Sanglier, ragondin, bocage... : travailler ensemble pour être efficace
En Saône-et-Loire, agriculteurs et chasseurs ont toujours su entretenir de bonnes relations de travail, de sorte à conjurer les excès quels qu’ils soient. A l’heure où les populations de sangliers se développent partout en France et que des espèces nuisibles comme le ragondin font peser un vrai risque de santé public, la mobilisation collective est plus que jamais incontournable. Explications avec le président de la FDSEA Bernard Lacour.

Qu’en est-il de la problématique des dégâts de sangliers en Saône-et-Loire ?
Bernard Lacour : D’abord, il faut saluer les relations de travail entre chasseurs et agriculteurs en Saône-et-Loire. Ce sont des gens qui, par essence même, partagent un même ADN : la nature. Pour préserver ce bon état d’esprit, il faut être en capacité de régler les excès et les problèmes où qu’ils soient.
Sur le sanglier, il faut saluer les efforts faits par les chasseurs. Grâce à des prélèvements supérieurs aux autres années, ils ont réussi à contenir les dégâts la saison passée.
Mais il existe une vraie problématique de surpopulation de sangliers à l’échelle du département avec une évolution de cette faune vers la plaine. Tant que les sangliers sont cantonnés dans les bois, il n’y a pas de problème. Mais dès lors qu’ils gagnent les champs et les prairies, cela devient insupportable pour les agriculteurs.
Il faut accentuer les efforts là où il y a des problèmes.
Il existe trois ou quatre points critiques dans le département où l’on a laissé les populations se développer en véritables lots de sangliers. La cause en est souvent des chasses commerciales dont les responsables n’ont qu’un objectif : avoir des sangliers à tirer le jour J.
Il faut à tout prix trouver un équilibre. Si nous ne sommes pas capables de le faire, des risques sanitaires menacent. La peste porcine s’approche de la France. Les risques encourus, si l’on ne maîtrise pas les populations de sangliers, sont importants.
Les agriculteurs ne cultivent pas pour toucher des indemnités, mais pour faire des récoltes qui leur permette de gagner leur vie.
L’an dernier, l’association Cultivons nos Campagne avait initié un plan de régulation du ragondin à l’échelle du département. La démarche semble aujourd’hui compromise. Qu’en est-il ?
B.L. : Le ragondin est une problématique large. Redouté dans un premier temps pour ses dégâts occasionnés aux ouvrages hydrauliques, cours d’eau, routes... il est désormais un problème sanitaire, de santé et de salubrité publique. Chacun doit donc prendre ses responsabilités.
Avec Cultivons nos Campagnes qui rassemble tous les maillons du monde rural, nous avons voulu sensibiliser le Département, les Communautés de communes, les Communes pour que s’amorce un véritable plan de régulation du ragondin. Malheureusement, la situation s’est enlisée depuis et est même au point mort.
Personne ne nie le fait que les piégeurs sont les mieux placés pour le faire et que la régulation des ragondins passe par l’accompagnement de ceux qui font cette régulation. Mais il faut sortir des politiques de chapelles et travailler dans le seul objectif de l’efficacité avec cette finalité de faire baisser les effectifs de ragondins. Il faut se mettre autour d’une table et s’en donner les moyens. Mais pour être efficace, il faut mutualiser ces moyens.
Certes, il est plus motivant de tuer un sanglier qu’un ragondin. Pour un certain nombre de chasseurs, la régulation des espèces est sans doute très secondaire. Mais il s’agit là d’un problème de santé publique avec des risques pour les animaux et pour les hommes (fièvre Q, leptospirose). Au niveau de la profession, le GDS est lui-même demandeur d’une régulation. La situation ne peut plus attendre et nous devons y répondre tous ensemble.
En Bresse, la fédération départementale des chasseurs accompagne des agriculteurs dans un plan de gestion de leurs haies. C’est un bel exemple de valorisation du bocage n’est-ce pas ?
B.L. : Il existe une volonté en Saône-et-Loire de conserver cette biodiversité qui façonne les paysages du département. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si le Charolais-Brionnais est candidat au patrimoine de l’Unesco. Le bocage est quand même le fruit du maintien de l’élevage. Au-delà des paysages et de la biodiversité, le bocage représente aussi une ressource intéressante en termes d’énergie pour le chauffage. Et dans une région d’élevage très dépendante à la paille, il peut également fournir une alternative au paillage grâce au bois plaquettes utilisé en litière. Dans certains secteurs, il existe des possibilités de conserver le bocage et d’y mettre des moyens techniques. C’est le cas en Bresse et ailleurs en Saône-et-Loire. C’est un travail à faire, là encore, ensemble, avec les agriculteurs, les organisations agricoles ; les coopératives, les CUMA… et les partenaires ruraux. Il faut tout de même reconnaitre l’existant. Dans nos bocages, la biodiversité n’a pas disparu, loin s’en faut et l’agriculture n’a pas l’obsession d’arracher les haies ! Nous devons enclencher une vraie évolution dans l’intérêt commun. Pour que quelque chose marche, il faut que ce soit gagnant/gagnant.