Pour une Pac "anti crise"
laitiers, la profession travaille aux nouveaux dispositifs qu’il
conviendrait de mettre en place pour ne pas exposer les producteurs aux
nouvelles crises possible. Passage en revue des propositions de la
FNPL.
Des aides couplées à des réductions de production
La FNPL souhaite la mise en place dans le cadre de l’OCM (organisation commune de marché) d’un système d’aides, au niveau européen, pour les éleveurs qui jouent le jeu d’une limitation de production en période de crise. Ceci serait une mesure phare.
L’objectif est double : limiter les quantités à stocker et assainir les marchés. Lors de la crise laitière de 2009 et durant la période d’achat à l’intervention, la France a contribué à hauteur de 37 % à la baisse de la production européenne (-510 millions de litres). Sur cette même période, l’Allemagne a, elle, produit 770 millions de litres supplémentaires. Quant au volume de lait placé à l’intervention en 2009, il a été de 2,3 milliards de litres. La politique française a ainsi contribué à restreindre les stocks privés et publics. Les dépenses communautaires ont donc été limitées. Globalement, la crise laitière a été freinée.
Un dispositif envisageable
Pour autant, si l’histoire venait à se répéter, la France ne pourra pas être la seule "bonne élève" de l’Europe. Ce positionnement a de fait pesé sur la performance économique des éleveurs et des entreprises. Ce système d’aides en période de crise, couplé à une réduction de la production, est un dispositif envisagé par la Commission européenne.
« En cas de grave déséquilibre, la Commission pourrait envisager comme autre instrument de stabilisation du marché et comme mesure exceptionnelle si les autres mesures disponibles dans le cadre de l’OCM unique apparaissaient insuffisantes, de mettre au point un système fondé sur l’article 186 de l’OCM unique (clause applicable en cas de perturbation du marché), qui permettrait aux producteurs de lait –sur la base du volontariat– de réduire leurs livraisons en échange de contrepartie », peut-on ainsi lire dans le rapport de la Commission du 8 décembre 2010 sur l’évolution de la situation du marché.
Ce dispositif pourrait être financé en utilisant pour partie la réserve de 3,5 milliards d’€ sur 7 ans prévue en cas de crise dans le secteur agricole dans le projet de la réforme de la Pac actuellement en débat.
Deux niveaux d’aides seraient à envisager :
- individuel. La FNPL milite pour la mise en œuvre d’une mesure d’aide individuelle aux producteurs sur une base volontaire et corrélée à une réduction de la production en période de crise. Cette mesure doit être un outil offert à l’ensemble des producteurs européens. Elle ne se substituerait pas aux outils de gestion des marchés encore existants et de maîtrise de la production, mais offrirait une aide à tout producteur européen quelle que soit l’évolution globale de la production de son pays ;
- collectif. La FNPL souhaite la mise en place –en complément de l’aide individuelle ci-dessus évoquée– d’un niveau collectif (à définir : bassins laitiers, pays producteurs...). Ainsi, en période de crise, l’accès à l’intervention publique serait privilégié si le constat d’une réduction de la production à un niveau collectif est fait. L’idée est de coupler l’accès prioritaire à l’intervention à un système vertueux d’incitation d’ajustement de production au niveau collectif.
Déclenchement du processus
L’analyse des prix des produits laitiers montre que le suivi de certains produits est pertinent pour définir une période de crise. C’est un indicateur aval. Il semble ainsi possible de se servir des prix hebdomadaires constatés par la Commission européenne pour le beurre, la poudre de lait écrémé, la poudre de lait entier ou éventuellement l’édam, pour déclencher un processus de non production sans attendre que l’intervention soit ouverte.
La Commission ne dispose pas actuellement d’outils statistiques pour établir un système de détection des périodes de crise en amont de la filière laitière (indicateur amont). Le comparatif du prix du lait à la ferme par rapport au coût des intrants est trop empirique (manque de réactivité dans la diffusion des données sur le prix du lait et d’indicateurs ciblés sur les coûts de production).
La réduction de la production devrait être évaluée en fonction du niveau de l’aide, par rapport à la production des éleveurs sur la même période que l’année précédente (ou la moyenne sur les années précédentes). Cette diminution de la production devrait se situer entre 2 et 4 %. Cette limitation de la production ne doit en effet pas pénaliser les éleveurs dans leur capacité à faire reprendre une production "normale" à leur troupeau dès que possible.
Projet de réforme post 2013
La FNPL défend et a toujours défendu une production laitière diverse sur tout le territoire, avec des actifs nombreux. Cette politique laitière qui favorise les hommes plutôt que les hectares fait que les exploitations laitières françaises sont plus petites et concentrent plus d’aides à la surface. Ces fermes laitières se caractérisent donc par des surfaces moyennes, des niveaux de soutiens historiques à l’hectare élevés et des revenus en dessous de la moyenne des revenus agricoles.
Dans ce contexte, la fin des références historiques et la convergence des aides telles que souhaitées par le commissaire européen à l’Agriculture auront un lourd impact sur les producteurs de lait. Les premières simulations font ressortir qu’entre 20.000 et 25.000 des éleveurs perdraient plus de 100 €/ha ou environ 30 €/1.000 litres !
Des telles baisses auront inévitablement des répercussions sur la pérennité de certaines exploitations et sur l’économie de nombreux territoires.
En plus, le régime du paiement de base unique à l’hectare s’appliquerait sur des surfaces qui portent des risques économiques très différents. L’uniformisation des paiements présente des limites. Pour la FNPL, le verdissement des aides constitue une première étape significative de la convergence. Si les justifications du verdissement sont légitimes, sa mise peut paradoxalement être pénalisante pour les élevages.
Des propositions concrètes
La FNPL demande plus de progressivité dans la mise en œuvre de la fin des références historiques.
1) Instaurer une sur-dotation des 50 premiers hectares pour les exploitations d’élevage détenant un quota laitier, des PMTVA (prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes) et/ou des PCO (prime compensatrice ovine).
2) Mettre en place une prime à la vache laitière (PMTVL) qui s’inspire du dispositif PMTVA pour les vaches allaitantes.
D’autres pistes sont envisageables comme la limitation de la convergence. La FNPL n’a pas encore tranché. Elle peaufine l’étude d’impact et de faisabilité de ces options avec l’aide de l’institut de l’élevage.
Pour ce qui est du verdissement, la FNPL demande que le taux de 30 % soit revu à la baisse avec l’introduction d’une progressivité dans la mise en place de cette aide verte. La FNPL souhaite abaisser le taux de 7 % de focus écologique et introduire dans les éléments à prendre en compte à ce titre des cultures ou surfaces répondant à des enjeux environnementaux multiples (plantes textiles, prairies permanentes, cultures pérennes, luzerne…). La FNPL propose enfin d’exonérer de la mesure diversification des cultures, les exploitations détenant des ruminants ou les éleveurs disposant de faibles surfaces en cultures arables destinées à l’alimentation des animaux.