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Taxes américaines

Trump aboie mais ne mord pas (encore)

Nouveaux revirements la semaine dernière à la Maison Blanche. « Les États-Unis ont accepté de suspendre les droits de douane sur les exportations canadiennes conformes à l’ACEUM (accord Canada-Etats-Unis-Mexique) jusqu'au 2 avril », a annoncé le 6 mars sur le réseau social X, le ministre canadien des Finances, Dominic LeBlanc. Trump a également reculé sur les taxes contre le Mexique. Les taxes douanières pour l’Europe sont aussi attendues. Mais les marchés économiques les ont déjà sanctionné.

Trump aboie mais ne mord pas (encore)

Le Canada est prêt à gagner la bataille commerciale comme un match de Hockey sur glace à expliquer le nouveau premier Ministre. Néanmoins, après avoir exempté une partie des produits canadiens des droits de douane la veille, le président américain Donald Trump a déclaré le 7 mars être prêt à mettre en place « dès » ce jour des droits de douane réciproques sur les produits laitiers si Ottawa n’abaisse pas les siens sur cette catégorie. « Le Canada nous escroque depuis des années avec des taxes de 250 % sur les produits laitiers et le bois d’œuvre, cela ne se reproduira plus. Nous allons leur imposer exactement le même tarif, à moins qu’ils ne l’abandonnent. C’est ce que la réciprocité signifie et nous pouvons le faire dès aujourd’hui ou attendre », a déclaré M. Trump. « Nous allons facturer la même chose, ce n’est pas juste. Cela n’a jamais été équitable et ils ont mal traité nos agriculteurs », a insisté le président américain. L’accès des produits laitiers américains au marché canadien avait fait l’objet d’un contentieux, dans le cadre de l’accord de libre-échange Canada-États-Unis-Mexique (ACEUM), Washington accusant Ottawa de ne pas respecter ses obligations en la matière. Mais la décision d’un groupe de règlement, une procédure prévue par l’accord, avait donné fin 2023 raison au Canada, qui limitait volontairement le contingent tarifaire de lait américain, soit la quantité de produits laitiers entrant sans être taxés dans le pays.

En parallèle, face aux inquiétudes du monde agricole, le gouvernement de Trump a révisé à la baisse les droits sur les importations de potasse du Canada et du Mexique, qui ne sont pas déjà couvertes par l’ACEUM, de 25 % à 10 %. Cette annonce « est une étape essentielle pour aider les agriculteurs à gérer et à sécuriser les coûts des intrants clés au plus fort de la saison des semis, tout en renforçant les relations commerciales agricoles à long terme », a déclaré la secrétaire d’État américaine à l’Agriculture, Brooke Rollins. En Europe et en France, les opérateurs économiques tentent de prendre la place laissée par les boycotts des produits américains qui se multiplient dans le monde, alors que l’inflation galope aux États-Unis.

La riposte chinoise sur les produits agricoles

Décidés en représailles à un énième décret de Donald Trump visant Pékin, de nouveaux droits de douane chinois s’appliquent depuis ce lundi 9 mars sur tout un éventail de produits agricoles américains. Après avoir imposé des droits de douane supplémentaires de 10 % à l’encontre de tous les produits chinois, Donald Trump avait décidé le 3 mars de les porter à 20 %. « Fortement mécontente », la Chine a riposté dans la foulée, en annonçant des taxes du même type contre des produits issus de l’agriculture américaine. Poulet, blé, maïs et coton entrant en Chine seront davantage taxés (15 %) que sorgho, soja, porc, bœuf, produits de la mer, fruits, légumes et produits laitiers (10 %). Des experts estiment que cette réaction chinoise reste modérée pour rendre encore possible un accord commercial.

Les filières françaises se préparent au pire

C’est le 2 avril que la hausse des taxes sur les produits européens prendra effet, a assuré le président Donald Trump lors de son discours sur l’État de l’Union le 4 mars. Selon toute vraisemblance, ces taxes à l’importation devraient être augmentées de 25 % sur de nombreux produits agricoles. La balance commerciale excédentaire que la France affiche avec les États-Unis (5,4 milliards d’euros en 2023), grâce à sa filière vins-spiritueux (champagne, cognac…) devrait s’amenuiser. Les quelque 800 millions d’euros que les secteurs laitier et fromager (300 M€), confitures (200 M€), BPV* (environ 170 M€) et l’alimentation animale (environ 140 M€) parviennent à dégager chaque année n’échapperont pas, eux non plus, aux effets négatifs de cette décision protectionniste. À ce jour, la liste des secteurs touchés n’est pas encore connue, ce qui plonge les filières agroalimentaires dans le flou et le dénuement le plus total. Le secteur du machinisme pourrait être aussi impacté. En 2019, en représailles du conflit Boeing/Airbus, le président Trump avait taxé les importations de vins-spiritueux et le secteur laitier de 25 %. La facture avait été salée : un recul de 40 % pour les seules exportations de vins et spiritueux, avec une perte de plus de 500 M€ pour les viticulteurs français.