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Production caprine

Un audit qui incite à aller de l’avant

C’est une « filière caprine en mouvement », qui n’attend plus qu’à être « redynamisée », que le Centre fromager de Bourgogne et la chambre d’agriculture ont présenté le 12 décembre dernier aux Bizots. En introduction d’une riche journée technique, les organisateurs ont révélé les premiers résultats d’un audit plein d’enseignements.
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En décembre dernier, le Centre fromager de Bourgogne et la chambre régionale d’agriculture organisaient des journées techniques dans la région. La première d’entre elles a eu lieu en Saône-et-Loire, à la Ferme de la Cruzille (exploitation de la famille Depoil) aux Bizots. Cette journée dense a été l’occasion de dévoiler les premiers résultats de l’état des lieux de la filière commandité par la chambre régionale courant 2013. Avec l’Institut de l’élevage, c’est un véritable audit de la filière caprine bourguignonne qui vient d’être effectué. Objectif : voir ce qui peut être amélioré tant dans les élevages qu’en matière d’expérimentation et faire le point sur le dispositif d’accompagnement technique des élevages.

Premier département français en producteurs fermiers



Premier constat : en dépit d’une notoriété fromagère sous exploitée, la Bourgogne est une région qui sort du lot ne serait-ce que par son nombre d’ateliers caprins fermiers. Une position qu’elle doit d’ailleurs pour 70 % à la Saône-et-Loire, gros département caprin à forte tradition fromagère et premier département français en nombre d’ateliers fermiers. La région compte un peu plus de 300 élevages caprins de plus de dix chèvres dont 230 rien qu’en Saône-et-Loire.

Anticiper la transmission des ateliers



La région est cependant confrontée à une baisse du nombre des exploitations et le cheptel régional (42.000 animaux dont les trois quart en Saône-et-Loire) s’est réduit de 9 % en dix ans. La mise aux normes des fromageries a fait disparaître deux tiers des ateliers de moins de dix chèvres tandis que le nombre d’élevages de plus de 200 chèvres a doublé en dix ans. Le nombre d’éleveurs a pour sa part diminué de moitié. En Saône-et-Loire, la moitié a entre 40 et 55 ans et un quart n’a pas de successeur, ce qui veut dire qu’il va falloir anticiper la question de l’installation et de la transmission des ateliers.

Production fermière omniprésente



En plus d’être dominée par la production fermière (95 % des exploitations), l’autre spécificité de la Saône-et-Loire est d’avoir une part importante d’élevages associés à une production de vaches allaitantes.
Pratiquée de façon traditionnelle dans les élevages bourguignons, la vente directe a l’avantage de s’inscrire dans la tendance des circuits courts. Quelques affineurs offrent cependant un débouché pour des fromages en frais. Le département ne compte qu’entre 10 et 15 producteurs de lait de chèvres ainsi que deux laiteries.
En Bourgogne, neuf élevages caprins sur dix transforment leur lait ce qui hisse la région à la troisième place en volume transformé à la ferme. Le département dispose de deux AOC. Trois producteurs sont engagés dans la démarche fromages de chèvre mâconnais et 17 dans le fromage charolais.

Une filière qui ne manque pas d’atouts



Basée sur le pâturage et les systèmes herbagers, la production caprine régionale dispose d’un sérieux atout pour la maîtrise des coûts de production (lire ci-contre). L’augmentation de la taille des troupeaux et la spécialisation des ateliers s’est accompagnée d’une professionnalisation de la filière. Cette dernière a aussi l’avantage de se révéler attractive puisqu’on recenserait une dizaine d’installations par an en Saône-et-Loire. Enfin, dotée d’une forte tradition de transformation et de consommation locale, la filière ne manque pas de débouchés.


Accompagnement technique
Un dispositif très complet en Saône-et-Loire



L’accompagnement technique caprin se décline aujourd’hui tout d’abord par le « suivi installation » assuré en grande partie par les conseillers de secteur de la chambre d’agriculture. Un accompagnement technique « transformation » est assuré par le Centre fromager régional de Davayé. Le suivi technique en élevage vient d’évoluer. Trois techniciens de Saône-et-Loire Conseil élevage assurent le suivi des adhérents du contrôle laitier et l’un d’entre eux (Jean-Luc Nigoul) fait également office de technicien caprin à la chambre d’agriculture de Saône-et-Loire. Des formations « coûts de production » (avec Sophie Mobillion) et « pâturage » (avec Eric Braconnier) vont être mises en place. Un technicien du GDS interviendra par ailleurs sur les aspects sanitaires. Enfin, les éleveurs caprins peuvent bénéficier d’un accompagnement « valorisation du produit » assuré pour partie par Violaine Marguin de la chambre. A cela s’ajoutent la ferme de Davayé ainsi que les formations BPREA et les « certificats de spécialisation » dispensés sur place.




Coûts de production
Avoir des charges faibles et des produits élevés



L’intérêt pour le calcul des coûts de production n’échappe pas à la filière caprine. La crise du prix du lait de chèvre n’y est pas étrangère de même que la hausse des charges. Depuis quelques temps, le revenu des chevriers stagne à l’échelle nationale. « Depuis trois ans, les charges ont augmenté plus vite que le produit », rapporte Jean-Luc Nigoul, technicien à Saône-et-Loire Conseil Elevage et à la chambre d’agriculture. Chez les fromagers, les marges brutes ne décollent plus en dépit d’une augmentation des prix à la vente et d’une meilleure valorisation que le lait. Toutefois, le revenu des fromagers résiste mieux que celui des laitiers. Le coût de la main-d’œuvre salariale pèse cependant très lourd chez ces derniers.

Avantage aux systèmes fromagers autonomes


Les données collectées au niveau national montrent que ceux qui s’en sortent le mieux sont « ceux qui produisent plus de lait, vendent mieux et ont des charges maîtrisées ». A contrario, ceux qui s’en sortent le moins bien ont des charges qui ont explosé. Dans les charges, c’est la hausse de l’alimentation qui porte le plus lourd préjudice du fait de tout ce qui est acheté à l’extérieur (céréales, tourteaux, luzerne etc…). Par conséquent, ce sont les systèmes les plus autonomes qui limitent le mieux la casse, constate Jean-Luc Nigoul.
En Saône-et-Loire, l’exploitation type a l’avantage d’être relativement autonome (système herbager, céréales auto-produites, peu d’achat de concentrés). En revanche, la commercialisation en direct génère de très lourdes journées de travail (jusqu’à 16 heures par jour). Autre difficulté spécifique aux fromagers saône-et-loiriens, les exploitants doivent cumuler trois compétences : dans l’élevage, la transformation et la vente. Trois postes clés pour lesquels il faut conjuguer réussite et optimisation du temps de travail. Le coût des investissements est un autre bémol dans les systèmes fromagers.

Marges de progrès


Des marges de progrès existent. Une augmentation de la production par chèvre peut permettre une amélioration du revenu de +14 %, indique par exemple Jean-Luc Nigoul. Une augmentation du prix du lait de +100 euros par mille litres peut générer +12 % de revenu. Une économie de 30 euros de concentrés pourrait engendrer +510 euros de revenu par mille litres… Globalement, c’est sur la partie « produits » qu’il semble le plus y avoir à gagner (production, commercialisation, prix), constate le technicien




Premiers chiffres en Saône-et-Loire


Saône-et-Loire Conseil élevage et la chambre d’agriculture viennent de mettre en place un service « coût de production caprin ». Grâce à un tableur permettant de saisir la comptabilité des élevages, il est possible d’aller décortiquer les coûts de production d’une exploitation et de procéder à une analyse de groupe dans le cadre d’une formation. Les premiers résultats issus de l’étude de sept exploitations révèlent de gros écarts entre elles. Les coûts de production calculés vont de 500 à 1.500 euros pour 1.000 litres de lait ! Les frais d’alimentation vont de 100 à 300 euros/1.000 litres. De gros écarts sont également constatés dans la mécanisation. Avec une production par unité de main-d’œuvre allant de 29.000 à 50.000 litres, la notion de productivité se révèle essentielle. Enfin, pour dégager un revenu du 1,5 SMIC, il faudrait une valorisation de 1.766 euros/1.000 litres de lait produit, calcule Jean-Luc Nigoul.


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