Filière bovine
Prendre en main son développement
Les attentes des éleveurs de bovins n'ont pas été comblées par le
ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll à l'assemblée générale de la
Fédération nationale bovine (FNB) les 5 et 6 février aux
Sables-d'Olonne. Les derniers arbitrages de la Politique agricole
commune (Pac) n'ont pas encore été faits : PMTVA, plan protéines. À un
an de la mise en œuvre de la Pac 2014-2020, le monde des éleveurs de
bovins allaitants maintient la pression, mais préfère regarder devant.
Avec ou sans les derniers arbitrages, ils s'adapteront. Revenir sur les
basiques : la filière entend valoriser son savoir-faire et sa technicité
mondialement reconnues. Les marchés émergents sont bien sûr visés, mais
aussi les consommateurs français à un moment où la filière est mise à
mal par les fraudes à répétition. Le logo Viandes de France débarque
dans les rayons, le 11 février prochain. Mais la filière ne s'arrête pas
là : à la rentrée prochaine, c'est toute la filière qui organisera des
portes ouvertes pour le grand public : les élevages, les industries et
les distributeurs.
ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll à l'assemblée générale de la
Fédération nationale bovine (FNB) les 5 et 6 février aux
Sables-d'Olonne. Les derniers arbitrages de la Politique agricole
commune (Pac) n'ont pas encore été faits : PMTVA, plan protéines. À un
an de la mise en œuvre de la Pac 2014-2020, le monde des éleveurs de
bovins allaitants maintient la pression, mais préfère regarder devant.
Avec ou sans les derniers arbitrages, ils s'adapteront. Revenir sur les
basiques : la filière entend valoriser son savoir-faire et sa technicité
mondialement reconnues. Les marchés émergents sont bien sûr visés, mais
aussi les consommateurs français à un moment où la filière est mise à
mal par les fraudes à répétition. Le logo Viandes de France débarque
dans les rayons, le 11 février prochain. Mais la filière ne s'arrête pas
là : à la rentrée prochaine, c'est toute la filière qui organisera des
portes ouvertes pour le grand public : les élevages, les industries et
les distributeurs.
« La Politique agricole commune ? C'est fini, on va faire quelques bricolages encore par-çi par-là…Mais honnêtement, il faut regarder devant nous », a déclaré Pierre Chevalier, président de la Fédération nationale bovine (FNB), pour clôturer l'assemblée générale aux Sables-d'Olonne, le 6 février. L'élevage de bovins allaitants français est en plein virage. La Pac, la loi d'avenir : des opportunités parmi tant d'autres. Xavier Beulin, président de la FNSEA, n'a pas épargné la politique menée par Stéphane Le Foll, ministre de l'Agriculture : « La loi d'avenir agricole va au mieux vers une stagnation. Nous allons surtout vers une déprofessionnalisation de l'agriculture ». Non pas que les éleveurs rejettent les aides publiques françaises et européennes, mais leur désillusion les pousse à compter davantage sur leurs forces. « Il y a quinze ans, on allait chercher des subventions à l'exportation à Bruxelles. Cette période est révolue », a assuré Patrick Bénézit, vice-président de la FNB. Qu'importe si la « vieille Europe » est en crise : « Dans le monde, la demande augmente. Nous sélectionnons nos races depuis 50 ans. Nous avons des marchés à prendre ». Quid de l'évolution du montant des aides Pac ? Encore incertaine, mais la politique ne fait pas tout. Les éleveurs ne prétendent pas pour autant construire seuls leur avenir. « Les solutions seront interprofessionnelles ou elles ne seront pas », a assuré Jean-Pierre Fleury, secrétaire général de la FNB. Eleveurs, industriels, distributeurs doivent aller ensemble reconquérir le marché intérieur. Dans le dossier annuel sur la filière bovins viandes de l'Institut de l'élevage, les économistes analysent : « La baisse de la production française de bovins finis, plus conséquente que celle de la consommation, a déclenché une nouvelle dégradation du taux d'auto-approvisionnement ». Il passe de 101% en 2011 à 93% en 2013. Néanmoins, les prévisions de production pour 2014 sont plus optimistes. Elles tablent sur une augmentation de +3%, d'autant que, « le retour des disponibilités en viande de femelles en 2014 devrait conduire à une baisse des importations (-6%) ».
La grande (distribution) absente
À long terme, la production ne suivra pas sans des prix revalorisés. Aux Sables-d'Olonne, le distributeur invité à débattre avec les éleveurs, les industriels et les pouvoirs publics, n'est pas venu. Pourtant, le rôle de la distribution dans la filière est au cœur des tensions. « Les négociations commerciales sont extrêmement rudes. On est contraint de se retirer de certains dossiers », a certifié Jean-Marie Joutel, numéro deux du groupe Bigard. Le groupe représente 40% du marché intérieur, il se dit « profitable ». Face à la colère de près de 300 éleveurs qui s'estiment perdants, il ajoute : « C'est une garantie, pour vous éleveurs, d'être payés ». Oui, mais à quel prix ? En moyenne annuelle, les prix 2013 des gros bovins ont atteint des « niveaux records ». Selon l'Institut de l'élevage, le prix moyen pondéré des gros bovins a augmenté de 8% entre 2012 et 2013. Une tendance feu de paille selon les éleveurs, suivis par les économistes qui tempèrent : « À partir de l'été, le marché s'est retourné en raison d'une demande atone en France et en Europe. Les prix des vaches ont alors brutalement reflué ».
Sécuriser en contractualisant
Face à la volatilité des prix et du coût de l'alimentation du bétail, la FNB mise sur la contractualisation. Guy Hermouët, vice-président de la FNB, a présenté le projet de contractualisation dans la filière viande bovine, encore peu répandu : « S'il y a des contrats, il y a des cahiers des charges. Nous sommes capables de produire ce dont la filière a besoin ». L'idée reste de fixer les prix entre éleveurs et industriels en tenant compte des coûts de production. La création d'une caisse nationale de sécurisation permettrait aux contractants de « sécuriser les paramètres économiques en cas de perturbation du prix de marché ». Le dossier est en cours : la FNB espère approvisionner cette caisse grâce aux éleveurs, mais aussi à Unigrains ou encore Sofiprotéol. Reste que la contractualisation devra un jour ou l'autre être tripartite : la distribution va devoir jouer le jeu, sinon les industries n'auront que peu de garantie de pouvoir répercuter les fluctuations du marché à la distribution. Le débat avec la distribution est vieillissant, mais toujours aussi intense. De leur côté, les Jeunes agriculteurs ont averti : « Notre ambition pour l'avenir est de développer un réseau de distribution alternatif », a expliqué Julien Bigand, responsable viandes chez les Jeunes agriculteurs (JA), « en collaboration avec Coop de France et l'APCA (Assemblée permanente des chambres d'agriculture) ». Le syndicat ne cherche pas seulement à renouveler les générations d'éleveurs dont plus de la moitié a plus de 50 ans, mais aussi les filières et les débouchés. Car selon lui, le prix à la consommation a gagné 3% en dix ans, quand dans le même temps celui de la production a baissé de 18%.
Aller vers le consommateur
Au-delà de la couverture des coûts de production, la revalorisation du prix doit aussi refléter le savoir-faire et le travail des éleveurs. Si le monde de l'élevage est conscient de ses atouts, les consommateurs le savent peut-être moins. Etrange premier anniversaire qu'est celui du horsegate : « Cette fraude aura au moins eu le mérite de montrer au consommateur ce qu'est notre système de traçabilité », analyse Julien Bigand. Ouvrir les portes de l'étable France au grand public devient urgent. Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Eric Allain, directeur de FranceAgriMer, a rappelé qu' « entre 1970 et 1980, la consommation de viandes n'a cessé d'augmenter. Depuis, celle de viande bovine est en recul ». Dominique Langlois, président d'Interbev (interprofession bétail et viandes), a annoncé un événement majeur pour l'automne 2014 : des journées portes-ouvertes des élevages à la distribution en passant par les industries. « Nous avons la volonté de montrer au consommateur la chaîne de production », appuie-t-il.
En un an, la filière viande n'a pas chômé : le logo Viandes de France sera officiellement présenté le 11 février en présence de trois ministres (l'agriculture, l'agroalimentaire et la consommation). L'étiquetage des viandes et des produits se fait sur une base volontaire (et pas obligatoire puisque Bruxelles ne suit pas la France sur ce dossier). Il indiquera « né, élevé, abattu » ou « né, élevé, abattu et transformé » accompagné de la signature Viandes de France. Les viandes concernées proviennent des bovins, des porcins, des ovins, des volailles. Cette nouvelle visibilité auprès des consommateurs permettra de valoriser les produits, mais aussi le travail des acteurs de la filière. La viande Made in France prendra alors ses marques dans les supermarchés.
Savoir-faire français recherché
Mais pas que. Viandes de France a aussi l'ambition d'être une signature visible pour les marchés extérieurs. Si le monde de l'élevage sait ne pas pouvoir tenir tête aux prix ultra-compétitifs outre-Atlantique, Guy Hermouët insiste : « Le prix doit avoir de moins en moins de poids. Nous devons valoriser la qualité, le savoir-faire ». Chez les clients historiques comme l'Italie, plus besoin de convaincre. « Vous avez des races de bovins uniques au monde. De nombreux pays de l'Est et du Maghreb veulent travailler avec vous », a assuré Luigi Cremonni, directeur d'Assocarni (association italienne de l'industrie et du commerce du bétail et des viandes). d' è D ) Les nouveaux marchés du pourtour méditerranéen ou d'Asie, eux, restent à conquérir. Le travail a déjà commencé. L'ouverture récente du marché japonais à quelques entreprises françaises est un bon point. « Ce sont des petits volumes, mais cela va progresser », explique Jean-Pierre Fleury. La filière viande française ne doute pas que le logo Viandes françaises offrira une meilleure visibilité du savoir-faire et de la qualité française sur les marchés émergents. Dans un monde pressé, l'action des éleveurs devient urgente. Ezzedine Ben Mustapha, vice-président de Synapri (syndicat des agriculteurs de Tunisie), raconte avoir des tarentaises sur son exploitation depuis de très nombreuses années : « Mon grand-père avait même déjà constitué son cheptel ». Pourtant, il témoigne que les choses changent : « Depuis quelques années, nous sommes inquiets. Les importations proviennent de plus en plus d'Uruguay. En 2013, cela représentait les deux tiers de nos importations en vifs ». Le prix n'y est pas pour rien, mais l'éleveur tunisien veut espérer que le savoir-faire français prévaudra sur l'argument du prix, notamment auprès des petits éleveurs. « Il ne doit plus s'agir seulement de vendre des animaux. Nous devons suivre les ventes jusqu'au petit éleveur qui produit », explique-t-il. Xavier Beulin d'ajouter : « Nous devons vendre aussi notre savoir-faire, exporter un peu de pédagogie ». Reste que le commerce mondial ne se fait pas que dans un sens. Les inquiétudes françaises et européennes s'expriment de plus en plus s'agissant des accords bilatéraux transatlantiques (Canada, Etats-Unis, Brésil). Dans ce dossier, les éleveurs n'ont pourtant d'autres choix que de s'appuyer sur le ministère français de l'Agriculture pour porter leurs intérêts auprès de Bercy et de Bruxelles. Ils savent bien qu'ils ne sont qu'une monnaie d'échanges parmi d'autres, comme le sont l'industrie et les services.
Accord libre-échange : des scénarios risqués pour l'aviculture européenne
Dans une étude diffusée le 4 février par l'université de Wageningen sur la compétitivité de la filière avicole européenne, les universitaires estiment le coût de production européen de la viande de poulet à 166 centimes d'euro par kilo de carcasse en 2011. Aux Etats-Unis, ces coûts sont moindres et estimés à 80% du coût européen. Au Brésil, la concurrence est encore plus rude avec un niveau de coût de production égal à 72% du coût européen. Sur la base de ces différences de compétitivité, les universitaires envisagent trois scénarios concernant les accords bilatéraux transatlantiques. Le « pire des scénarios » combine une baisse de 10% des taux de change des pays tiers étudiés (Etats-Unis, Thaïlande, Argentine, Ukraine, Brésil, Russie) avec une baisse de 50% des droits de douanes. « Dans ce scénario, tous les pays tiers (à l'exception de la Russie) deviennent beaucoup plus compétitifs que l'Union européenne », conclut l'étude. Ainsi, le prix du filet de poulet en Europe serait de 400 centimes d'euro le kilo contre 300 au Brésil ou encore 350 en Thaïlande.
La grande (distribution) absente
À long terme, la production ne suivra pas sans des prix revalorisés. Aux Sables-d'Olonne, le distributeur invité à débattre avec les éleveurs, les industriels et les pouvoirs publics, n'est pas venu. Pourtant, le rôle de la distribution dans la filière est au cœur des tensions. « Les négociations commerciales sont extrêmement rudes. On est contraint de se retirer de certains dossiers », a certifié Jean-Marie Joutel, numéro deux du groupe Bigard. Le groupe représente 40% du marché intérieur, il se dit « profitable ». Face à la colère de près de 300 éleveurs qui s'estiment perdants, il ajoute : « C'est une garantie, pour vous éleveurs, d'être payés ». Oui, mais à quel prix ? En moyenne annuelle, les prix 2013 des gros bovins ont atteint des « niveaux records ». Selon l'Institut de l'élevage, le prix moyen pondéré des gros bovins a augmenté de 8% entre 2012 et 2013. Une tendance feu de paille selon les éleveurs, suivis par les économistes qui tempèrent : « À partir de l'été, le marché s'est retourné en raison d'une demande atone en France et en Europe. Les prix des vaches ont alors brutalement reflué ».
Sécuriser en contractualisant
Face à la volatilité des prix et du coût de l'alimentation du bétail, la FNB mise sur la contractualisation. Guy Hermouët, vice-président de la FNB, a présenté le projet de contractualisation dans la filière viande bovine, encore peu répandu : « S'il y a des contrats, il y a des cahiers des charges. Nous sommes capables de produire ce dont la filière a besoin ». L'idée reste de fixer les prix entre éleveurs et industriels en tenant compte des coûts de production. La création d'une caisse nationale de sécurisation permettrait aux contractants de « sécuriser les paramètres économiques en cas de perturbation du prix de marché ». Le dossier est en cours : la FNB espère approvisionner cette caisse grâce aux éleveurs, mais aussi à Unigrains ou encore Sofiprotéol. Reste que la contractualisation devra un jour ou l'autre être tripartite : la distribution va devoir jouer le jeu, sinon les industries n'auront que peu de garantie de pouvoir répercuter les fluctuations du marché à la distribution. Le débat avec la distribution est vieillissant, mais toujours aussi intense. De leur côté, les Jeunes agriculteurs ont averti : « Notre ambition pour l'avenir est de développer un réseau de distribution alternatif », a expliqué Julien Bigand, responsable viandes chez les Jeunes agriculteurs (JA), « en collaboration avec Coop de France et l'APCA (Assemblée permanente des chambres d'agriculture) ». Le syndicat ne cherche pas seulement à renouveler les générations d'éleveurs dont plus de la moitié a plus de 50 ans, mais aussi les filières et les débouchés. Car selon lui, le prix à la consommation a gagné 3% en dix ans, quand dans le même temps celui de la production a baissé de 18%.
Aller vers le consommateur
Au-delà de la couverture des coûts de production, la revalorisation du prix doit aussi refléter le savoir-faire et le travail des éleveurs. Si le monde de l'élevage est conscient de ses atouts, les consommateurs le savent peut-être moins. Etrange premier anniversaire qu'est celui du horsegate : « Cette fraude aura au moins eu le mérite de montrer au consommateur ce qu'est notre système de traçabilité », analyse Julien Bigand. Ouvrir les portes de l'étable France au grand public devient urgent. Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Eric Allain, directeur de FranceAgriMer, a rappelé qu' « entre 1970 et 1980, la consommation de viandes n'a cessé d'augmenter. Depuis, celle de viande bovine est en recul ». Dominique Langlois, président d'Interbev (interprofession bétail et viandes), a annoncé un événement majeur pour l'automne 2014 : des journées portes-ouvertes des élevages à la distribution en passant par les industries. « Nous avons la volonté de montrer au consommateur la chaîne de production », appuie-t-il.
En un an, la filière viande n'a pas chômé : le logo Viandes de France sera officiellement présenté le 11 février en présence de trois ministres (l'agriculture, l'agroalimentaire et la consommation). L'étiquetage des viandes et des produits se fait sur une base volontaire (et pas obligatoire puisque Bruxelles ne suit pas la France sur ce dossier). Il indiquera « né, élevé, abattu » ou « né, élevé, abattu et transformé » accompagné de la signature Viandes de France. Les viandes concernées proviennent des bovins, des porcins, des ovins, des volailles. Cette nouvelle visibilité auprès des consommateurs permettra de valoriser les produits, mais aussi le travail des acteurs de la filière. La viande Made in France prendra alors ses marques dans les supermarchés.
Savoir-faire français recherché
Mais pas que. Viandes de France a aussi l'ambition d'être une signature visible pour les marchés extérieurs. Si le monde de l'élevage sait ne pas pouvoir tenir tête aux prix ultra-compétitifs outre-Atlantique, Guy Hermouët insiste : « Le prix doit avoir de moins en moins de poids. Nous devons valoriser la qualité, le savoir-faire ». Chez les clients historiques comme l'Italie, plus besoin de convaincre. « Vous avez des races de bovins uniques au monde. De nombreux pays de l'Est et du Maghreb veulent travailler avec vous », a assuré Luigi Cremonni, directeur d'Assocarni (association italienne de l'industrie et du commerce du bétail et des viandes). d' è D ) Les nouveaux marchés du pourtour méditerranéen ou d'Asie, eux, restent à conquérir. Le travail a déjà commencé. L'ouverture récente du marché japonais à quelques entreprises françaises est un bon point. « Ce sont des petits volumes, mais cela va progresser », explique Jean-Pierre Fleury. La filière viande française ne doute pas que le logo Viandes françaises offrira une meilleure visibilité du savoir-faire et de la qualité française sur les marchés émergents. Dans un monde pressé, l'action des éleveurs devient urgente. Ezzedine Ben Mustapha, vice-président de Synapri (syndicat des agriculteurs de Tunisie), raconte avoir des tarentaises sur son exploitation depuis de très nombreuses années : « Mon grand-père avait même déjà constitué son cheptel ». Pourtant, il témoigne que les choses changent : « Depuis quelques années, nous sommes inquiets. Les importations proviennent de plus en plus d'Uruguay. En 2013, cela représentait les deux tiers de nos importations en vifs ». Le prix n'y est pas pour rien, mais l'éleveur tunisien veut espérer que le savoir-faire français prévaudra sur l'argument du prix, notamment auprès des petits éleveurs. « Il ne doit plus s'agir seulement de vendre des animaux. Nous devons suivre les ventes jusqu'au petit éleveur qui produit », explique-t-il. Xavier Beulin d'ajouter : « Nous devons vendre aussi notre savoir-faire, exporter un peu de pédagogie ». Reste que le commerce mondial ne se fait pas que dans un sens. Les inquiétudes françaises et européennes s'expriment de plus en plus s'agissant des accords bilatéraux transatlantiques (Canada, Etats-Unis, Brésil). Dans ce dossier, les éleveurs n'ont pourtant d'autres choix que de s'appuyer sur le ministère français de l'Agriculture pour porter leurs intérêts auprès de Bercy et de Bruxelles. Ils savent bien qu'ils ne sont qu'une monnaie d'échanges parmi d'autres, comme le sont l'industrie et les services.
Accord libre-échange : des scénarios risqués pour l'aviculture européenne
Dans une étude diffusée le 4 février par l'université de Wageningen sur la compétitivité de la filière avicole européenne, les universitaires estiment le coût de production européen de la viande de poulet à 166 centimes d'euro par kilo de carcasse en 2011. Aux Etats-Unis, ces coûts sont moindres et estimés à 80% du coût européen. Au Brésil, la concurrence est encore plus rude avec un niveau de coût de production égal à 72% du coût européen. Sur la base de ces différences de compétitivité, les universitaires envisagent trois scénarios concernant les accords bilatéraux transatlantiques. Le « pire des scénarios » combine une baisse de 10% des taux de change des pays tiers étudiés (Etats-Unis, Thaïlande, Argentine, Ukraine, Brésil, Russie) avec une baisse de 50% des droits de douanes. « Dans ce scénario, tous les pays tiers (à l'exception de la Russie) deviennent beaucoup plus compétitifs que l'Union européenne », conclut l'étude. Ainsi, le prix du filet de poulet en Europe serait de 400 centimes d'euro le kilo contre 300 au Brésil ou encore 350 en Thaïlande.