Beaujolais
« Tous les attributs d’un grand, sauf le prix »
Spécialiste du marketing de luxe et œnologue pour
l’entreprise Vindème, Aurélie Labruyère assure que le Beaujolais dispose du potentiel
nécessaire pour tirer ses prix vers le haut. Explications.
l’entreprise Vindème, Aurélie Labruyère assure que le Beaujolais dispose du potentiel
nécessaire pour tirer ses prix vers le haut. Explications.
« Du Beaujolais à 100 €, c’est possible ». En optant pour cette formule, Inter Beaujolais espérait créer un électrochoc dans le monde de la viticulture. A la demande de Jean Bourjade, directeur de l’interprofession, Aurélie Labruyère et Julien Gacon, deux œnologues et professionnels du marketing de la maison Vindème, ont animé une conférence-débat le 3 avril. Une centaine de professionnels avaient répondus présent. Si certains ont réagi positivement ou négativement aux explications parfois sociologiques lancées par les deux conférenciers, ces derniers ont eu le mérite de redonner confiance aux viticulteurs quant à leurs potentiels. Un mois plus tard, nous avons rencontré Aurélie Labruyère.
Du Beaujolais à 100 €. Est-ce un thème provocateur ou une réelle possibilité pour les viticulteurs ?
Aurélie Labruyère : les deux options sont acceptables. Autour des aspects culturel et marketing, nous organisons régulièrement des conférences ou des interventions dans des lycées hôteliers auprès notamment de futurs sommeliers. Etant donné que nous travaillons aussi avec Inter Beaujolais, Jean Bourjade nous a proposé d’intervenir devant les viticulteurs, afin de les aider à pallier ce complexe d’infériorité par rapport à la puissance d’autres régions viticoles. En optant volontairement pour ce prix, il voulait surtout créer un électrochoc. Mais cette formule provocatrice ne masque pas une réelle possibilité d’atteindre cet ordre de prix pour une bouteille de Beaujolais.
Justement, comment susciter le désir d’un consommateur à acheter une bouteille de vin onéreuse ?
A. L. : les opérateurs ont la clé. La qualité d’un vin est la base de cette réussite. Un viticulteur doit lui donner un style ou une identité. Il doit aussi mettre en œuvre des moyens afin de valoriser son image et susciter son désir. Cependant, il faut que l’univers soit en cohérence avec l’image qu’il veut donner aux consommateurs. Cette vision à long terme impose au viticulteur d’être véritablement convaincu de ses valeurs. L’authenticité et la rareté ne vont pas disparaitre face à une montée des prix. Bien au contraire. L’exemple des grands crus bordelais est intéressant. Alors achetée quelques dizaines de francs à l’époque, une bouteille se vend aujourd’hui 500 ou 600 €. On confère donc au vin un statut et des valeurs le rendant particulier et désirable. Aucune loi économique n’empêche un vin d’être vendu plus cher. Les viticulteurs ne doivent nourrir aucun complexe.
Y-a-t-il d’autres moyens pour qu’un vin ou qu’un vignoble gagne en notoriété ?
A. L. : il faut s’attacher à des « banquiers symboliques » ou des « têtes de pioches », c’est-à-dire des viticulteurs obstinés et fiers de leurs produits. De par leur présence, ils vont donner du crédit à un vin, à un domaine ou à un vignoble. Bernard Pivot fait partie de ceux-là en valorisant le Beaujolais. En mars dernier, l’image du président chinois, dégustant un vin de Dominique Piron, exploitant à Villié-Morgon, est frappante. Grâce à ce genre d’action, on peut susciter le désir et l’envie d’acheter des vins du Beaujolais.
Justement, selon vous, le Beaujolais a-t-il des atouts ?
A. L. : à l’échelle mondiale, le Beaujolais est déjà rare avec ses 18.000 ha de vignes ! Mais il faut le valoriser. Son cépage, le gamay, joue aussi un rôle particulier. Il est original, identitaire et rare. Il a la capacité à fournir une diversité de styles. Avec un seul cépage, le Beaujolais peut, par exemple, produire des vieux morgon ou des beaujolais primeurs. Par ailleurs, le beaujolais nouveau est une porte d’entrée extraordinaire. Certes, il a eu une image d’un vin industriel mais il incarne l’art de vivre, la modernité, la joie, le partage et même le luxe dans certains pays comme au Japon. Enfin la région dispose d’atouts paysagers, patrimoniaux, architecturaux et festifs. Le Beaujolais n’a donc rien à envier aux autres régions viticoles. Il a tous les attributs d’un grand vignoble, sauf le prix.
Du Beaujolais à 100 €. Est-ce un thème provocateur ou une réelle possibilité pour les viticulteurs ?
Aurélie Labruyère : les deux options sont acceptables. Autour des aspects culturel et marketing, nous organisons régulièrement des conférences ou des interventions dans des lycées hôteliers auprès notamment de futurs sommeliers. Etant donné que nous travaillons aussi avec Inter Beaujolais, Jean Bourjade nous a proposé d’intervenir devant les viticulteurs, afin de les aider à pallier ce complexe d’infériorité par rapport à la puissance d’autres régions viticoles. En optant volontairement pour ce prix, il voulait surtout créer un électrochoc. Mais cette formule provocatrice ne masque pas une réelle possibilité d’atteindre cet ordre de prix pour une bouteille de Beaujolais.
Justement, comment susciter le désir d’un consommateur à acheter une bouteille de vin onéreuse ?
A. L. : les opérateurs ont la clé. La qualité d’un vin est la base de cette réussite. Un viticulteur doit lui donner un style ou une identité. Il doit aussi mettre en œuvre des moyens afin de valoriser son image et susciter son désir. Cependant, il faut que l’univers soit en cohérence avec l’image qu’il veut donner aux consommateurs. Cette vision à long terme impose au viticulteur d’être véritablement convaincu de ses valeurs. L’authenticité et la rareté ne vont pas disparaitre face à une montée des prix. Bien au contraire. L’exemple des grands crus bordelais est intéressant. Alors achetée quelques dizaines de francs à l’époque, une bouteille se vend aujourd’hui 500 ou 600 €. On confère donc au vin un statut et des valeurs le rendant particulier et désirable. Aucune loi économique n’empêche un vin d’être vendu plus cher. Les viticulteurs ne doivent nourrir aucun complexe.
Y-a-t-il d’autres moyens pour qu’un vin ou qu’un vignoble gagne en notoriété ?
A. L. : il faut s’attacher à des « banquiers symboliques » ou des « têtes de pioches », c’est-à-dire des viticulteurs obstinés et fiers de leurs produits. De par leur présence, ils vont donner du crédit à un vin, à un domaine ou à un vignoble. Bernard Pivot fait partie de ceux-là en valorisant le Beaujolais. En mars dernier, l’image du président chinois, dégustant un vin de Dominique Piron, exploitant à Villié-Morgon, est frappante. Grâce à ce genre d’action, on peut susciter le désir et l’envie d’acheter des vins du Beaujolais.
Justement, selon vous, le Beaujolais a-t-il des atouts ?
A. L. : à l’échelle mondiale, le Beaujolais est déjà rare avec ses 18.000 ha de vignes ! Mais il faut le valoriser. Son cépage, le gamay, joue aussi un rôle particulier. Il est original, identitaire et rare. Il a la capacité à fournir une diversité de styles. Avec un seul cépage, le Beaujolais peut, par exemple, produire des vieux morgon ou des beaujolais primeurs. Par ailleurs, le beaujolais nouveau est une porte d’entrée extraordinaire. Certes, il a eu une image d’un vin industriel mais il incarne l’art de vivre, la modernité, la joie, le partage et même le luxe dans certains pays comme au Japon. Enfin la région dispose d’atouts paysagers, patrimoniaux, architecturaux et festifs. Le Beaujolais n’a donc rien à envier aux autres régions viticoles. Il a tous les attributs d’un grand vignoble, sauf le prix.