Quid de la prestation de service internationale pour les vendanges ?
Le traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne permet à une entreprise ayant son activité dans un pays membre de l’union européenne de prester avec une entreprise implantée sur le territoire d’un autre état membre et d’y détacher des salariés le temps de la prestation.
Union Européenne (UE) : Allemagne, Autriche, Belgique, Bulgarie, Chypre, Croatie, Danemark, Espagne, Estonie, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Irlande, Italie, Lettonie, Lituanie, Luxembourg, Malte, Pays-Bas, Pologne, Portugal, République Tchèque, Roumanie, Royaume Uni, Slovaquie, Slovénie, Suède.
Espace économique européen (EEE) : Islande, Lichtenstein, Norvège
Accords bilatéraux : Suisse, Andorre, Monaco, San Marin

1 - Le cadre légal du détachement de travailleurs étrangers en France
A. Définition
La prestation de service internationale est une activité économique réalisée par une entreprise établie à l’étranger (le prestataire) au bénéfice d’un client (donneur d’ordre) dans le cadre d’un contrat de prestation de service.
Existence d’une activité réelle de l’entreprise prestataire dans son pays d’origine
L’entreprise étrangère qui détache un salarié doit être régulièrement établie dans le pays d’origine et y exercer principalement son activité. Elle ne doit intervenir en France que de façon temporaire (pour la durée de la mission). Elle ne peut avoir une activité habituellement stable et continue en France ou dans ce cas, elle aura l’obligation d’y créer un établissement, d’y payer des cotisations sociales, et de s’y acquitter d’obligations fiscales.
Situation juridique et conditions d’emploi du salarié détaché
Le salarié détaché doit travailler habituellement pour le compte de l’employeur avec lequel il a signé un contrat. La relation de travail entre l’employeur et le salarié doit subsister pendant la période de détachement et avoir été nouée avant ce dernier.
En droit du travail, les entreprises prestataires établies hors de France intervenant sur le territoire national sont tenues de garantir à leurs salariés des conditions de travail et d’emploi équivalentes à celles des salariés français notamment les dispositions sur le salaire minimum et son paiement (y compris les heures supplémentaires), la durée du travail, les congés payés, les jours fériés, les règles de sécurité, l’hébergement,…
Ainsi, par exemple :
Ä Le salarié étranger détaché touchera donc, pour le temps du détachement, le même salaire brut minimum que les salariés français travaillant pour le compte du donneur d’ordre.
2 - Les entreprises de travail temporaire (ett) étrangères
Une Entreprise de Travail Temporaire (ETT) peut, dans les mêmes conditions, détacher ses salariés dans une entreprise utilisatrice française. Les principes restent alors les mêmes, à savoir que le salarié étranger détaché par l’ETT en France sera soumis aux dispositions légales et conventionnelles françaises durant toute la période de détachement et notamment aux dispositions sur le salaire minimum et son paiement (y compris les heures supplémentaires), la durée du travail, les congés payés, les jours fériés, les règles de sécurité, l’hébergement, l’indemnité de précarité sauf s’il est embauché en CDI…
La prestation devra alors faire l’objet :
- D’un contrat de mise à disposition (individuel) conclu entre l’ETT et l’entreprise utilisatrice.
- D’un contrat de mission conclu entre le salarié et l’ETT pour chaque salarié détaché.
- Les règles relatives aux motifs de recours et aux délais de carence doivent être respectées.
- Les salariés intérimaires détachés doivent être portés sur le registre unique du personnel de l’entreprise utilisatrice.
Ä Ces documents peuvent être demandés lors d’un contrôle.
3 - Les obligations du donneur d’ordre
Si vous faites appel à un prestataire établi à l'étranger (ETT ou prestataire de services), vous devez en premier lieu, vérifier que celui-ci a désigné un représentant de son entreprise sur le territoire national. En outre, il vous faut également vérifier que celui-ci a bien fait une déclaration de détachement temporaire des salariés qu'il fait travailler en France, auprès de la DIRECCTE du lieu où s’effectue la prestation, avant le début de celle-ci.
Il convient d’être très vigilant, notamment si les prix proposés sont anormalement bas par rapport au coût d’une embauche « classique » par CDD, et de bien procéder aux vérifications réglementaires.
Depuis 2014, la réglementation a instauré de nouvelles obligations de vigilance pour les donneurs d’ordre (l’utilisateur) contractant avec un employeur établi en France ou à l’étranger :
- Obligation de demander au prestataire étranger une copie de la déclaration de détachement qu’il a adressée aux services de l’Inspection du Travail du premier lieu d’intervention avant le début de la prestation.
A défaut, le donneur d’ordre doit procéder à une déclaration subsidiaire auprès de l’Inspection du Travail dans les 48 h suivant le début du détachement. Cette déclaration devra notamment comporter des renseignements sur l’entreprise étrangère, les coordonnées de son représentant en France, l’identité des salariés détachés, les lieux successifs où doit s’exercer la mission, etc.
Ä A défaut, le donneur d’ordre sera passible d’une sanction administrative[1] de 2 000 euros par salarié détaché et une suspension temporaire de la PSI pourra être prononcée par le DIRECCTE.
- La déclaration de détachement doit être annexée au registre unique du personnel du donneur d’ordre.
- Obligation de demander au prestataire avant le début du détachement, une copie de la désignation écrite de son représentant en France.
o Ce représentant en France est l’interlocuteur des services de contrôle français et doit pouvoir transmettre sans délai, à la demande de l’Inspection du Travail, l’ensemble des documents prévus par les dispositions réglementaires. Il doit disposer d’une adresse électronique et postale en France (informations portées sur la déclaration de détachement).
Ä Si le donneur d’ordre ne s’est pas assuré de cette désignation, le donneur d’ordre est passible d’une sanction administrative.
Désormais le donneur d’ordre a de nouvelles obligations de vigilance et de diligence et doit en cas d’information d’un agent de contrôle de manquements constatés :
En matière de paiement du salaire : enjoindre l’entreprise qui ne paye pas le salaire minimum à ses salariés détachés de faire cesser cette situation. S’il ne procède pas à l’injonction ou à défaut de régularisation, s’il ne dénonce pas le contrat de prestation de service, le donneur d’ordre sera tenu solidairement au paiement des rémunérations et indemnités dues à chaque salarié détaché.
En matière de non respect du socle réglementaire du code du Travail (durée du travail, repos, congés, etc) : enjoindre l’entreprise de régulariser sans délai la situation. A défaut d’injonction, le donneur d’ordre est passible d’une contravention de 5ème classe.
En matière de conditions d’hébergement incompatibles avec la dignité humaine : enjoindre l’entreprise de faire cesser sans délai la situation irrégulière. A défaut de régularisation, le donneur d’ordre est tenu de prendre à sa charge l’hébergement collectif des salariés dans des locaux aménagés conformément aux dispositions réglementaires.
Ä Une suspension temporaire de la PSI, pour une durée d’un mois maximum peut être prononcée par la DIRECCTE, en cas de constats par un agent de l’Inspection du Travail de :
o manquements graves par l’employeur étranger aux dispositions relatives au respect du SMIC, au repos quotidien ou hebdomadaire, à la durée quotidienne ou hebdomadaire du travail,
o manquement à l’obligation de présentation des documents devant être tenus à sa disposition,
o conditions de travail ou d’hébergement incompatibles avec la dignité humaine,
o défaut de réception de la déclaration préalable de détachement.
Ä Depuis le 1er avril 2017, le formulaire A1 ou le formulaire équivalent (justificatif de la protection sociale du salarié détaché), doit pouvoir être présenté aux services de contrôle par le salarié, l’employeur ou son représentant en France, sur le lieu d’exécution de la prestation ou chez le cocontractant. Le défaut de présentation de ce formulaire entraine une pénalité administrative mis en œuvre par la MSA : elle est due par le donneur d’ordre (3 269 euros par salarié, pour l’année 2017).
La pénalité n’est pas applicable en cas de production, lors du contrôle, d’un justificatif attestant du dépôt de la demande d’obtention du formulaire, suivie de la production, dans un délai de deux mois à compter du contrôle, du formulaire délivré à la suite de cette demande.
4 - L’hébergement
Les règles relatives à l’hébergement collectif des salariés agricoles s’appliquent aux salariés détachés.
Il convient en premier lieu d’adresser une déclaration d’hébergement à la préfecture et à l’Inspection du Travail.
Ä Le défaut de déclaration est puni d’une peine d’amende de 300 à 6 000 euros et d’une peine d’emprisonnement de 2 mois à 2 ans.
Le logement mis à disposition doit respecter les règles d’hygiène et de sécurité suivantes :
- Les travailleurs ne peuvent être hébergées ni en sous-sol, ni sous des tentes, ils doivent pouvoir clore leur logement et y accéder sans danger et librement.
- Les logements doivent être isolés des lieux où sont entreposés des substances et préparations dangereuses au sens de l'article R 4411-6 du code du Travail ou des produits susceptibles de nuire à la santé de leurs occupants.
- Ils doivent aussi être éloignés des dépôts de matières malodorantes et toutes mesures doivent être prises pour assurer la destruction des parasites et des rongeurs.
- Les matériaux utilisés pour leur construction ne doivent pas être de nature à porter atteinte à la santé des occupants et doivent permettre d'évacuer les locaux sans risque en cas d'incendie.
- Les appareils à combustion destinés au chauffage et à la cuisson ainsi que leurs conduits, gaines et accessoires ne doivent pas être susceptibles de porter atteinte à la santé ou à la sécurité des occupants.
- Les installations électriques doivent préserver la sécurité de leurs utilisateurs.
- Les logements doivent être construits en matériaux permettant d'éviter les condensations et températures excessives. Ils doivent être aérés de façon permanente.
- La hauteur sous plafond ne peut être inférieure à deux mètres.
- Dans les pièces destinées au séjour et au sommeil, la surface des fenêtres doit être au moins égale à un dixième de la surface au sol de chaque pièce. Dans les pièces destinées au sommeil, les fenêtres doivent être munies d'un dispositif d'occultation.
- Les couloirs et les escaliers doivent être suffisamment éclairés pour assurer la sécurité des déplacements.
- Sauf s'il s'agit d'une exploitation agricole qui n'est pas desservie par un réseau d'alimentation en eau courante, les installations d'eau doivent assurer une distribution permanente d'eau potable, avec une pression et un débit suffisants. Les robinets des éviers, lavabos et douches, dans la même hypothèse, doivent fournir de l'eau à température réglable.
- Les cabinets d'aisances ne doivent pas communiquer directement avec les pièces destinées au séjour et aux repas. Leurs portes doivent être pleines et munies d'un dispositif de fermeture intérieure condamnable de l'extérieur. Ils doivent être équipés d'une chasse d'eau, sauf s'il s'agit d'une exploitation agricole qui n'est pas alimentée en eau courante.
- Les sols, murs et plafonds doivent être protégés contre les eaux de ruissellement, les infiltrations et les remontées d'eau.
- Les fenêtres doivent être étanches à l'eau et maintenues en bon état.
- Le logement doit être en bon état d'entretien.
- La température doit pouvoir être maintenue à 18 °C.
- Chaque travailleur doit avoir à sa disposition une literie totalement équipée, propre et en bon état et une armoire individuelle fermant à clef.
- Les locaux où sont préparés et pris les repas sont équipés des ustensiles de cuisine et des appareils de cuisson nécessaires et en état d'utilisation, d'appareils de réfrigération ; de tables et de sièges. Cet équipement doit être suffisant pour que les travailleurs puissent, dans des conditions satisfaisantes, préparer leurs aliments et les consommer dans les délais dont ils disposent pour prendre leurs repas. L'employeur met également à la disposition des travailleurs un nombre suffisant de poubelles pouvant être fermées et munies de sacs adaptés.
- A chaque cabine de douche est associé un espace de déshabillage protégé des projections d'eau. Chaque cabinet d'aisances est pourvu d'une brosse adaptée au maintien de sa propreté et de papier hygiénique.
Ä Une suspension temporaire de la PSI pourra être prononcée par le DIRECCTE en cas de non respect de ces règles.
1 La sanction administrative : depuis 2016, une procédure administrative de sanction peut être mise en œuvre par le DIRECCTE pour certains manquements à la réglementation. Les amendes prononcées peuvent être de 2 000 euros (multipliée par le nombre de travailleurs concernés).