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Chèvrerie des Terres Chaudes

Un cinq étoiles à moindre coût !

Projetant d’adjoindre une activité pédagogique à leur élevage, Amélie et Yohann Dufour ont choisi de concevoir eux-mêmes leur chèvrerie. Prévu pour recevoir du public, l’ouvrage est à la fois fonctionnel, esthétiquement soigné et largement dimensionné. Pour compenser le surcoût, le jeune couple a eu recourt à une bonne dose d’astuces et d’autoconstruction. 
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Producteurs de fromages de chèvres à La Boulaye, Amélie et Yohann Dufour se sont dotés d’un outil de travail atypique et en grande partie auto-construit. Pour comprendre la singularité de leur réalisation, il faut remonter au projet initial du jeune couple. Amélie et Yohann voulaient en fait créer une ferme pédagogique où les animaux n’auraient été que le support d’activités pour des groupes d’enfants. Le projet n’a pas vraiment convaincu les financeurs et le jeune couple s’est vu conseiller d’ajouter une vraie production agricole à l’activité pédagogique. C’est ainsi qu’Amélie et Yohann ont opté pour un atelier caprin.
Dans le même temps, une ferme s’est trouvée à vendre tout près de l’exploitation laitière des parents de Yohann à La Boulaye. Le jeune couple a tout de suite saisi cette opportunité bien que « tout était à refaire » au niveau bâtiments. Ayant déjà eu à emprunter pour l’acquisition de la ferme, les jeunes éleveurs ont étudié la possibilité de réhabiliter l’existant. Mais dès le départ, Amélie et Yohann n’ont pas voulu s’imposer une structure limitante en capacité. Une chèvrerie avec tunnel et "Algéco" pour la fromagerie a pendant un temps été envisagée. Très économe, cette solution ne satisfaisait pas le couple, car il aurait fallu investir à nouveau au bout de dix ans. Amélie et Yohann ont préféré construire du neuf, quitte à devoir revoir à la hausse la taille de l’atelier caprin. De soixante, le projet est passé à cent chèvres pour pouvoir payer le bâtiment. La capacité totale de l’outil est même de 200 animaux et l’élevage compte aujourd’hui 130 chèvres en production.

Parcours de visite


Cette volonté de ne pas sous-dimensionner, pas plus que de figer, la structure se retrouve dans tous les aspects de la conception du bâtiment. Conception qu’Amélie et Yohann ont entièrement réalisée eux-mêmes après avoir visité de nombreuses chèvreries en activité.
Aux retours d’expérience des autres éleveurs, le jeune couple a aussi intégré à ses plans son ambition première de développer une activité pédagogique au sein de la ferme. C’est ainsi qu’un parcours de visite a été prévu partant de la stabulation des animaux au magasin de vente en passant par la salle de traite et la fromagerie. Après avoir assisté à la traite, les visiteurs emprunteront un couloir duquel ils verront, à travers de grandes parois vitrées, les étapes de fabrication du fromage.

Salle de traite centrale


Parmi les nombreuses particularités du bâtiment, Amélie et Yohann ont choisi de placer leur salle de traite au centre et non à l’une des extrémités. Ils ont aussi choisi de fermer complètement le local de traite avec des parois vitrées, ce qui protège du gel et donne plus de visibilité dans le cadre d’une visite. Au dessus de la salle, une cellule d’aliments a été aménagée. Au sortir de la salle de traite débute le circuit de fabrication du fromage qui débouche sur le magasin. Cette partie prend place dans un bâtiment en "L" qui rejoint latéralement la stabulation. Imposant et d’esthétique soignée, ce bâtiment comprend deux niveaux. Au-dessus de la fromagerie et du magasin, seront aménagés un appartement, un bureau et une salle de réunion de 130 m2. Ce dernier équipement est prévu dans le cadre d’activités annexes telles qu’accueil de classes ou centres aérés, séminaires d’entreprises, clubs de retraités…

Fromagerie de 180 mètres carrés


La fromagerie a été conçue avec soin. Le tank à lait est surélevé jusqu’au plafond ce qui permet de tirer le lait par gravité. Le lait caille dans des bacs qui se déplacent sur roulettes. Ayant entendu de nombreux éleveurs se plaindre du manque de place en fromagerie, Amélie et Yohann ont conçu un espace de travail très vaste (180 mètres carrés), apte à transformer la production laitière de 600 chèvres ! Cela offre aussi la possibilité de recloisonner la fromagerie au cas où l’exploitation se diversifierait dans d’autres produits lactés ou non.
La Chèvrerie des Terres chaudes commercialise d’ores et déjà de la viande bovine, du saucisson et du chorizzo de chèvre ainsi que des macarons au fromage de chèvre !

Agréé pour recevoir du public


La vocation pédagogique, voire touristique, de l’installation génère un gros surcoût, reconnaît Yohann. La structure sera agréée pour recevoir du public et, de ce fait, tout a du être adapté pour des personnes handicapées (largeur des passages, hauteurs des vitres, parcours de plein pied…). Au total, l’ensemble de la réalisation aurait du atteindre 600.000 euros ! Mais grâce à une bonne dose d’autoconstruction, de nombreux coups de mains notamment familiaux et d’astuces pour limiter les dépenses, le coût ne sera que de 340.000 euros !
Mais cette économie s’est faite au prix de nombreux sacrifices. Durant les trois années qu’a duré la construction du bâtiment, le jeune couple n’a pas pu profiter de ses week-ends. Et les chèvres de même que les champs ont pâti de ce surcroît de travail auquel devaient faire face les deux éleveurs. En prime, l’autoconstruction allonge les délais de réalisation et aura retardé la montée en puissance de la production de fromages.

De nombreux coups de main


Dans leur labeur, Amélie et Yohann ont été particulièrement bien entourés. A commencer par le père d’Amélie, artisan maçon de métier, lequel a supervisé le tout en véritable professionnel. C’est d’ailleurs sa contribution qui explique le degré de perfection des différents ouvrages et certaines astuces techniques.
En dépit de cette présence « extérieure », Yohann et ses proches ont tout de même réalisé une grande partie des fondations, murs, chapes, ciments, plomberie, carrelage… Deux semi-remorques de ciment ; neuf d’agglo ; trois de couvertures ; deux de charpentes soit un total de 16 camions plus 1.200 tonnes de remblais ont été nécessaires !
L’autre gros coup de main est venu du père et de l’oncle de Yohann qui ont eux aussi une sacrée expérience dans ce genre de travaux. C’est d’ailleurs les deux frères qui ont fourni le matériel, à savoir un chargeur téléscopique, une pelle à chenille, un tractopelle, une bétonnière…
Pour les charpentes (stabulation, toiture), Yohann a eu recours à une solution en kit, acquise auprès d’une entreprise spécialisée de Trambly en Saône-et-Loire. Cette dernière est capable, à partir du plan du client, de réaliser toutes les pièces de charpente avec une précision impressionnante. Les pièces de bois sont livrées numérotées et accompagnées d’une notice de montage.

Occasions et récupération


Outre l’autoconstruction, Amélie et Yohann ont eu également recours à des achats d’occasion pour alléger les factures. C’est le cas de l’équipement de salle de traite, des cornadis, du matériel de fromagerie en inox, d’une banque réfrigérée dégotée dans une vente aux enchères pour seulement 50 €, de la poche de récupération des eaux blanches…
L’art de la récupération a fait des merveilles : Yohann et ses proches sont allés récupérer des vitres sur un local commercial en démolition près de Chalon-sur-Saône. Des caillebotis de canards ont également été recyclés dans la chèvrerie !
Amélie et Yohann ont réalisé une grosse économie en effectuant eux-mêmes toutes la contention intérieure de la stabulation ainsi que le bardage et les portes en bois. Disposant d’un banc de scie dans la famille, le couple a acheté des grumes qu’il a débitées lui-même. Yohann a également conçu son système de contention de traite par l’arrière.

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