« Se méfier d’un certain élitisme »
générale à Beaune. Un bilan en cette fin d’année 2014 qui a vu le retour
à la « normale » d’une récolte devant permettre de reconstituer des
stocks et approvisionner les marchés. Des marchés qui restent porteurs.
Pourtant, en amont, le négoce annonce déjà de possibles « baisses » à
venir. Poursuivant ses travaux pour la « montée en gamme », le BIVB
invite cependant à ne pas verser dans « l’élitisme ».
Des données pour bien exporter
Pour surveiller ses évolutions, le pôle Marché & Développement met à disposition des vignerons et négociants « un outil simple et modernisé » pour tout comprendre des 26 pays à « potentiel de croissance », ciblés par le BIVB. D’autres études synthétiques (et complètes) « alimentent » les réunions professionnelles ou l’événement annuel Vinomarket, indiquait Philippe Longepierre, le directeur du pôle. Sur l’extranet, 200 fiches AOC (contre 60 auparavant) permettent d’analyser l’export ou les tendances de consommation.
Des consommateurs qui sont également scrutés par le Pôle Marketing & Communication. La Bourgogne s’est recentrée sur « l’art de vivre et le plaisir des sens », indiquait Pascal Loridon, directeur de ce pôle. Un message porté en France directement dans les écoles hôtelières ou les clubs œnologiques de “grandes” écoles... La nouvelle campagne publicitaire « dans la presse professionnelle et économique a permis 12 millions de contacts sur les 35-64 ans CSP+ ». Les relations Presse restent efficaces avec 1.839 retombées dans l’année. Un Community Manager va prochainement venir renforcer la présence (et la défense) des vins de Bourgogne sur Internet et les réseaux sociaux. Un quart des 1,2 millions de visiteurs du site web du BIVB provient de connexions à l’étranger. D’ailleurs, les actions du BIVB à l’export se dérouleront principalement en Angleterre, en Amérique du Nord, au Japon puis en seconde place en Chine (et Hong Kong), en Norvège ou encore en Suède. A l’export, les personnes ciblées sont des importateurs, des sommeliers, des cavistes et des distributeurs, et des journalistes comme lors d’événement (Terroirs et signatures, White parties, Discover the origin). C’est ce public que doivent, selon lui, viser maintenant les « Grands jours de Bourgogne », réussis en 2014.
« Il faut se méfier d’une image élitiste à l’extrême, mettait toutefois en garde Louis Fabrice Latour qui veut pour 2015 redire l’accessibilité des vins de Bourgogne, avec des vins à des prix raisonnables ».
Rester vigilants sur les marchés
Il s’agit de ne pas faire fuir les clients et les touristes. Le BIVB veut d’ailleurs mieux « accompagner » (charte Vignes en cave, label Vignobles et découvertes…) ces derniers, avec l’aide des offices de tourisme, la Région… car « 82 % d’entre eux viennent d’abord pour le vin ». « Nous le ferons en nous appuyant aussi sur les routes des vins, mais surtout, le futur classement des Climats de Bourgogne sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco, dont nous ne doutons pas, et enfin, notre grand projet de Cité des vins de Bourgogne », avançait confiant Claude Chevalier. Le tour de table des partenaires se poursuit.
Comme il le rappelait un peu plus tôt dans son rapport moral, la mission économique est la base de l’interprofession, pour mieux informer les professionnels et orienter les actions du BIVB, en aval comme à l’amont. Le président allait dans le même sens que Louis-Fabrice Latour sur la vigilance à garder sur les marchés des vins de Bourgogne. « Les faibles récoltes se répercutent sur les cours et nous pénalise sur les marchés. Il suffit de faire le tour du monde, les gens ont tendance à moins acheter. Donc, on doit raisonner nos augmentations même si quelque fois elles sont légitimes ». Mais contrairement au représentant du négoce, il ne visait pas là les régionales, mais plutôt les crus puisqu’il indiquait ensuite la poursuite des travaux « de repositionnement » pour les AOC mâcons et bourgognes. Une « montée en gamme » qui doit permettre de retrouver des marges et de la rentabilité pour le plus grand nombre. Ce qui est bien la mission première de l’Interprofession…
« Recentrer » les priorités techniques
Le directeur du pôle Technique & Qualité, Jean-Philippe Gervais listait les travaux, études et recherches engagés pour arriver à 200 millions de bouteilles « irréprochables dans une logique de Développement durable » pour la filière. En voyant la dispersion des moyens de recherches, le BIVB va « se recentrer » avec d’autres interprofessions réunies au sein du Cniv pour « conforter en 2015 la stratégie de recherche vis-à-vis de la lutte contre les maladies du bois et de la flavescence dorée ». C’est d’ailleurs l’ancien président du BIVB, Michel Baldassini qui est responsable de ce dossier au Comité national interprofessionnel des vins AOC de France. Une bonne chose puisque la Crecep a disparu au profit du Pôle Bourgogne Vigne & Vin qui n’est pas encore pleinement opérationnel.
Viroses, relance du potentiel de production, programme de création variétale (hybrides résistants), drones avec caméra pour détecter les maladies, stimulation des résistances naturelles des plants (avec Vitagora), nouvelle méthode moléculaire pour détecter les Bretts (Coeb), mycorhizes… les chantiers sont nombreux !
Une « prise de recul » est donc nécessaire pour réfléchir sur le long terme. Comme le permet le développement durable de son exploitation, mesurable grâce à un simple questionnaire –« autodiagnostic »– en ligne créé par le BIVB.
Mais le plus gros changement de l’année vient tout de même de la fusion des deux organismes de contrôle de Bourgogne et du Beaujolais, donnant naissance à SiqoCert. Les échanges d’informations « devraient s’optimiser » entre la CAVB, SiqoCert et le BIVB pour améliorer aussi le suivi aval de la qualité (SAQ). Le président de SiqoCert voyait là une opportunité de « simplifier la vie des opérateurs sur le déclaratif ». Christophe Ferrari veut en faire « un organisme qui fasse bouger les lignes ». S’il est encore trop tôt pour parler d’un rapprochement complet Bourgogne-Beaujolais, comme en souriait Claude Chevalier, l’administration de son côté se prépare à la prochaine réforme des territoires. Représentant le préfet de la Région Bourgogne, François Castanié expliquait que la « Draaf et FranceAgriMer s’insèrent dans le pas de temps » « précurseurs » du rapprochement voulu par les conseils régionaux de Bourgogne et de Franche-Comté.
Ne jamais « diluer » le champagne
Le directeur de l’interprofession des vins de Champagne, Jean-Luc Barbier est venu présenter sa « stratégie de défense » –véritable « mission régalienne » (loi du 12 avril 1941) confiée au CIVC– pour lutter contre l’usurpation, les contrefaçons et tout détournement de notoriété de l’AOC champagne. Six personnes dans quatorze bureaux à travers le monde –« et très tôt sur les marchés où nous souhaitons mettre en place des actions (Inde, Chine, Russie) »– tissent un réseau d’avocats spécialisés dans 70 pays. Ces cinq dernières années, 2.151 dossiers ont été réglés et 1.171 nouveaux sont en cours. L’Interprofession consacre 20 % de son budget à cette protection, soit deux millions d’€ par an. « La valeur de l’appellation résulte du lien exclusif entre le nom et le produit, sinon, le champagne se dilue ». En faisant un point historique sur les premières décisions de justice (septembre 1844), aujourd’hui, « les tribunaux sont lents et les sanctions sont faibles. Autant dire presque une incitation à la contrefaçon », fustigeait-il alors que le CIVC évoque régulièrement ces sujets avec les Gardes des Sceaux successifs. La faute peut-être aussi à trop grande maîtrise de son image de marque. « Nous essayons que les média ne soient pas informés car cela donnent une mauvaise image aux produits ». L’Interprofession avance en attendant à l’étranger et a fait reconnaître la marque champagne sur tous les continents. Mais restent deux « points de résistance » et pas des moindres : les Etats-Unis d’Amérique et la Russie. Contrairement aux idées répandues, il citait la Chine comme « un pays exemplaire » en matière de lutte puisque l’AOC champagne a obtenu toutes les protections prévues par la réglementation chinoise « et les sanctions tombent (fermeture de magasins, amendes…) ce qui fait qu’il y en a très peu… ». Le champagne a en revanche plus de mal contre les “usurpations légalisées”, c’est-à-dire des produits portant la marque champagne qui respectent la réglementation de leur pays d’origine, comme c’est le cas en Amérique. Le CIVC se bat aussi contre tout autre produit inscrivant le mot champagne, allant des cigarettes (Seïta en 1982) jusqu’au foie gras parfumé au champagne, récemment sanctionné (novembre 2014). Une bataille « infinie » qui a lieu aussi sur Internet, pour tout dépôt de marque, de dénominations sociales, de noms de magasins ou bars à champagne et même pour la couleur « qui n’est plus dans le dictionnaire ».
Le président de la Fédération des exportateurs de vins et spiritueux (FEVS), Louis-Fabrice Latour appréciait de voir le lobbying « plus subtil » mis en place dans le cadre des négociations trans-Atlantique (Tafta) visant à la protection des appellations dites « semi-génériques », incluant burgundy ou chablis. Délaissant quelque peu de côté la défense des mentions “clos, château…”, la Bourgogne a « des progrès à faire » sur ce sujet « vital ». En concert avec les ODG, le BIVB pourrait bientôt lancer la réflexion en ce sens.
Cité des vins de Bourgogne : avoir des garanties solides
Le trésorier, Albéric Bichot détaillait le budget de l’Interprofession qui sur « 100 € de cotisations, 81 € vont aux actions ». Si le budget est positif, du fait de sorties plus importantes que prévues, le Contrôleur général économique et financier, Alain Jouve attirait l’attention des professionnels sur le « lourd » projet de Cité des vins des vins de Bourgogne, qui puisera dans les réserves financières, et donc qui nécessitera une implication « forte » des partenaires.