Pression en vue de la LME !
fin du mois. Quelle que soit l’issue, cet accord ne restera qu’une mesure d’urgence. Le
véritable défi pour l’élevage français est de parvenir, en juin, à une
réforme de la LME, qui puisse permettre des négociations plus sereines
entre distributeurs, transformateurs, et producteurs.
Pour l'heure, tous s’accordent cependant sur la réévaluation du prix à la consommation, à répercuter sur le prix du lait payé au producteur. Mais c’est sur le volet des modalités que la mécanique se grippe et ne semble plus guère vouloir avancer.
La FCD fait une offre à 2 cts sur le lait de consommation
En effet, la Fédération du commerce et de la distribution (FCD), qui regroupe les enseignes Auchan, Carrefour, Casino, Cora et Monoprix, a proposé d’augmenter « de manière exceptionnelle, pendant les trois prochains mois », le prix d’achat de deux centimes d’euros par litre de lait de consommation. Une bienveillance toute relative selon Henri Brichard, vice-président de la FNSEA : « nous attendions un signe fort. Or, cela ne représente que 150 euros par éleveur sur les trois mois proposés ».
Système U et Leclerc englobent tous les produits laitiers
Serge Papin, le président de Système U, a de son côté maintenu sa proposition, à condition d’une adhésion de l’ensemble des distributeurs : elle s’établit à 3 centimes, sur 6 mois, et sur l’ensemble des produits laitiers. Selon Thierry Roquefeuil, président de la FNPL, c’est la condition indispensable : « il faut que la distribution accepte que l’ensemble des produits laitiers soient impactés dès le mois d’avril ». C’est le cas aussi de Leclerc qui a reprécisé sa position. Alignée au départ sur la mise de Système U, l’enseigne leader a finalement proposé l’instauration d’un fonds de 180 millions d’euros, financé à 49 % par les enseignes de la grande distribution et à 51 % par les industriels. De cette somme résulterait une hausse de 2 à 3 centimes du prix du litre de lait, pendant trois mois, a indiqué le 10 avril le patron de l’enseigne, Michel-Edouard Leclerc. Pourquoi 51 % pour les industriels ? « Car c’est la part de production destinée à l’export et à l’industrie (poudre de lait, beurre industriel, lactosérum, caséine) », a-t-il précisé. Une part qui échappe « totalement aux enseignes commerciales françaises ». Les 49 % restants, soit 89 millions d’euros, seraient pris en charge par les distributeurs qui écoulent environ 49 % des volumes de lait collectés en France destinés aux produits laitiers.
Dissension chez les transformateurs
Côté transformation, la position est aussi loin d’être unanime. Le président de la Fédération de l’industrie laitière (Fnil), Olivier Picot, aurait reconnu durant la table ronde la nécessité d’en faire profiter les producteurs en toute transparence. Mais une attention qui doit aussi profiter à la transformation, selon lui. De grands transformateurs se seraient de leur côté prononcés en faveur d’un scénario inédit. Il prévoirait la mise en place, par eux-mêmes, d’une hausse technique (donc hors négociation) de deux centimes d’euros à valoir par les distributeurs et à répercuter aux producteurs. Une mesure qui nécessiterait l’accord de l’ensemble des distributeurs.
La désignation du médiateur Francis Amand
Face à cet éventail de positions, le ministère de l’Agriculture a finalement chargé le 8 avril, à l’issue de la table ronde, Francis Amand, médiateur des relations commerciales, de superviser les négociations. « Les choses ont bougé, il faut maintenant que ça rentre dans le concret rapidement », a appelé Stéphane Le Foll. Le médiateur devra également s’assurer que « la totalité de la hausse soit au bénéfice des producteurs, que l’accord soit parfaitement transparent, et qu’il ne viole pas le droit de la concurrence ». « Si tout se passe bien, nous aurons terminé toutes ces étapes la semaine du 22 avril », a indiqué Francis Amand.
LME : front uni contre la grande distribution
Ils n’étaient pas moins de cinq dirigeants de syndicats ou organisations professionnelles (1) pour dénoncer le jeudi 11 avril, les pratiques de la grande distribution pour qui « les négociations ne sont plus qu’un simulacre ». Alors que vont s’engager les débats sur le projet de loi sur la consommation, ils en appellent aux pouvoirs publics pour que les distributeurs honorent les engagements qu’ils ont pris, jusqu’au plus haut niveau de l’État, pour faire appliquer strictement la loi existante, tout en y apportant des précisions pour qu’elle ne soit pas dévoyée et que des sanctions appropriées soient incluses pour les contrevenants. Les agriculteurs, ont répété les présidents de la FNSEA et de Coop de France, n’entendent pas jouer le rôle de variable d’ajustement pour la défense du pouvoir d’achat et être montrés du doigt comme ceux voulant assommer le consommateur. Les cinq participants sont unanimes : ils ne veulent pas d’une énième nouvelle loi, mais une application de celle existante qui doit être précisée. La loi actuelle ne fonctionne pas, car les acteurs de la distribution se sont habitués à ce qu’on ne les pénalise pas lorsqu’ils la méconnaissent. « Il faut que la Direction générale de la concurrence et de la répression des fraudes puisse imposer des sanctions immédiates afin que les mauvaises pratiques ne s’installent pas et que ces sanctions administratives soient réellement dissuasives », a indiqué Olivier Desforges, président de l’Ilec.
Révision de la LME : prix, volumes et promotion
C’est une révision substantielle de la LME à laquelle s’attellera la future loi sur la consommation si l’on en croit les propos de Guillaume Garot, ministre délégué à l’industrie agroalimentaire. La révision de la LME portera sur deux axes, a-t-il indiqué. D'une part « la volatilité des prix des matières premières, de telle sorte qu'on puisse induire un mécanisme de révision lorsqu'il y a ces espèces de yo-yo qui sont insupportables pour les producteurs ». D'autre part, le gouvernement entend « préciser les conditions de la discussion commerciale » en détaillant « non seulement le prix, les volumes, mais aussi les conditions de promotion, de telle sorte qu'on sache clairement à quoi s'en tenir et que les relations contractuelles, commerciales entre grande distribution, producteurs ou transformateurs soient parfaitement transparentes ».
La MSA soutien les éleveurs
La caisse centrale de la Mutualité sociale agricole (MSA) a adopté le 4 avril une résolution visant à accorder une enveloppe de 10 millions d’euros au secteur de l’élevage avec une attention spéciale portée aux éleveurs de porcs, de volailles et d’ovins (viande et lait). Les caisses locales de la MSA « seront ainsi invitées à examiner avec la plus grande bienveillance les demandes de prises en charge de cotisations sociales que leur présenteront les éleveurs en difficulté », souligne le ministère. Cette décision vient en complément des mesures mises en place par le gouvernement dans le cadre du plan de relance exceptionnel pour l’élevage, prévoyant notamment 44 millions d’euros d’aides couplées affectées aux secteurs bovin et caprin.
(1) Association nationale des industries alimentaires (Ania), FNSEA, Confédération générale de l'alimentation en détail (CGAD), Coop de France, Institut de liaison et d'études des industries de consommation (Ilec)