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Rencontre filière semences

« Le pois a de l’avenir »

Le pois protéagineux souffre d’un manque de production, pas de débouchés.

« Le pois a de l’avenir »

La rencontre filière semences, organisée par l’Interprofession des semences et plants Semae et l’Association générale des producteurs de blé (AGPB) à Paris, a permis de voir une filière des protéagineux – exception faite de la féverole – « véritablement sinistrée », selon Thierry Momont, président de la section céréales à paille et protéagineux (Semae). Le qualificatif s’applique avant tout à la culture du pois, dont les surfaces dégringolent depuis une trentaine d’années : plus de 700.000 ha en 1993, mais seulement 122.000 ha en 2024, constate Adrien Dupuy, agriculteur dans l’Oise et administrateur de la Fédération française des producteurs d’oléagineux et de protéagineux (Fop). Cette « spirale descendante infernale » a plusieurs origines, ont expliqué les participants à la table ronde : la suppression de l’aide à l’utilisation par les fabricants d’aliments du bétail en 1995, l’infestation racinaire par le champignon Aphanomyces, le changement climatique, un certain manque de technicité (dates et matériels de semis, traitements fongiques) lié au fait que le pois est « parfois vu comme une culture administrative pas toujours implantée sur les meilleures parcelles ». Pas toujours récoltée non plus, si le tonnage ou la qualité sanitaire ne sont pas au rendez-vous. En termes de chiffre d’affaires, surtout, il souffre de la comparaison avec d’autres espèces végétales : « 800 à 900 €/ha contre 1.200 à 1.300 €/ha pour un mauvais blé ».

Gagner 10 quintaux en 10 ans

Le pois, outre qu’il ne souffre pas de problèmes de débouchés, mais d’un volume insuffisant pour sécuriser les usines de nutrition animale, « a toute sa place dans l’assolement au regard de ses atouts agronomiques et sociétaux », assure Adrien Dupuy. « C’est un super précédent pour le blé, pas trop cher à produire ». Même sur le plan économique, « les agriculteurs qui apprécient cette culture ne s’en sortent pas si mal sur dix ans ». « Les nouvelles génétiques pois se récoltent mieux », ajoute François Cuvelier, directeur commercial d’Agri Obtentions. Plus largement, les sélectionneurs se fixent comme objectif de gagner dix quintaux en dix ans pour viser les 45-55 q/ha. Même si les crédits alloués au plan protéines ont été revus à la baisse, « ça devrait le faire pour les protéagineux », estime Jean-Fred Cuny, directeur général de la Sicasov*. Il faudra néanmoins composer avec « un taux d’utilisation des semences certifiées en baisse constante », qui pourrait ne plus dépasser un tiers dans un proche avenir, a-t-il laissé entendre. Faut-il pour autant délaisser la recherche variétale ?

Une CRIV 2025-2028

Pas question, répond en substance Eric Thirouin, président de l’AGPB. « Le progrès (génétique, ndlr) est encore là, même si le changement climatique nous contraint. Nous devons démontrer que le travail des obtenteurs améliore nos produits. Nous devons aller de l’avant ». Aussi a-t-il dit son accord pour « un renouvellement de la contribution à la recherche et à l’innovation variétale sur les trois ans à venir ». Cette cotisation, prélevée sur la collecte des grains, fait l’objet d’un accord interprofessionnel triennal qui court jusqu’au 30 juin 2025.

 

(*) La Sicasov gère la plupart des variétés végétales protégées produites sous licence dans le domaine des grandes cultures en France.