Réinvestir les paramètres techniques et économiques
large place aux mesures déployées pour accompagner les entreprises dans
la conjoncture que l’on connaît. Parmi les mesures d'accompagnement,
l'audit d'exploitation ou de filière reste largement sous-utilisé alors
qu’il peut s’avérer être un levier essentiel de compétitivité
individuelle et collective.

De grandes disparités
Les grandes cultures - qui conjuguent mauvaise récolte et qualité médiocre face à une moisson mondiale de très bonne tenue - paient le prix fort. « Entre les exploitations, les écarts se creusent », observe François Roze, « et ces disparités inquiètent car elles révèlent des fragilités ».
La viticulture connaît « une situation saine mais fragile » et si l'on analyse le risque financier, alors que « 20 % des viticulteurs sont dans une situation à risques moyen ou élevé ».
Pour le lait, les signaux positifs viendraient du marché mondial, alors que la production en Europe marque le pas, l’heure est au repli et ce pourrait être « une tendance lourde » alors que les fortes tensions sur les prix accentuent les écarts entre productions sous AOP et lait standard. Le résultat net est quasi inexistant.
En production de viande, les réformes laitières pèsent sur le marché et la tendance est baissière pour toutes les vaches. Le marché des broutards reste sous pression, en dépit d'un contexte plus favorable en Italie qui soutient le marché export.
Ce constat établi vaut pour beaucoup d'autres productions moins représentatives mais tout aussi essentielles au secteur, il s'agit d'en analyser les conséquences et de mettre en place les moyens nécessaires pour en pallier les effets les plus négatifs. L'analyse révèle certaines distorsions, certains « discriminants » entre les exploitations : la performance technique, la performance économique et la solidité financière. Les trois socles sur lesquels repose la bonne santé d'une exploitation et surtout sa capacité à résister aux multiples aléas tels que ceux que l'agriculture régionale vient de subir.
Ne plus naviguer à vue
Pour la chambre régionale, la réponse se trouve en partie dans une meilleure connaissance de son exploitation et des leviers à actionner pour améliorer ou inverser une situation identifiée comme à risque. Tel que soutenu par le Conseil régional et le Conseil départemental de Saône-et-Loire, l’audit se veut avant tout comme un outil de pilotage qui permet d’éviter de naviguer à vue comme le ferait un marin qui aurait perdu sa boussole et se retrouverait sans cartes.
Utiles et fortement conseillés, ces audits sont tout aussi utiles quand, par temps calme, il s’agit de faire le point et d'identifier précisément ses forces et ses faiblesses. « Les chambres d'agriculture entendent relever le défi des audits d'exploitation ; c'est une façon pour l'exploitant de réinvestir les périmètres techniques et économiques de son exploitation », insistait Christian Decerle, président, tout en ajoutant que « l'avenir se jouera plus certainement sur la ressource individuelle et collective de l'agriculture et de son environnement que sur des aides externes, devenues de plus en plus incertaines du fait que l’argent public se fait rare ».
De son côté, Sophie Fonquernie, vice-présidente du Conseil régional en charge de l'agriculture, regrettait le faible nombre de dossiers d'audit déposés à ce jour et l’importance pour tous de se mobiliser sur le sujet. Même écho du côté de la Draaf, représentée par sa directrice adjointe, Huguette Thien-Aubert, qui enjoignait les agriculteurs à se rapprocher de leurs organisations départementales et des structures susceptibles de les accompagner au mieux.
Autre sujet d'inquiétude exprimé lors de la session par certains membres, les effets d'une réforme territoriale qui redistribue les compétences entre Région et Départements. Thierry Chalmin, président de la chambre de la Haute-Saône, traduisait le sentiment général en indiquant se sentir « un peu orphelin » et Christian Decerle alertait à « ne pas perdre un bon sens de terrain proche de la réalité agricole, qu'elle soit agronomique ou économique ».
Trois motions
La session a été l’occasion pour les membres de débattre et de voter trois motions reflétant les inquiétudes de l’agriculture régionale sur des sujets d’actualité.
Sur les Zones défavorisées simples
« Les membres demandent que soit reconsidérée la situation des communes qui présentent une proportion importante de fortes contraintes pour la cartographie des zones soumises à contraintes naturelles ». La motion relève « les incohérences par rapport au classement sur la base des critères biophysiques, à l'application du critère de la production brute standard, à l'application du taux de chargement ». Ces incohérences « doivent être impérativement corrigées ». Pour le classement en Zone défavorisée simple, les membres de la chambre régionale demandent qu'une commune soit classée dès lors qu'elle respecte au moins trois critères : « le critère herbager, « surface fourragère/surface agricole utile supérieur à 30 % et un taux de chargement inférieur ou égal à 1,4 » ; le critère de la polyculture élevage avec un taux d'exploitation en polyculture élevage à l'échelle de la commune doit être supérieur ou égal à 25 % ; le critère PPRI, c'est-à-dire économique, pour les communes ayant un plan de prévention des risques d'exploitation ». De plus, la motion rappelle qu’il est « indispensable de prendre en compte les spécificités des zones de piémont, tout en excluant aussi pour les éleveurs, la production brute standard des communes viticoles ».
Sur la directive Nitrate
Autre motion votée par les membres de la chambre régionale, que « l'ensemble des communes impactées par le projet de zonage de la directive Nitrate, au titre des eaux souterraines, soit retiré » et que « toutes les communes impactées par le projet de zonage de cette même directive Nitrate au titre des eaux superficielles fassent l'objet d'une nouvelle analyse prenant en compte toutes les données pour juger objectivement de la nécessité ou non de classement ».
A l’adresse du Conseil régional
Enfin, les membres ont demandé à la Région, « seule responsable de la stratégie économique sur son territoire », de mettre en place « une véritable ambition pour l'agriculture et l'agroalimentaire de la Bourgogne Franche-Comté au service de tous les marchés : circuits longs, circuits courts, grossistes, restauration hors domicile, distribution, export ». Ils ont encore appelé la collectivité à « une volonté réaffirmée d'accompagner les investissements productifs et l'innovation en encourageant la contractualisation et l'organisation des filières », à un « renforcement des liens entre le monde économique et les systèmes de formation pour ne pas rester isolé et faciliter l'insertion des jeunes vers l'installation ou l'emploi dans le secteur agricole », et pour conclure à « une clarification rapide de la Région sur ses actions en faveur du secteur agricole avec des modalités précises sur leur gestion pour les années 2016 et 2017 ».