Qualité de l’air : Une problématique de plus en plus prise en compte par les agriculteurs
Emettrice de polluants atmosphériques, l’agriculture est également victime de la mauvaise qualité de l’air. Si la question de la pollution de l’eau est connue depuis de nombreuses années par le secteur, celle de la pollution de l’air par l’activité agricole est apparue plus récemment, mais de plus en plus d’initiatives sont prises par les professionnels agricoles pour améliorer les pratiques.

« La qualité de l’air est une préoccupation émergente. En cinq ans, on est passé d’une logique de rejet à une politique d’acceptation de partenariat par les agriculteurs », témoigne Jean-Marie Vinatier, chef de service Innovations agronomiques et territoriales à la Chambre d’agriculture d’Auvergne Rhône Alpes. De plus en plus, la profession travaille en collaboration avec d’autres acteurs et associations qui s’occupent de la qualité de l’air, à travers des projets communs dont certains ont été mis en lumière à l’occasion du colloque « Agriculture et qualité de l’air » organisé par l’APCA et ATMO France (Réseau National des Associations Agréées pour la Surveillance de la Qualité de l'Air) le 6 février.
L’agriculture est en effet émettrice de polluants atmosphériques : elle est responsable de 19 % des émissions de particules PM10, 10 % des particules PM2,5, et de 48 % des TSP (poussières en suspension). De plus, elle émet de 97 % de l’ammoniac (22 % issu des engrais azotés, 75 % issu des déjections animales), qui est un précurseur de particules. Cependant, le secteur agricole souffre aussi de la pollution, notamment à l’ozone, qui entraîne une perte de production de biomasse, des nécroses et une diminution des rendements. Sur le blé, des études ont montré une perte des rendements allant de -10 % à -20 % en Ile-de-France, explique Sophie Agasse, de la Chambre d’agriculture d’Ile-de-France, pour un coût représentant, en 2000, 850 millions d’euros.
Quels leviers ?
Face à cette prise de conscience, et devant la montée de cette préoccupation au niveau sociétal, le sujet de la qualité de l’air s’intègre donc de plus en plus dans la gestion des exploitations. Mais au milieu de nombreuses réglementations et normes qui s’appliquent en matière de produits phytosanitaires, existe-t-il des leviers plus puissants que d’autres pour réduire la pollution de l’air d’origine agricole ?
D’autant que certains facteurs sont indépendants de l’agriculteur, comme la météo, et que l’une des caractéristiques de cette pollution est qu’elle est diffuse, en raison des multiples sources d’émission. Pour Edwige Duclay, chef du bureau de la qualité de l’air au Ministère de la Transition énergétique et solidaire, « la réglementation a quand même un sens fort, mais elle ne peut pas être le seul outil », indique-t-elle, précisant que « le volet de l’aide est aussi important », et qu’un guide de bonnes pratiques a été mis en place avec le ministère de l’agriculture.
Mais l’objectif reste de réduire les émissions d’ammoniac de 13 % d’ici 2030. Attention cependant à la réglementation, explique de son côté Rik Vandererven, chef du bureau des Actions territoriales et agro-environnementales au ministère de l’agriculture : « on doit réfléchir pour que ce que l’on prône au niveau de la qualité de l’air ne soit pas être incompatible avec d’autres injonctions, sur la qualité de l’eau par exemple ».
C’est en effet le même acteur, l’agriculteur, avec le même itinéraire technique, qui est impacté, rappelle-t-il. La profession est en tout cas au travail, comme le montrent plusieurs projets communs. Dans le Grand Est, en partenariat avec ATMO Grand-Est, le projet Repp’air vise ainsi à réduire les émissions de produits phytosanitaires dans l’air, avec des enquêtes autour de 8 sites de mesure, dans l’objectif final de proposer des solutions techniques performantes aux agriculteurs. Dans les Hauts-de-France, c’est le projet Epand’air qui vise à réduire les émissions d’ammoniac, en comparant les méthodes d’épandage, en fonction de la météo, du type de couvert, etc... L’appel à projet pour le programme AgrAir va par ailleurs être relancé cette année par l’Ademe pour 2019, a annoncé Edwige Duclay.