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Récolte de fourrage

Pour un ensilage réussi !

Avec une quinzaine de jours d’avance, les chantiers de récolte de fourrages ont débuté en Saône-et-Loire. Repères bousculés par le dérèglement climatique, c’est aux sommes de températures qu’il vaut mieux se fier pour atteler la faucheuse. Et meilleure est la qualité des fourrages récoltés, mieux seront couverts les besoins des animaux en hiver (ou été/automne...) avec même des économies de concentrés à la clé.

Pour un ensilage réussi !
L’herbe récoltée doit être hachée finement pour améliorer la conservation de l’ensilage et augmenter la consommation des animaux.

Le calendrier fourrager est à nouveau bousculé par un printemps très précoce. La pousse de l’herbe accuse aujourd’hui une avance d’une quinzaine de jours sur son stade de végétation habituel.

Les 700 °C sont sur le point d’être atteints dans la plupart des secteurs de la Saône-et-Loire. Cette quantité de chaleur cumulée ou somme de températures (lire encadré) annonce le début de l’épiaison succédant à la fin montaison pour les ray-grass. Pour les prairies temporaires et les permanentes, cette épiaison intervient un peu plus tardivement vers 750-800 °C. Au-delà de ce stade, les valeurs alimentaires entament leur chute, préviennent Véronique Gilles et Antoine Buteau de la Chambre d’agriculture de Saône-et-Loire. « Si vous recherchez des ensilages de qualité, il faut donc se tenir prêts à ensiler les Ray Grass. Si vous recherchez plus un compromis entre la qualité et la quantité d’ensilage, il est possible d’attendre les 800 °C qui seront atteints dix à quinze jours plus tard ».

Silo bien dimensionné

À l’heure où les chantiers d’ensilage d’herbe débutent, les techniciens rappellent quelques précautions pour réussir la récolte et la mise en silo. D’abord, il est recommandé « de dimensionner le silo en tenant compte des besoins du troupeau. Le front d’attaque doit avancer au minimum de 25 cm par jour en été et 15 cm par jour en hiver », rappellent Véronique Gilles et Antoine Buteau. En pratique, la longueur est calculée en multipliant la vitesse journalière de désilage par le nombre de jours d'utilisation. La largeur doit correspondre au double de la largeur d'un tracteur pour bien tasser. La surface du front d'attaque est calculée en divisant le volume d'ensilage distribué par jour par la vitesse de désilage.

Faucher à 6 cm de hauteur

Autre précaution importante : il faut faucher à 6 cm de hauteur. Cela permet de limiter la présence de terre dans le fourrage, car la terre est responsable de contaminations par les butyriques, rappelle-t-on. Autre intérêt de ne pas faucher trop bas, cela permet de ne pas pénaliser la repousse de l’herbe et la pérennité de la prairie. Une fauche à au moins 6 cm aide aussi au séchage de l’andain en favorisant une meilleure circulation d’air sous l’andain. Les techniciens indiquent toutefois qu’au-dessus de 6 cm, les pertes augmentent : 1 cm représente entre 170 et 230 kg de MS pour les graminées ou 60 kg de MS pour les légumineuses.

L’herbe récoltée doit être hachée finement pour améliorer la conservation de l’ensilage et augmenter la consommation des animaux. « Il faut des brins courts d’environ 5 cm », recommande-t-on.

Quant au taux d’humidité du fourrage à mettre en silo, il faut viser 25 à 30 % de MS pour les graminées et 35-40 % pour les légumineuses et associations.

Autant de tracteurs au silo que d’ha à l’heure !

Concernant la confection du silo, le tassement doit permettre de chasser un maximum d’air. « Tasser lentement par couches de 10 à 30 cm d’épaisseur en roulant à 4 km/h. Prévoir autant de tracteurs au silo que la machine récolte d’hectares à l’heure. Pour une récolte de 2 ha/h, il faut donc prévoir deux tracteurs pour tasser », recommandent les techniciens.

À la fin du chantier, le silo doit être rapidement fermé et il faut lui assurer une bonne étanchéité. Rabattre les films des côtés sur le tas, puis couvrir immédiatement avec un film ensilage de qualité. Boudins ou pneus doivent être placés à intervalles réguliers et une double rangée doit être maintenue au-dessus du front d’attaque.

Le silo doit demeurer fermé au minimum trois semaines.

Les mécanismes de séchage d’un fourrage

Les mécanismes de séchage d’un fourrage

Première phase : perte par respiration - ensilage

Pour atteindre les 35 % de MS, l’évaporation est rapide (un jour). Elle se fait essentiellement par les stomates des feuilles (ouvertures par lesquelles les plantes respirent). C’est un mécanisme naturel. Cette perte par respiration est provoquée par le soleil. Il faut donc étaler au maximum le fourrage après la fauche (le RGI a peu de stomates. Les légumineuses sèchent plus vite que les graminées, hormis le trèfle très riche en eau).

Deuxième phase : perte par extraction - enrubannage

Entre 35 % et 75 % de MS, l’évaporation par les stomates s’arrête. C’est un phénomène naturel de défense. L’évaporation se fait au travers de la cuticule (pellicule de cire) et par les parois. Ce mécanisme de séchage est 100 fois plus lent que par les stomates. C’est l’air sec qui permet cette évaporation. Il faut donc aérer le fourrage en faisant de gros andains. C’est dans cette phase que la conditionneuse a le plus d’intérêt. En écrasant les tiges, elle permet de réduire l’écart de séchage entre les feuilles et les limbes et permet ainsi de réduire la perte en feuilles.

Troisième phase : la rétention hygroscopique - le foin

Plus la plante se déshydrate, plus l’air aura de la peine à extraire l’eau restante. Le passage de 75 à 85 % de MS est impératif pour avoir une bonne conservation et nécessite une forte chaleur avant le pressage. C’est à cette condition que le fourrage sera stabilisé pour qu’aucune moisissure ne s’y développe.

Enrubannage : un taux de MS de 45 % à 65 %

Un minimum de 45 % de matière sèche permet de bloquer le développement des acides butyriques. Préférer un optimum de 55 %. En condition satisfaisante, le gain de MS est rapide jusqu’à l’obtention des 55 % de MS. Ensuite, le séchage prend bien plus de temps et n’apportera pas de qualité supplémentaire.

Pour réduire les pertes à la récolte, il faut éviter de trop brasser un fourrage déjà sec et privilégier les interventions tôt dans la journée, dès la disparition de la rosée.

La pousse dépend avant tout des sommes de températures

La pousse de l’herbe est dépendante de plusieurs facteurs. La disponibilité en eau, et en éléments minéraux, le rayonnement, la durée du jour ont leur importance. Mais c’est surtout la quantité de chaleur cumulée qui explique le redémarrage de la végétation en sortie d’hiver. Ce cumul ou somme de températures est donc utilisé pour donner des repères afin de dater les stades clefs de la pousse de la prairie. Avec les bouleversements climatiques actuels, les repères calendaires deviennent obsolètes. Ceux liés aux sommes de températures permettent une gestion de l’herbe optimale en liaison avec l’année en cours. Vous pouvez retrouver ces sommes de températures dans l’Herb’Hebdo envoyé par la chambre d’agriculture 71.

Stades de récolte et besoins des animaux

Stades de récolte et besoins des animaux

Au moment de la récolte, les qualités de fourrages à rechercher doivent répondre aux besoins des catégories d’animaux. Il faut en particulier raisonner la valeur des fourrages en fonction de leur « Densité Énergétique UF/UEB». Ces densités énergétiques ont un lien direct avec les stades de récolte et donc les sommes de températures au moment de la récolte.

On sait que les jeunes animaux ont besoin d’une alimentation à forte densité énergétique car leur capacité d’ingestion est faible par rapport à leurs besoins de croissance. Ces besoins évoluent rapidement avec leur poids : plus les génisses sont grosses au sevrage, plus elles seront capables de valoriser les fourrages grossiers, et moins elles ont besoin de concentré.

Ainsi, on voit sur le graphique ci-dessous, que même avec un très bon foin, le fourrage seul ne permet pas de faire de la croissance. Un ensilage récolté début à mi-épiaison, avec une densité énergétique proche de 0,75 permet de réduire considérablement les besoins en concentré.

Il est donc important de réserver ses meilleurs fourrages aux animaux les plus jeunes : 80 kg d’aliment en plus sont nécessaires pour assurer la croissance d’une laitonne avec un mauvais foin par rapport à un foin de bonne densité énergétique.

Pour les jeunes femelles, les prairies permanentes récoltées entre 800 °C et 900 °C répondent à ces besoins, ainsi que les prairies temporaires récoltées entre 750 °C et 850 °C et que les ray-grass italiens ou hybrides récoltés entre 700 °C et 800 °C.

Les vaches vêlant en fin d’hiver ont les besoins les plus faibles. Les prairies permanentes récoltées entre 1.100 °C et 1.400 °C répondent à ces besoins, ainsi que les prairies temporaires récoltées entre 900 °C et 1.300 °C.

Les vaches vêlant en début d’hiver ont des besoins intermédiaires. Seules les récoltes précoces permettent d’avoir des fourrages répondant à ces besoins : ray-grass italiens ou hybrides récoltés entre 750 °C et 850 °C, ou prairies temporaires récoltées entre 700 °C et 900 °C.

Les primipares ont des besoins plus élevés. Les prairies permanentes récoltées entre 800 °C et 1.000 °C répondent à ces besoins, tout comme les prairies temporaires récoltées entre 750 °C et 1.000 °C et les ray-grass italiens ou hybrides récoltés entre 700 °C et 900 °C.