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Restaurants collectifs en Bourgogne

Premières étoiles Loc’Halles

Lundi à Chalon-sur-Saône avait lieu la première présentation
"officielle" de la plateforme web Loc’Halles qui permet de mettre en
relation fournisseurs et acheteurs pour approvisionner les restaurants
collectifs bourguignons. Un outil qui doit surtout permettre aux
producteurs locaux d’organiser ces marchés publics en circuits courts,
afin de dynamiser la demande et ainsi tirer à la hausse la valeur des
produits et des territoires.
Par Publié par Cédric Michelin
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Toute la filière avait rendez-vous : producteurs locaux, transformateurs, distributeurs, cuisiniers/gestionnaires, élus… Lundi à Chalon-sur-Saône, la plateforme Loc’Halles était dévoilée. Ce site web permet de mettre en contact les uns avec les autres. Tous peuvent désormais individuellement s’inscrire pour consulter ou répondre aux besoins des restaurants collectifs de type scolaires, hospitaliers, EPHAD… et inversement. Le moteur de recherche permet en effet de cibler les établissements dans un périmètre donné autour d’une commune ou de recevoir des alertes par mail lorsqu’un établissement enregistre ses besoins sur un type de produits (viandes, lait, légumes…).
Une bonne occasion donc pour les producteurs locaux de reconquérir des parts de marchés sur ces circuits de proximité. Toutes les collectivités territoriales sont partenaires (région, départements, les Pays, communes…). Le vice-président en charge de l’agriculture au conseil régional de Bourgogne, Jacques Rebillard, l’exprimait d’emblée : « cette plateforme web doit permettre de réintroduire progressivement des produits bourguignons dans les restaurants collectifs et développer la proximité alimentaire, après la concentration des achats » par le passé.

Supprimer quelques intermédiaires



Car le marché est déjà certes organisé mais reste ouvert. Parlant également au nom du Sedarb (Service d'écodéveloppement agrobiologique et rural de Bourgogne), la directrice du Cerd (Centre d’étude et de ressources sur la diversification), Françoise Morizot-Braud, revenait sur une nuance vite soulevée lors de la réunion et qui a son importance : des entreprises locales transforment parfois des produits ne provenant pas de Bourgogne. Un circuit qui n’a de court que le nom donc. « L’outil Loc’Halles vise à valoriser en priorité la production locale. S’il y a des intermédiaires, on trace les produits en affichant justement le nombre d’intermédiaires. C’est d’ailleurs un des critères pour être accepté sur la plateforme », rassurait-elle. Chaque inscription est donc « moulinée » individuellement, contrôlée au regard de la charte présente sur le site « engageant » les fournisseurs.

Animation et connaissances humaines



Côté fournisseurs, pas d’inquiétude non plus à avoir. Les professionnels – agriculteurs ou groupement de producteurs - ne seront pas livrés à eux-mêmes face à des services achats, rompus à la mise en concurrence car devant respecter une comptabilité matière par repas.
De Terroirs de Saône-et-Loire, Clotilde Lacoste est chargée d’accompagner les porteurs de projets depuis deux ans et demi sur la démarche "Cantines en mouvement" sur le sud de la Sâone-et-Loire. L'animation « humaine » est primordiale pour la réussite. Basée à la chambre d’agriculture de Mâcon, elle « fait le lien entre les restaurants et les fournisseurs, travaille à proposer des menus de saison avec des produits locaux et a un rôle commercial allant jusqu’à la facturation », pour simplifier les démarches administratives.
D’ailleurs, avec cette connaissance clients, l’élu et agriculteur du Clunysois, François Bonnetain, avançait la nécessité future d’adapter les installations de jeunes sur certaines productions manquantes.

Organiser des tournées collectives



Reste que le principal souci vient de la logistique et du conditionnement. Le risque étant des frais rédhibitoires pour quelques salades vendues par exemple. L’association intervient ici aussi en organisant des livraisons. En mutualisant les moyens logistiques, cela permet également de  livrer « plus loin » avec des tournées collectives. Des agriculteurs s’organisent aussi de leurs côtés ou via leurs groupements.

Le coût matière, nerf de la guerre



« Le coût matière reste le nerf de la guerre », expliquaient les gestionnaires et cuisiniers. Les cantines publiques sont à 1,65 €/repas, hors pain et assaisonnement (rajout de 0,20 €), un chiffre « au delà de la moyenne nationale » néanmoins. Les lycées sont entre 1,95 et 2,20 €/repas. « Les cuisiniers ne sont pas forcément motivés, évoquant le coût comme frein. La volonté vient plus des parents. Lorsque tout est mangé, on entend plus parler du prix de la part des gestionnaires », rassurait vite Clotilde.
Parmi les exemples réussis, Anne-Marie et Sophie, pour les "cuisines" de la ville de Saint-Rémy, expliquaient comment elles avaient « bousculer les habitudes » internes. Car premier problème, les équipes utilisaient peu de produits bruts devant préparer 250 repas par jour en période scolaire. La gestion des temps de préparation rentre en compte. « On avait peur du surcoût ». Et là, surprise. En s’organisant et en faisant des économies sur le grammage, le budget alimentaire de la commune diminua.
Des entreprises travaillant avec des producteurs locaux s’exprimaient également (Sogeres, Bourgogne Repas, LDC…) prouvant qu’il est également possible de « mixer » les fournisseurs - de type plus industriel - pour « lisser » les coûts et faciliter les cuissons avec des pièces calibrés. « Il ne faut pas que ce soit au détriment du goût », protestaient les cuisiniers, ayant aussi peur pour leurs emplois...
Des exemples à suivre. Tendance forte dans la société moderne, les clients sont partout plus exigeants (AB, locavores, durable, éthique…) et poussent pour que l’alimentation retrouve sa place dans l’éducation ou les plaisirs de la vie à tout âge. Une « culture française » qui doit être encouragée par tous « pour ne pas finir avec des générations fast-food ».


Moins de gaspillage, plus de goûts



La vraie réussite des circuits courts de qualité est venue d'ailleurs. La vérité est littéralement dans la bouche des enfants. « Maintenant, en plus, on a des enfants qui mangent tout ! Il y a moins de gaspillage dans les assiettes », se réjouit-on partout où les circuits courts fonctionnent. Yaourts fermiers, miel, viande de porc, sorbets, salade de radis noirs même… avec l’aide d’une diététicienne – vérifiant les bons apports nutritifs – des "menus de saison" locaux sont mis en place. « Maintenant, les enfants sont curieux de nouveaux goûts ». Mais l’éducation se fait plus facilement tôt en âge. « Les collégiens sont déjà plus réticents. Ils cherchent les marques ». Il faut donc ruser, « l’offrir en plus du repas pour qu’ils y retournent après », expliquait Sandrine, préposée aux achats d’un restaurant de lycée à Chalon.




Progresser sur son exploitation



D’autres vertus sont également relevées côté producteur. Marie-Ange Ravat, de l’EARL la Grange Gaule à Loisy, en production laitière, évoquait les axes de progrès pour son exploitation en agriculture biologique. « Ça nous a fait progresser en devant analyser nos valeurs nutritives – pour les EPHAD notamment - de nos yaourts au lait entier fermenté, en adaptant nos grammages, en raisonnant nos déchets recyclables… Nous livrons en faisant des circuits avec Terroirs, tout en imposant par le dialogue un jour de livraison ».


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