« Traverser le cap dangereux de la Pac 2020 » alerte un rapport du Sénat
Les commissions des affaires économiques et européennes du Sénat ont examiné, le 20 juillet 2017, le rapport, intitulé « PAC, traverser le cap dangereux de 2020 ». Présenté à la presse le 26 juillet, il rappelle l’importance de la PAC (politique agricole commune) et remet le budget, la sécurisation, la simplification et le commerce extérieur au cœur des négociations.

« Je dirais presque que c’est la réforme de la dernière chance », déclare Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes, rappelant l’impératif pour les agriculteurs français de faire entendre leur voix auprès de la Commission européenne. Les aides qu’ils perçoivent par le biais de la PAC sont en effet vitales puisqu’en 2014, 91% des exploitations européennes percevaient en moyenne 34.600 euros et que, sans subvention, 61% d’entre elles auraient affiché un résultat courant avant impôt négatif, au lieu des 15% qui se trouvaient dans ce cas. La politique agricole européenne accuse cependant de nombreuses lacunes, auxquelles le rapport rédigé par Claude Haut, Daniel Gremillet, Pascale Gruny et Franck Montaugé a tenté de répondre en 17 propositions qui s’articulent autour de cinq axes. Il s’agit tout d’abord de réaffirmer « la légitimité d’une politique commune forte, simple et lisible » auprès de l’opinion publique et des décideurs politiques, affirme Pascale Gruny, membre de la commission des affaires sociales, qui souligne le fait qu’à la fois « la France ne peut pas se passer de cette économie agricole » mais aussi que « cette agriculture est avant tout européenne » et qu’ « il convient franchement de ne pas la négliger ». En outre, « la future réforme pourrait se traduire par une baisse massive de crédits », s’alarme Jean Bizet, tandis que Daniel Gremillet, membre de la commission des affaires économiques, rappelle la « volonté budgétaire » des agriculteurs français qui travaillent dans « le pays qui profite le mieux de la PAC ». Aussi, le deuxième axe met en garde « contre le risque qui consisterait, à l’avenir, à considérer la politique agricole commune comme la variable d’ajustement du budget de l’Union ».
Crises, vieillissement et concurrence
« Chaque fois qu’il y a une crise, les éléments de réponse de l’UE arrivent toujours après la crise », déplore Daniel Gremillet, alors qu’ « il faut anticiper, il faut avoir une visibilité sur les marchés », ambitionne-t-il. Les agriculteurs européens sont en effet confrontés aux risques économiques, sanitaires et climatiques, raison pour laquelle les commissions des affaires économiques et européennes du Sénat estiment, dans un troisième axe, « indispensable de permettre aux agriculteurs de faire face à la volatilité des prix du marché agricole », réaffirment « la nécessité absolue de sécuriser les revenus des agriculteurs » et de « renforcer le poids des agriculteurs dans la chaîne alimentaire », nous apprend Pascale Gruny. Au-delà du renforcement des assurances, le rapport évoque les impératifs d’une part de diversification des activités agricoles via l’agro-tourisme, les circuits courts ou encore la production d’énergie renouvelable, et de l’autre de la perception d’une plus grande valeur ajoutée. Le quatrième axe aborde les modalités de fonctionnement et de gestion de la PAC, suite au triple constat de la complexité de cette politique, du vieillissement de la population active agricole avec un âge moyen de 48,7 ans des chefs d’exploitation en 2014 et une décroissance annuelle d’1 % sur la période 2005-2014, et des questions environnementales à propos desquelles les agriculteurs sont « malproprement montrés du doigt », comme le dénonce Jean Bizet. En réponse, il s’agit donc de soutenir les efforts de simplification déjà engagés, de renforcer la politique d’aide en faveur des jeunes agriculteurs et de faire des exploitants agricoles les « acteurs clés » de la transition écologique, toujours selon le président de la commission des affaires européennes. Enfin, face à une politique agricole commune « de moins en moins commune », aux « distorsions de concurrence » et aux « différences de coûts, de charges sociales », le cinquième axe est consacré « aux enjeux extérieurs du commerce agricole », explique Pascale Gruny. Dans cette perspective, le rapport exige « une concurrence loyale dans les échanges internationaux », « une amélioration des outils de pilotage » et demande que « la Commission européenne consacre autant de ressources administratives au suivi des accords commerciaux déjà signés, qu’à l’ouverture de nouvelles négociations commerciales ».