SIA : une bonne cuvée 2025
Le Salon international de l’Agriculture vient de refermer ses portes sur un bilan positif : la fréquentation a été légèrement en hausse, avec 607.503 visiteurs contre 603.652 en 2024. Le nombre de visites politiques et institutionnelles a, lui aussi, connu une légère croissance, passant de 82 (2024) à 88, dans des conditions apaisées grâce à la charte mise en place par les organisateurs. « Cette édition a aussi été celle d’une fierté revendiquée : celle des femmes et des hommes qui font vivre l’agriculture française et portent haut son excellence, son savoir-faire et son engagement pour l’avenir ».

Vice-président de la FNSEA, Jérôme Despey, également président du SIA, a souligné sa « fierté de voir que nous avons tous – exposants, éleveurs, producteurs, visiteurs et organisateurs – retrouvé notre Salon avec autant d’enthousiasme et d’engagement ! Il a été aussi serein qu’intense, et je suis heureux d’avoir reçu autant de retours positifs ». Principal événement de communication professionnel de l’année, le Salon a été comme toujours l’occasion de beaucoup d’annonces tant en direction du grand public que des professionnels. Voici une sélection.
« L’Amour est tout près » ou pas…
L’initiative vaut d’être soulignée. Elle part d’un bon sentiment. Elle est bénévole et généreuse. Karine Le Marchand, animatrice de l’émission L’Amour est dans le pré, a réuni le 26 février sur le Salon de l’agriculture cinq acteurs de la grande distribution : Alexandre Bompard (Carrefour), Thierry Cotillard (Intermarché), Dominique Schelcher (Coopérative U), Guillaume Darrasse (Auchan Retail) et Philippe Palazzi (Casino). Lidl et Leclerc ont décliné l’invitation. Objet : dévoiler une charte d’engagement contenant trois mesures de soutien à l’agriculture. Objectif : « récréer une nouvelle dynamique entre les agriculteurs, les distributeurs et les consommateurs ». Il s’agit notamment d’aider les producteurs en difficulté à vendre directement leurs produits locaux aux enseignes de la grande distribution situées dans un rayon de 100 km de leur exploitation ; de créer un dispositif inédit face aux crises de surproduction par un « système d’alerte en temps réel » ou encore de créer « un observatoire des filières d’avenir ». Les premières réactions n’ont pas tardé à tomber : « C’est du cinéma. Je m’en tiendrai là pour ne pas être plus désagréable », a commenté Pascal Le Brun, président de la Coopération laitière. Dominique Chargé, président de la Coopération agricole a « salué toute initiative visant à améliorer le revenu des agriculteurs ». Selon lui, l’initiative de Karine Le Marchand « ne suffira pas à sauver l’agriculture française ni à rééquilibrer les rapports de force », a-t-il tranché. C’est un « énième coup de communication » visant à « détourner l’attention », a taclé l’Association nationale des industries alimentaires (Ania).
Objectif 100 % français dans les prisons en 2028
En visite au Salon de l’agriculture le 27 février, le garde des Sceaux Gérald Darmanin a annoncé que « 100 % des produits que l’on va consommer dans les prisons, au ministère de la Justice, seront français d’ici 2028 ». Actuellement, « à peine 50 % des produits » servis dans les prisons sont d’origine française, a précisé le ministre. « On ne travaille pas du tout avec les acteurs locaux agricoles », a déploré M. Darmanin, qui souhaite un approvisionnement « si possible en circuits courts », sachant qu’il y a « une prison à peu près dans chaque département, au moins ». Quelque 82.000 détenus sont enfermés dans les prisons françaises. Basculer à 100 % d’origine France provoquerait un surcoût de « 5 à 10 % » par rapport au budget actuel. Un effort « tout à fait acceptable et compréhensible », aux yeux du garde des Sceaux. Même si c’est bien pour le monde agricole, pas sûr que c’était le marché principal à servir…
En parallèle, le 26 février, la présidente de Régions de France, Carole Delga, a dénoncé « la multiplication des appels à projets », visant notamment les agences et établissements publics divers, pas seulement dans le secteur agricole. « Assez des doublons avec les agences, des appels à projets dont les ministères ne connaissent même pas l’existence », a lancé la présidente de la région Occitanie, questionnée sur le récent rapport de la Cour des comptes, qui pointe du doigt un « foisonnement » des dispositifs d’aide à l’investissement. « Il faut stopper la prolifération des agences, il nous faut revenir à un État central, et des politiques décentralisées ». Et de citer notamment l’Ademe ou FranceAgriMer. « Nous avons parfois vu des appels à projets lancés alors même qu’il n’y avait pas de gouvernement », s’insurge le président de la région Bretagne, Loïg Chesnais-Girard
Eau : Bayrou promet « quelque chose de révolutionnaire »
Durant sa visite du Salon de l’agriculture le 24 février, le Premier ministre a rencontré les syndicats agricoles. Le chef du gouvernement a « redit sa volonté de simplifier la vie des agriculteurs » et a même promis « quelque chose de révolutionnaire », sans plus de détail. L’annonce concerne l’eau, précise-t-on à la FNSEA, sans savoir s’il s’agit de pollution ou d’irrigation. Lors de son discours de politique générale le 14 janvier, avait indiqué sa volonté d’organiser une « Conférence sur l’eau ». Une visite qui s’est bien déroulée, le Béarnais rappelant ses origines paysannes.
Contrairement à l’an passé, le président de la République avait inauguré, le Salon de l’agriculture, lui aussi sans heurts, ni grandes annonces aux professionnels. Devant les journalistes, il a insisté sur la « nécessité de produire pour nourrir », tout en étant « conscient des obligations de santé humaine et d’écologie » ; il a exprimé son souhait de ne pas faire des agriculteurs « la variable d’ajustement du pouvoir d’achat et des accords commerciaux », rappelant sa position sur l’accord UE/Mercosur. Interrogé sur sa promesse de « prix plancher » de l’an passé, il a rappelé les travaux en cours autour de la loi Egalim 4, et plaidé pour que l’on « ne puisse pas vendre des produits en dessous de leur coût de production et donc qu’on ne les vende pas à perte pour le producteur ».
À l’occasion de son entretien avec le président de la République et la ministre de l’Agriculture le 22 février au Salon de l’agriculture, le président de la FNSEA Arnaud Rousseau avait exprimé le « sentiment partagé sur le terrain » que même si le projet de loi de finances (PLF) pour 2025 a été adopté, il n’y avait pas encore de « concret » dans beaucoup d’exploitations. Et d’évoquer les effets à retardement de plusieurs mesures fiscales, comme celles portant sur la taxe sur le foncier non bâti ou encore les bovins viande. La FNSEA a par ailleurs évoqué les accords commerciaux avec le Mercosur, l’Ukraine et le cas des engrais russes. Lors de l’entretien avec les Jeunes agriculteurs (JA), leur secrétaire général Quentin le Guillous a « salué » le travail du gouvernement sur la loi d’orientation, même si le syndicat reste sur sa faim concernant l’aide aux cédants et l’incitation à la transmission. « Cette loi, c’est le commencement, les fondations. Il reste à construire le toit avec la proposition de loi Duplomb sur les Entraves, le projet de loi Egalim et le foncier ». Concernant les relations commerciales, le secrétaire général a poussé pour que d’autres filières soient intégrées aux dispositifs Egalim tels que l’arboriculture, notamment la pomme et la poire. Quentin le Guillous a par ailleurs demandé que l’agriculture puisse bénéficier des fonds publics récemment annoncés en faveur de l’intelligence artificielle.
Le prochain salon se tiendra du 21 février au 1er mars 2026.