditions, les déplacements de personnels… ce n’est pas un jugement de valeur en soi et les exploitations peuvent chercher à réduire le poids des bouteilles, grouper les expéditions de vins à l’échelle d’un village… ».
Son collègue, Gaspar Desurmont rebondissait et dressait un panorama des initiatives de viticulture durable qui « depuis 1968 » montre que « les autres vignobles (Chili, Australie, Nouvelle-Zélande…) travaillent sur leurs faiblesses » pour mieux communiquer sur leur progrès sur les marchés internationaux. Soutenable depuis plusieurs millénaires, la Bourgogne n’a rien d’aussi spectaculaire à "vendre" ou à "corriger" comme déréglement, du fait de son "respect" historique du terroir et de son territoire.
Du marketing vert à une gestion pluriannuelle
Christian Huygues critiquait discrètement le marketing vert (voir green washing) qui essaye de « faire passer les consommateurs d’une histoire de tradition à celle d’un développement durable. Problème, tout le monde revendique et il devient illisible ». Il insistait donc pour que la profession bourguignonne se replonge dans sa « trajectoire longue » sans être happé par « l’immédiateté ». C'est le sens du Plan Bourgognes Amplitude 2015 du BIVB. En clair, pour les exploitations, « passer d’une vision annuelle à une gestion pluriannuelle », y compris en matière d’impôts, glissait-il.
En effet, les viticulteurs - moins nombreux mais plus performants - ont des exigences sur la rentabilité pour pérenniser leur travail. Cette « aversion au risque » a tendance à figer les pratiques. Comme par exemple à travers les cahiers des charges qui permettent certes « de protéger un marché » mais aussi empêchent d’intégrer « toutes les innovations techniques imaginables ».
Du coup, le pilotage des exploitations s’articule autour de choix à court, moyen et long termes : du génotype, du travail du sol, de la taille, de la fertilisation, des traitements phyto… Le conseil porte alors sur des préconisations. Christian Huygues voudrait que demain, le conseil porte plutôt sur des décisions stratégiques avec des informations qualifiées et certifiées. C'est aussi ça, le sens des travaux du Vinipôle.