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Relance ovine

Passer à la vitesse supérieure

Autrefois délaissée, la production ovine est redevenue attractive. Bon élève en terme de reconquête, la Saône-et-Loire compte trois à quatre installations nouvelles chaque année. Mais du fait des nombreux départs en retraites qui se profilent, il va falloir passer à la vitesse supérieure. Tant en termes de vocations que de technicité.
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Le 11 janvier dernier sur le site du Pôle régional ovin de Charolles, dans la foulée de l’assemblée générale de la section ovine de la FDSEA (lire notre édition du 18 janvier dernier en page 7), la chambre d’agriculture organisait une réunion destinée à promouvoir la production ovine auprès des jeunes et des moins jeunes.
Comme le rappelait en introduction la responsable Ovins à la chambre d’agriculture Michelle Michel, « il y a plusieurs raisons de promouvoir la production ovine aujourd’hui. D’abord un manque d’agneaux en France où nous produisons moins de 50 % des agneaux consommés. Il y a aussi les prix de vente plus attractifs que par le passé et le rééquilibrage des aides Pac qui met les ovins sur un même pied d’égalité que d’autres productions ». La progression du revenu a rendu le métier de moutonnier plus attractif. Tant mieux, car il va y avoir besoin de sang neuf pour compenser les nombreux départs en retraite à venir.
Et puis la production ovine a d’autres atouts, comme le fait de demander moins de capitaux à l’installation et d’avoir une rotation plus rapide qu’en bovins. Autre avantage non négligeable face aux aléas de marché : le mouton « est une production qui s’associe facilement avec une autre », très complémentaire pour ce qui est de la valorisation de l’herbe, des fumiers, des cultures…
Mais pour attirer durablement des jeunes, « il va falloir améliorer encore les revenus », estime Michelle Michel. Pour cela, la chambre d’agriculture entend exploiter les marges de progrès qui s’offrent aux éleveurs : augmenter la productivité par brebis ; améliorer la qualité des carcasses ; analyser les coûts de production et les optimiser (par une meilleure valorisation de l’herbe, en modernisant les exploitations…).

On peut mieux faire !


Les données de l’Institut de l’élevage montrent que si le prix de l’agneau est orienté à la hausse ces dernières années, l’amélioration des résultats de l’atelier ovin est désormais rognée par la hausse des prix des concentrés. Sur sept ans, le poids des agneaux a progressé de 1 kilo ; le prix de +0,7 € par kilo et de +18 € par agneau. Mais les charges d’alimentation ont augmenté elles aussi ; de +12 € par brebis ! Les hausses conjuguées des effectifs ovins et des résultats par brebis génèrent cependant un accroissement de résultat de +58 % par atelier. En Bourgogne, les fermes herbagères dégagent une marge brute ovine par UGB de 477 € et un disponible par Unité de main-d’œuvre (UMO) de l’ordre de 27.500 €. Des chiffres qui n’ont plus grand-chose à envier aux autres productions animales, mais au sujet desquels il est possible de faire encore mieux en profitant des marges de progrès disponibles.

Objectif 10 tonnes de viande par UMO


Selon l’Institut de l’élevage, le prix de revient (charges courantes + amortissements + charges supplétives – aides) ne doit pas dépasser le prix de vente du kilo de carcasse d’agneau. Concernant les charges, le poste "Alimentation + surfaces + mécanisation + bâtiments" ne doit pas excéder 4,50 € par kilo de carcasse. Quant au poste "Frais d’élevage + gestion + foncier + rémunération du capital", il doit être contenu en dessous de 2,50 € par kilo carcasse produit.
Pour espérer dégager un revenu équivalent à 1,5 Smic (1), l’Institut de l’élevage calcule qu’il faut produire au moins 10 tonnes de carcasses agneaux par UMO. C’est le cas de deux élevages sur cinq aujourd’hui. « Les exploitations qui gagnent le plus sont celles qui produisent le plus, c’est-à-dire qui ont une meilleure productivité par brebis et qui produisent des agneaux plus lourds », synthétisait Laurent Solas.

480 brebis par UMO et 1,3 agneau par brebis


En clair, une exploitation ovine produisant des agneaux d’herbe doit avoir des coûts maîtrisés de l’ordre de 4,30 € par kilo de carcasse pour la partie "nourri logé" et 2,80 € pour les "autres coûts". Pour approcher le chiffre de 10 tonnes produites par UMO, il faut une productivité numérique par brebis d’environ 1,3 (la moyenne est de seulement 1,1 actuellement). Le poids des agneaux doit être proche des 19 kg de carcasse. Enfin, il faut compter au minimum 480 brebis par UMO rémunérée. Ce qui suppose aussi d’investir dans les conditions de travail (bâtiments, équipements spécifiques, etc…), faisait remarquer Laurent Solas.

(1) Dans l’étude de l’Institut de l’élevage, avec un revenu équivalent à 1,56 Smic par UMO, les exploitations ovines herbagères de l’échantillon ont de meilleurs résultats que les exploitations Bovins viande qui sont à seulement 1 Smic de moyenne ou même les exploitations Bovins lait (1,3 Smic).


Revenu

De moins de 1,3 à plus de 1,8 fois le Smic


Dans son étude, l’Institut de l’élevage étudie un échantillon de 28 exploitations ovines herbagères. La rémunération moyenne de la main-d’œuvre est de 1,56 Smic pour une productivité de 9 tonnes de viande d’agneau. Le groupe des huit exploitations les plus performantes atteint une rémunération supérieure à 1,8 Smic tandis que les moins performantes sont en dessous de 1,3 Smic. Dans le premier groupe, la productivité dépasse 11 tonnes de viande alors que le dernier est en dessous de 8 tonnes. Corolaire de ces écarts : le groupe des exploitations les plus performantes et les plus rémunératrices est aussi celui qui a les charges les mieux maîtrisées.




Installation

La production ovine ne manque pas d’arguments


Pour la troisième année consécutive, le nombre d’éleveurs détenant plus de 50 brebis a progressé en 2012 en Saône-et-Loire. Chaque année, trois à quatre jeunes font en effet le choix de la production ovine pour s’installer dans le département.

C’est le cas d’Arnaud qui s’est installé fin 2007, en s’associant à ses parents et son frère à Saint-Vincent-Bragny. Plutôt que de devoir mettre aux normes l’exploitation bovine qu’il reprenait, Arnaud a préféré aménager les deux étables entravées en bergerie et ainsi développer la production ovine initiée par ses parents. L’exploitation compte aujourd’hui 500 brebis en plus de 110 vaches allaitantes. Joséphine envisage, quant à elle, de quitter sa carrière dans le commerce pour rejoindre sa sœur qui produit du lait de chèvre. Elle aimerait créer un élevage de 450 brebis charollaises pour produire des agneaux de boucherie. 

Coup de pouce des opérateurs


En Saône-et-Loire, la coopérative Terre d’Ovins propose un "Plan de développement pour la production ovine". Destiné à favoriser l’installation, la création de nouveaux élevages d’au moins 100 brebis et l’accroissement de troupeaux existants, ce plan s’appuie sur un contrat de cinq ans unissant - outre Terre d’Ovins et l’éleveur - les entreprises d’aval, les fabricants d’aliments, les organismes de sélection. Cette forme de contractualisation vise à sécuriser la commercialisation et la valorisation (via des filières de qualité) de la production de l’élevage. Ce plan inclut également les itinéraires techniques à respecter. Quatre types de contrats sont proposés pour un montant d’aide par brebis allant de 15 à 30 €. Terre d’Ovins propose également un soutien au financement de l’acquisition de cheptel. Il s’agit pour la coopérative d’améliorer, par ce biais, la génétique des troupeaux. Qu’il soit nouvellement constitué ou agrandi, le cheptel doit atteindre au moins cent brebis. Pour bénéficier de cette aide, l’éleveur doit respecter un certain nombre de conditions en lien avec la coopérative (augmentation d'au moins 50 brebis). Le prêt est de 100 € par femelle avec un plafond de 30.000 € pour les JA et 25.000 € pour les autres. Le taux du prêt est de 0 % pour les JA et 2 % pour les autres avec une durée maximum de 5 ans. 

Une aide en fonds propres


A l’échelon national, la FNO est à l’origine du dispositif "Labéliance Agri". « Il s’agit d’intervenir en termes de fonds propres pour les éleveurs à qui il manque de l’autofinancement », expliquait Maurice Huet, représentant la FNO. Le dispositif finance une participation dans l’exploitation remboursable sur 6 à 10 ans.


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