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Portes ouvertes Ferm’Inov

Portes ouvertes Ferm’Inov : comment concilier productif et acceptable ?

Mardi dernier, la durabilité était au cœur des portes ouvertes de Ferm’Inov. Rester productif tout en étant acceptable était le parti pris de cette journée dédiée à l’innovation au service des éleveurs. 

Par Marc Labille
Portes ouvertes Ferm’Inov : comment concilier productif et acceptable ?
La journée s’est clôturée sur une conférence en présence d’Adrien Demarbaix, responsable du site Ferm’Inov, Emmanuel Bernard de la FNB, Hugues Pichard de Races de France et Sébastien Windsor, président de Chambre d’agriculture France.

Les portes ouvertes de Ferm’Inov ont drainé entre 600 et 700 visiteurs sur le site de Jalogny. Un programme chargé les attendait avec pas moins de 15 ateliers et autant de pistes d’adaptation au changement climatique, à la hausse des charges, mais aussi des solutions pour gagner en confort et en temps de travail. « La technique est vraiment le bras armé de toutes les décisions d’élevage », introduisait Samuel Bulot, président de l’Idele (Institut de l’Élevage) et co-président de Ferm’Inov. Cette évidence a convaincu les acteurs de la ferme expérimentale de Jalogny de poursuivre la « R & D » en Saône-et-Loire, remémorait Bernard Lacour, co-président de Ferm’Inov. Une association de 47 partenaires a été créée pour faire vivre l’outil avec la détermination de le faire rayonner au niveau interrégional et même national, présentait Adrien Demarbaix, le responsable du site.

À l’heure du changement climatique et de bouleversements géo-politiques économiques, sociétaux…, les défis sont nombreux pour Ferm’Inov dont la vocation est justement d’éclairer les éleveurs. La durabilité s’est inscrite dans le cahier des charges de tous les travaux menés à Jalogny. Et l’enjeu pour demain est de savoir comment être à la fois productif et acceptable.

Souveraineté alimentaire en danger

« Évidemment qu’il faut que l’élevage herbager soit productif », introduisait Samuel Bulot. Car contrairement à une idée reçue, « la consommation de viande résiste alors que la production baisse », rappelait Emmanuel Bernard de la FNB. « On n’est plus autosuffisant en viande bovine en France et la décapitalisation gagne toute l’Europe. Les prix augmentent et ils vont augmenter encore… ». La baisse de l’offre tire les prix et les revenus des éleveurs sont plus élevés… Mais il ne faut pas oublier que ce revenu reste très dépendant des aides publiques, poursuivait Sébastien Windsor, président de chambre d’Agriculture France. « Pour reconquérir cette souveraineté alimentaire, il faut des politiques publiques qui poussent à la production (plus et mieux) et non à la décroissance… ».

Productivité à la française

La productivité est un point fort des agriculteurs français, rappelait Emmanuel Bernard qui citait des chinois récemment estomaqués par la production d’une exploitation individuelle française… Pour le responsable FNB, la connaissance des coûts de production est primordiale dans l’optimisation du revenu.

La productivité à la française, la charolaise l’illustre parfaitement, elle qui est la numéro 1 tant par son effectif (1,2 million de vaches) que par ses performances, faisait valoir Hugues Pichard, président de races de France. Ce dernier expliquait que la diversité de la cinquantaine de races bovines françaises était une chance, de même que la diversité au sein de chacune de ces races. Car la sélection génétique demeure une ressource fondamentale pour s’adapter au changement climatique.

Le changement climatique rebat les cartes

Ce changement climatique est une réalité concrète aujourd’hui avec déjà un mois d’hivernage en moins pour les animaux, des chaleurs estivales difficilement supportables, décrivait Hugues Pichard. C’est aussi des éleveurs contraints d’engranger un maximum de fourrages au printemps et d’augmenter les stocks de sécurité au fil des années, confirmait Emmanuel Bernard qui ajoutait que ces adaptations ont un impact sur les coûts de production. « On va s’adapter », assurait Hugues Pichard qui pensait évidemment aux possibilités de la génétique. Et les éleveurs pourront compter sur toute l’innovation déployée par le réseau « R & D » mis en place par la profession, complétait Sébastien Windsor.

L’innovation n’a pas dit son dernier mot

Ensuite, c’est aux chambres d’agriculture de diffuser ces innovations vers le plus grand nombre d’éleveurs. Or « le nombre d’innovations utilisées est lié au nombre d’heures d’accompagnement réalisé par les chambres sur le terrain », soulignait Sébastien Windsor. Le président national évoquait aussi « l’importance de mesurer le niveau de compétitivité de nos fermes » ainsi que l’indispensable volet des aides à l’investissement.

« Il nous faut comprendre ce qui va nous arriver avec le changement climatique et pour cela, modéliser, à l’échelle de nos fermes, ce qui va se produire d’ici 2030-2040 », exposait Sébastien Windsor qui citait aussi parmi les chantiers urgents : le système assurantiel, la prévention des épizooties… Enfin, il terminait en affirmant que les agriculteurs seraient « les premiers acteurs de la décarbonation, car il faudra des énergies renouvelables issues de l’agriculture : méthanisation, matériaux renouvelables, agrivoltaïsme… ».

Ferm’Inov, l’expérimentation vient du territoire

Cette première porte ouverte sous la bannière Ferm’Inov a été l’occasion de présenter le fonctionnement du collectif qui règne sur la ferme expérimentale de Jalogny. « Les 47 partenaires de Ferm’Inov font vivre notre association. Nous nous retrouvons deux fois par an. Ils nous font remonter les attentes de l’élevage et nous construisons ensemble des projets de recherche qui répondent à ces attentes de terrain. Notre rôle est de créer de la référence. Une référence neutre, pas commerciale, pas militante. Notre mission, à travers nos expérimentations, est aussi de prendre le risque à la place de l’éleveur. L’enjeu fort est ensuite de déployer le fruit de nos travaux en ferme », présentait Adrien Demarbaix. Ce dernier faisait part du souhait de Ferm’Inov de « repenser l’expérimentation en créant un maillage territorial de 15-20 exploitations pour expérimenter autrement », suivant des protocoles adaptés…