Un plan d’actions pour l’agriculture
Hollande a frappé fort avec quatre heures de visite suivies d’un
discours de 40 minutes sur les orientations qu’il entend donner à la
politique agricole française. Une rentrée politique aux couleurs
agricoles.
Après ce défilé de stars en tout genre, place au concret. Le président du Space, Jean-Michel Lemétayer, ouvre le bal des discours et tente d’être rassurant. Dans un contexte de hausse des matières premières, le moral de la plupart des éleveurs n’est certes pas au beau fixe, et « le Space est le reflet du dynamisme des acteurs des filières animales, de leurs espoirs, et aussi de leurs difficultés ».
Face aux difficultés
Pour rassurer la profession agricole, François Hollande a annoncé le lancement d’un « plan d’actions », présenté par Stéphane Le Foll le 12 septembre en Conseil des ministres. « L’Etat doit accompagner la solidarité professionnelle par la solidarité nationale », rappelle-t-il. Ce plan prévoira « l’échelonnement des cotisations sociales et un accompagnement bancaire individuel pour les éleveurs qui connaissent des difficultés ». « Nous aurons aussi à activer les mécanismes de négociations commerciales et notamment les accords de mai 2011 », ajoute-t-il. Accords du 3 mai 2011 initié par la FNSEA et qui ouvrent pour les filières bovine, porcine et volaille des négociations sur les prix de vente en cas de variation excessive à la hausse ou à la baisse des prix des aliments du bétail.
Lutter contre la volatilité des prix mondiaux est, pour François Hollande, une question prioritaire. Il souhaite mettre en place, au niveau mondial, des outils de protection contre la volatilité sous forme de réserve alimentaire d’urgence. « Je milite également pour que soit engagée une régulation capable de lutter contre les fluctuations de prix ».
Alors que le cours actuel élevé des céréales impacte l’élevage, « si on remet en culture des terres consacrées à l’élevage, alors c’est toute la qualité des exportations qui sera remise en cause ainsi que l’avenir des territoires »… Une position qui sonne comme un refus de la recherche de plus grande autonomie alimentaire des élevages…
Une priorité… régionale ?
« L’enjeu des productions animales sera une priorité », assurait pour autant François Hollande mettant aussi l’accent sur la compétitivité : « il nous faut partir à la reconquête des marchés mondiaux. L’innovation, la qualité, l’exportation, tout devra être mobilisé ».
Le Chef de l’Etat a insisté sur l’importance des régions en France qui sont « les partenaires » de la dynamique de compétitivité. « Elles seront les chefs de file de la formation et de l’innovation ». Le 12 septembre, François Hollande recevait l’ensemble des présidents de régions… « J’entends les mobiliser autour de cet agenda du redressement productif et aussi pour le développement des industries agroalimentaires ». Selon lui, l’atout de la France repose sur la qualité inhérente à la valorisation de nos territoires.
Un nouveau dispositif fiscal
Le président a annoncé une politique d’installation des jeunes renforcée et rénovée sous la houlette du ministre de l’Agriculture. Dans ce sens, il assurera une « défense du budget européen pour maintenir la Pac ». « C’est une condition pour que les jeunes rentrent dans le métier et pour permettre de faire vivre dignement leur famille. Il faut qu’ils aient les conditions pour investir, embaucher ou produire ». La préservation du foncier sera aussi au cœur de la problématique : « il est inacceptable de voir disparaître 100.000 hectares de terres agricoles. La sanctuarisation des terres agricoles devra être menée avec tous les moyens juridiques nécessaires ».
Concernant la fiscalité, dès 2013, le Chef de l’Etat entend que soit mis en place « un nouveau dispositif fiscal permettant aux agriculteurs de se protéger davantage par rapport aux risques et plus souple d’utilisation ». « Les dispositifs de dotation pour aléas (DPA) et de dotation fiscale pour investissement (DPI) ne répondent plus aux objectifs », selon François Hollande, qui souhaite aussi que les « instruments de couverture des risques » comme les assurances soient améliorées.
Agriculture et redressement productif
Sur le volet de la protection sociale, le chef de l’Etat a rappelé son intention de proposer avant la fin de l’année une réforme du mode de financement de la protection sociale pour améliorer la compétitivité de l’agriculture française. Si l’idée de la TVA sociale est écartée par le gouvernement, François Hollande veut tout de même « aller chercher d’autres contributions et ne pas pénaliser ce qui doit aujourd’hui être stimulé ». Cette annonce avait déjà été faite lors de la conférence sociale en juillet, mais le chef de l’Etat a insisté sur l’association des professions agricoles à cette réforme. « Je veux que l’agriculture fasse pleinement partie du redressement productif », conclut-il.
La politique environnementale aussi
Une révolution doublement verte, c’est ce que veut le Chef de l’Etat en matière d’environnement. « Il faut produire d’avantage, mais différemment. L’intérêt est de pouvoir conjuguer la performance économique nécessaire avec l’impératif environnemental ». Il souhaite que les agriculteurs « prennent toute leur place dans la conférence environnementale » qui se déroulerait les 14 et 15 septembre et reconnaît l’engagement des agriculteurs pour l’environnement : « je n’ignore rien de ce que les agriculteurs ont fait depuis des années pour maîtriser tous les critères liés à l’environnement ». En priorité, il veut que soient préservées les terres agricoles et lutter contre l’artificialisation des sols. Son objectif est aussi de retrouver une diversité des productions. Thématique qui sera abordée dans les groupements d’intérêts économiques et écologiques proposés par le ministre de l’Agriculture dans la prochaine loi agricole.
Au niveau européen, la France doit participer au verdissement de la Pac « mais à une condition : que la réalité soit adaptée aux conditions de nos exploitations ». Quant au second pilier, « la France doit l’utiliser pour accompagner le mouvement agro-environnemental, mais en utilisant toutes les techniques y compris les plus innovantes ».
Un accueil positif
Xavier Beulin, président de la FNSEA, s’est dit « satisfait d’avoir entendu le président », trouvant le discours du chef de l’Etat « extrêmement réaliste, pragmatique, à la fois sur la compétitivité, sur la diversité de l'agriculture française, sur les enjeux en matière d'exportation ». Pour lui, inscrire l’agriculture dans le redressement productif lui convient : « quand le Président dit "l'agriculture est un des secteurs qui doit contribuer au redressement productif", moi cela me va ! ». Concernant la réforme fiscale, le président de la FNSEA a insisté sur le fait que cette mesure est « très attendue par le monde agricole ». Enfin, la « pause » sur les biocarburants demandé par le président de la République et reprise par le plan d’action est « une décision sage ».